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Après avoir vu les moines lutter contre le maire de Parçay et ses enfans qui les dépouillent et qu'ils n'osent punir, on sera peut-être eurieux de lire une sorte de Code d'instruction criminelle rédigé sous les auspices de Juhell, archevêque de Tours; c'est un traité destiné à mettre fin aux contestations que faisaient naître sans cesse entre le seigneur de Lugny et les moines de Saint-Quentin la prise et la garde des voleurs.

Juhellus (1) Dei gratiâ Turonensis archiepiscopus universis presentes litteras inspecturis salutem in Domino noverint universi quod cum inter priorem et conventum de Gressio (2) ex unâ parte, et Garinum Gonele militem ex alterâ super vigeriam terræ dictorum prioris et conventûs de Bochellii quam vigeriam idem miles ad se dicebat pertinere et dicti prior et conventus ex abuso dicebant quod dicta vigeria ad ipsos pertinebat: contentio verteretur; tandem dictæ partes in nostrâ presenciâ institutæ super permissis in hunc modum pacis concorditer convenerunt: quod si aliquis latro in dictâ terrâ caperetur, ut de extrà terram sit sequutus, extraneus et non mansionarius in dictâ terrâ, serviens dictorum prioris et conventus hoc notificaret dicto militi aut ejus mandata in domo suâ de Luigneio, et latronem capere poterit sine conditione eorum idem miles cum omnibus rebus quas idem latro habebit. Si vero latro mansionarius in dictâ terrâ captus fuit similiter serviens dictorum prioris et conventus eidem militi notificabit: et eumdem latronem poterit capere similiter idem miles cum omnibus rebus quas super sé habebit quum caperetur tantum modo, nec in aliis rebus dicti latronis

(1) Juhellus: Jubel de Mayenne fut archevêque de Tours de 1229 à 1244. (2) Gressio: Gray, Grez, Gruz: Prieuré de Saint-Jean-du-Grez.

poterit idem miles aliquid reclamare post diem vero denunciacionis factæ dicto militi aut ejus mandato : in dicto loco serviens prioris et conventus latronem non tenebitur custodire. Si autem dictus miles dubitaverit quod ille qui latronis cepit aliquid de rebus prædictis quæ habere debebit, celaverit aut habuerit, juramentum illius habebit quid aliquot de rebus predictis non habeat, et supradicti capientis tenebitur credere juramento. Nec aliud poterit idem miles in dictâ terrâ de utero reclamare: immo omnimodo alia vigeria eisdem priori et conventui in perpetuum remanebit tam in dictâ terrâ quam in omnibus hominibus extraneis seu mansionariis in eâdem per hoc tamen non præjudicatur dicto militi in uno modio frumenti quod habere dicitur in terrâ supradictà, actum ad petitionem partium mense junio anno Domini millesimo ducentesimo quod regesimo sexto.

que

Qu'on n'aille pas croire que les questions de compétence traitées dans ce traité soient discutées dans l'intérêt des justiciables; ce serait une erreur : il ne s'agit ici de l'intérêt pécuniaire et seigneurial des juges: les biens des condamnés étaient confisqués au profit de celui au nom de qui se rendait la justice: ici les juges se disputent non-seulement la dépouille du voleur, mais encore les objets volés : il ne vient à l'idée d'aucune des parties contractantes que l'objet volé n'appartient pas au voleur: ils ne se figurent pas que la justice doit s'efforcer de réparer le tort causé par le coupable; le fruit du vol leur semble une sorte de part que le hasard jette entre leurs mains, et dont ils s'emparent parce qu'ils ont le pouvoir de s'en emparer : qu'on n'oublie pas qu'à cette époque les seigneurs cou

raient les grandes routes pour dévaliser les passans: ils devaient trouver tout simple de garder pour eux les objets volés par d'autres.

