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Jean-Baptiste-Louis-Frédéric de La Rochefoucauld, marquis de Roucy, duc d'Anville par brevet du mois de mars 1732, qui, pour le plus grand malheur de la marine française, se vit en outre revêtu, en 1745, du grade de lieutenant général des armées navales. De tous côtes des vides s'étaient opérés dans les hautes régions du personnel de la marine, sans que rien autre chose que des nullités, pire que cela, d'orgueilleuses et fatales incapacités parussent devoir les remplir. Petit-Renau avait fini ses jours, le 29 septembre 1719, laissant à l'État une foule de précieux mémoires manuscrits, au public une Histoire de la manoeuvre des vaisseaux, renfermant un système de signaux, qui avait été imprimé en 1689 par ordre du roi, sur la proposition de Tourville, et des lettres dans le Journal des savants, pour répondre aux objections que Huygens et Jean Bernouilli faisaient contre quelques-uns de ses principes. Quelque temps après qu'il eut enseigné et pratiqué la méthode de bombarder par mer au moyen de mortiers placés sur des galiotes, Des Chiens donna la manière de lancer des bombes avec du canon. Petit-Renau avait tour à tour servi sur mer et sur terre. Vauban l'avait employé en première ligne aux siéges de Philipsbourg et de Mons. On sait la part considérable qu'il avait prise au progrès de la construction des vaisseaux ; il s'était surtout montré partisan des bâtiments de 90 et de 100 canons. Fait en 1689 capitaine de vaisseau, avec la prérogative d'entrer dans le conseil de marine et d'y avoir voix délibérative, le brevet de son grade ne lui avait pourtant été expédié que plus tard, en 1691, avec celui d'ingénieur général de la marine. Sa mission dans les ports et sur les vaisseaux avait été depuis lors supérieure de beaucoup à ses titres mêmes. On l'avait élevé jusqu'au droit de faire assembler les officiers supérieurs et généraux de mer pour leur donner des leçons de manœuvre, et de signaler au ministre les capacités et les défauts de chacun. Il était devenu en réalité le professeur et l'examinateur général de la marine, en même temps qu'il en était l'ingénieur pour tous les cas d'attaque de places par mer et de descentes. Ce n'était pas tout, en 1699, de la marine sa mission s'était étendue jusqu'aux colonies, où on l'avait envoyé à la tête d'une petite division navale pour y étudier le meilleur système de défense qu'on pourrait leur appliquer, en même temps que tous les moyens de les faire prospérer (2). Appelé par

Philippe V en Espagne, de l'agrément de Louis XIV, Petit-Renau avait été élevé au grade de lieutenant général des armées de ce pays. Après la guerre de la succession à laquelle il avait pris une part si active, on l'avait autorisé à passer à Malte pour y donner au grandmaître les avis nécessaires à l'augmentation des fortifications de l'île. C'était à son retour de Malte, qu'on l'avait appelé au conseil de marine administrant, tel qu'il exista sous la Régence. On l'avait en même temps décoré de la grand'croix de Saint-Louis. PetitRenau, comme Vauban, dont il était l'élève, avait porté ses observations et ses calculs sur les choses de l'administration civile, aussi bien que sur celles de la guerre. Aussi avait-il eu l'honneur d'être choisi pour donner le moyen de substituer la taille proportionnelle à la taille arbitraire. Ferme dans ses opinions jusqu'à l'opiniâtreté, il avait été l'ami et le défenseur zélé de Malebranche et de sa philosophie spiritualiste. Ce fut sans doute à son admiration pour les Méditations chrétiennes et métaphysiques de ce pieux philosophe, sublime dialogue entre le Verbe incarné et l'auteur lui-même, où règne un certain sombre auguste et mystérieux, a dit Fontenelle, que Petit-Renau dut cette mort semblable à celle d'un religieux de la Trappe, de laquelle parle encore Fontenelle, dans l'éloge qu'il fit de lui à l'Académie des sciences, dont l'illustre ingénieur était membre honoraire. Dès l'année 1710, le comte de Forbin, mécontent qu'on ne l'eût point encore élevé au grade de lieutenant général des armées navales, ne croyant rien avoir à espérer de Jérôme Pontchartrain avec qui il était au plus mal, avait allégué ses fatigues pour demander un congé qui s'était transformé, selon son désir, en retraite en 1715. Comme ses formes quelque peu rudes n'auraient pas convenu à Fleury et à Maurepas plus qu'à Pontchartrain, il n'avait point cherché depuis à reprendre du service, quoique sa renommée, ses talents et le nom de sa famille le désignassent au vice-amiralat. Retiré dans une maison de campagne près de Marseille, et rendu à lui-même, il avait dépouillé le vieil homme, donnant l'exemple de la conduite la plus religieuse, rigide pour lui-même, indulgent pour les autres, répandant ses richesses avec une munificence toute royale sur les pauvres du voisinage, se faisant bénir de tous, en un mot réparant par une vieillesse inspirée de la plus sincère piété, une existence longtemps aussi pleine de désordres que de gloire. Il

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