TRAITÉ THÉORIQUE & PRATIQUE

DE L'ÉMISSION

DE LA MONNAIE FIDUCIAIRE

(AVEC UNE GRAVURE DE L'ÉPOQUE DE LAW)

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PAR

ÉNOCH DÉSERT

Docteur en droit,

Membre de la Société de législation comparée.

PARIS

A. COTILLON & Cie, IMPRIMEURS-ÉDITEURS,

Libraires du Conseil d'Etat et de la Société de législation comparée,

24, RUE SOUFFLOT, 24.

1882

972

PRÉFACE.

L'ouvrage que je livre aujourd'hui au public & été commencé depuis bien longtemps. L'indifférence de certains esprits pour les études sur le crédit, les banques; la prétention de beaucoup d'autres qui croient posséder ces matières sans les avoir suffisamment apprises, ne m'ont jamais découragé, pendant les cinq années d'efforts, de peines, de soins que m'a coûté ce long travail entre ces deux catégories de personnes, il y a ceux qui veulent tout apprendre, tout savoir.

Mais quelle étude complexe que celle à laquelle je les convie aujourd'hui! L'Histoire, le Droit, l'Économie Politique peuvent être mises à contribution quand on veut parler de la science des banques.

L'Histoire! A quelle époque les premières banques ont-elles été créées? Comment étaient-elles organisées? Quelles modifications furent introduites dans leur mécanisme?

Le Droit! Comment les législateurs ont-ils toujours considéré les banques? Quels avantages ont-ils voulu accorder à ces établissements?

L'Économie Politique!!! Les banques ne sontelles pas les agents les plus actifs de la Circulation?

Je n'ai voulu dans cet ouvrage qu'examiner

l'opération des banques connue sous le nom de l'émission des billets.

Cette opération, la plus intéressante de toutes, n'a pas déjà une longue existence.

Les banques de Venise, de Gênes, de Barcelone, les banques hanséatiques ne l'avaient jamais pratiquée.

C'est la banque d'Angleterre qui la fit en premier d'une manière sérieuse.

Aujourd'hui, elle se fait chez beaucoup d'autres banques, et c'est à peine si le public appelle de ce nom les Institutions de crédit qui n'émettent pas de billets remboursables à vue et au porteur.

Plusieurs banques qui émettent ces billets ont reçu le privilége exclusif de faire cette opération,

Est-ce un bien? Est-ce un mal? Un grand nombre d'économistes attaquent ce privilége, disent qu'en empêchant la concurrence, il restreint la Circulation, la condamne à une vie anémique. Difficultés! Divergences d'opinion!

Nous avons feuilleté une à une les pages de l'histoire des banques, nous les avons consultées avec une attention scrupuleuse; nous avons cherché, dans la science juridique, dans la science économique, l'opinion la meilleure sur la question : l'Histoire, le Droit, l'Économie Politique, nous ont répondu que le privilége, le monopole d'émission n'était pas un mal, mais un bien.

Un savant d'un mérite incontestable, M. Wo

lowski, a défendu avec une force, un talent remarquable, le monopole d'émission cela ne nous a pourtant pas fait comprendre que notre livre passerait inaperçu. Il y a dans l'ouvrage de M. Wolowski un défaut de forme et une erreur de fond, qui n'ont pas dû échapper à beaucoup de

personnes.

Le défaut consiste en ce que l'ancien professeur du Consrvatoire n'a écrit la « Question des Banques » que pour ceux qui comprennent déjà le mécanisme des Institutions de crédit, qui possèdent les éléments de la science des banques. L'auteur n'a rien dit du crédit, n'a même pas expliqué l'Escompte des effets de commerce, qui est la pierre angulaire de l'émission des billets. Le livre de M. Wolowski ne peut être goûté que par un nombre très restreint de personnes, ce n'est pas un livre de vulgarisation.

L'erreur de M. Wolowski vient de ce que, pour défendre le monopole, il s'est appuyé sur ce syllogisme :

Il faut l'unité de la monnaie fiduciaire, car cette monnaie ayant pour but de remplacer dans les transactions la monnaie métallique, doit être autant que possible comme cette dernière.

Or l'unité de la monnaie fiduciaire ne peut avoir lieu qu'avec une seule banque d'émission. Donc le monopole d'émission est indispensable à la circulation de la monnaie fiduciaire.