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Des hommes qui avaient fait vœu de pauvreté recevaient et achetaient perpétuellement des propriétés foncières, des rentes et redevances, des droits seigneuriaux sans doute ils avaient pour excuse la charité que l'on pratiquait scrupuleusement dans quelques couvens cependant on a pu remarquer que dans toutes les pièces qui précèdent, il n'est pas question d'aumône tout ce qu'on donne aux moines, leur est donné pour leur subsistance : tout ce qu'on leur demande, ce sont des messes. Il est vrai que quelquefois on exige d'eux une rente payable en argent; mais ils stipulaient que, s'ils ne payaient pas ces rentes, ils ne perdraient les domaines concédés; tantôt ils finissaient par pas obtenir des donateurs ou de leurs descendans la remise de ces redevances tantôt ils cessaient de les payer, puis opposaient la prescription: au milieu du treizième siècle, les moines possédaient plus de terres que les hauts barons du royaume; ils avaient plus d'or, de pierreries, que n'en contenait le trésor des rois de France. Les papes les avaient comblés de priviléges qui leur servaient d'armes offensives et défensives : rappelez-vous tous les rois de France à genoux devant le tombeau de saint Martin de Tours, les peuples marchant à la Terre-Sainte à la voix des moines, ces mêmes hommes bravant partout et la suprématie des prélats, et l'autorité royale, et les ordres de la reine Blanche; et vous aurez l'idée de ce que l'intrigue et le mensonge peuvent accumuler de puissance. Cependant l'excès de leur prospérité inquiétait les ordres religieux: aussi les moines, qui se sentaient trop faibles pour pou

voir se passer entièrement d'un appui, s'étaient-ils efforcés de se maintenir dans les bonnes grâces de la cour de Rome; il n'y avait qu'un moyen de s'assurer la protection des papes, c'était de se prêter à leurs vues ambitieuses: ce rôle devint celui des moines; ils combattirent pour les papes, et soutinrent de leur crédit et de leur parole les prétentions les plus exagérées qu'il plut aux successeurs de saint Pierre de faire prêcher à la chrétienté pour tant de services les religieux leur demandaient sans cesse et de nouveaux priviléges et le maintien des anciens, et surtout la permission d'être riches et de s'enrichir encore, comme s'ils n'eussent pas renoncé au monde et à ses vanités.

Les papes n'étaient pas ingrats, les bulles suivantes en sont la preuve.

Alexander episcopus servus servorum Dei cunctis in Christo. Filiabus abbatissæ et conventui monasterii de virginitate Cisteriensis (1) ordinis Cenomanensis diocesis salutem et apostolicam benedictionem : solet annuetè sedes apostolica piis votis et honestis petentium desideriis favorem benevolum impartire, quapropter dilecte in Domino filie, vestris justis petitionibus grato concurrentes assensu ut privilegiis et indulgentiis Cisteriensis ordinis ab apostolicâ sede concessis vel in posterum concedendis quæ nobis competunt, gaudere possitis auctoritate vobis presentium indulgemus. Nulli ergo hominum liceat hanc paginam nostræ concessionis infregere vel ei ausu temerario contrarie si quis autem hoc attemptare presumpserit indignationem omnipotentis Dei et beatorum Petri et Pauli apostolorum ejus

(1) Cisteriensis ordinis : ordre de Cîteaux.

se noverit mansurum. Dat. Viterbii XI KI. julii pontificatus nostri anno quarto.

Alexander episcopus servus servorum Dei dilectis filiis abbati et conventui monasterii de Burguelio ordinis sancti Benedicti Andegavensis diocesis salutem et apostolicam benedictionem. Vestræ religonis honestæ cui favor debitur gratie specialis laudabiliter promittetur ut quæ justè deposcitis ad exauditionis gratiam admittamus volentes igitur paci et tranquillitati vestræ ac monasterii vestri indemnitatibus quantum cum Deo possumus precavere, vobis auctoritate presentium indulgemus ut libertatibus jurisdictionibus honoribus ac dignitatibus liberè ac sine diminutione aliquâ gaudere possitis tùm in capite quam in membris quibus a quinquaginta annis monasterium vestrum hactenus prescriptione legitimâ est gavisum, nichominus prohibentes archiepiscopi et episcopi in quorum diocesibus dictum monasterium et membra ipsius consistunt et alii ordinarii aliquid a vobis, nisi id tantùm quod a monasterio vestro et membris ejusdem hactenus percepisse noscuntur, contra prescriptionem legitimam exigere vel extorquere presumant. Nulli ergo omninò hominum liceat hanc paginam nostræ concessionis infringere aut ei ausu temerario contrarie; si quis autem hæc attemptare presumpserit indignationem omnipotentis Dei et beatorum Petri et Pauli apostolorum ejus se noverit mansurum. Dat. Neapoli XV Kl. junii pontificatus nostri anno primo.

Urbanus episcopus servus servorum Dei dilectis filiis abbati et conventui monasterii de Vendocino (1) ordinis (1) Vendocino: Vendôme.

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