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REVUE CRITIQUE D'HISTORIOGRAPHIE NATIONALE

PARAISSANT LE 25 DE CHAQUE MOIS

Sous la direction de Godefroid KURTH

Pour tout ce qui concerne la rédaction et les abonnements, s'adresser au secrétaire de la Revue,
A. DELESCLUSE, chargé de cours à l'Université, 15, rue Charles Morren, à Liège.
Le prix de l'abonnement est fixé à 6 frs. par an pour toute la Belgique (7 frs. pour l'étranger).

25 Novembre 1899.

237.

1re année. N° 9.

I. COMPTES-RENDUS.

Le chanoine J. Daris. Notices historiques sur les Églises du diocèse de Liège. t. XVII. Liège, Demarteau, 1899. in-8° de 430 pp.

Sous ce titre, qui a depuis longtemps cessé de répondre à ce riche recueil de documents et d'études sur les points les plus variés de l'histoire liégeoise, le savant chanoine Daris nous offre aujour d'hui un nouveau volume dont nous ferons rapidement connaître les subdivisions.

1. Notes historiques. Ce sont 39 notes ou faits divers servant à compléter ou à

rectifier des études antérieures de l'auteur; il y en a qui ont de l'importance, comme celles qui portent les nos 5 (les reliques de saint Lambert et d'autres saints) et 18 (capitulation d'Erard de La Mark). 2. Documents. Ce sont quelques actes des XVe, XVIe et XVIIe siècles que nous ne pouvons qu'indiquer d'une manière géné

rale.

3. Réduction de la monnaie sous Erard de La Mark. Publie les documents relatifs à cette réduction.

4. Faits économiques de la principauté de Liège. C'est un certain nombre de notes, qu'il eût été facile d'augmenter

sur la valeur de la monnaie et les prix des denrées aux diverses époques.

5. Les filles de la Providence à Charle ville. Histoire sommaire de la fondation de cette congrégation par Jeanne Morel, en 1679.

6. Les nonciatures en Allemagne. Quelques documents d'intérêt secondaire.

7. Le comte de Hoensbroech et les comtes de Méan. Menus renseignements sur ces derniers.

8. La révolution liégeoise de 1789. Cet

article, le plus important du volume par

ses proportions comme par l'intérêt du la correspondance entretenue pendant la sujet, se compose surtout d'extraits de exilé à Trèves et son chapitre, réfugié à période révolutionnaire entre l'évêque Aix-la-Chapelle. Ce dernier était renseigné par plusieurs agents restés à Liège et dont le principal était le chanoine Buckwald. La plus grande partie de cette correspondance se trouve aux archives de Liège, fonds Ghisels; une autre est restée dans les familles des comtes de Hoensbroech et des comtes de Méan. « On y voit succéder les sentiments de découragement aux sentiments d'espérance, et surtout des plaintes sur l'inactivité des cours

chargées de l'exécution des sentences de Wetzlar» (p. 194).

9. L'invasion des Français en 1792. Cet article peut être considéré comme la suite du précédent; c'est encore la correspondance du chanoine de Ghisels qui en fournit les données; l'auteur en communique d'importants extraits pour les années 1792-1793.

10. État des établissements religieux en 1803. C'est le tableau dressé par le préfet du département de l'Ourthe, contenant l'énumération des communautés religieuses de femines existant dans le pays de Liège en 1803, avec l'indication de leur genre de vie et quelques autres détails.

11. Notice sur Glain. Cet article contient l'histoire de la paroisse de Glain, détachée de celle d'Ans en 1624, et celle de la maison des dominicaines établies dans cette paroisse en 1636, avec la curieuse biographie de la sœur Thérèse de la Croix, écrite par un contemporain, que l'auteur publie d'après un manuscrit des archives de Maestricht. Cet article, avec les nos 8 et 9 mentionnés ci-dessus, constitue la partie substantielle du volume.

Nos lecteurs connaissent depuis longtemps les publications du savant chanoine Daris, avec les réserves dont nous avons l'habitude d'accompagner le juste éloge mérité par son infatigable activité et par sa vaste érudition. Ces réserves portent surtout sur l'insuffisante indication des sources employées et sur la négligence dans la reproduction des documents, qu'on nous donne tels quels, sans identification et parfois avec de regrettables fautes typographiques. Il est des cas où cette espèce d'indifférence à l'endroit de la méthode rend le texte presque inintelligible. Par exemple: p. 303, il n'y a pas moyen de savoir d'où émane la pièce guillemettée qui y figure sous le titre : Hougaerde pendant la Révolution française. Qu'est-ce que les Annales de la

Société d'archéologie auxquelles on nous renvoie p. 309? L'auteur augmenterait, sans contredit, la valeur considérable de son recueil de notices s'il se laissait décider à faire la toilette de ses textes.

GODEFROID KURTH.

238. A. Jeanroy et H. Guy. Chansons et dits artésiens du XIIIe siècle, publiés avec une introduction, un index des noms propres et un glossaire. (Fasc. II de la bibliothèque des Universités du Midi.) Bordeaux, Féret, 1898.

Les vingt-quatre pièces artésiennes que publient sous ce titre MM. Alfred Jeanroy et Henri Guy d'après un manuscrit de la Bibliothèque Nationale (12615, fd. Noailles) n'étaient point toutes inédites. Jubinal, Dinaux, Scheler, P. Meyer et d'autres en avaient déjà inséré plusieurs dans leurs recueils. La chanson bien connue : Arras est escole de tous biens entendre se rencontre ici pour la sixième fois.

Mais quinze pièces n'avaient point encore vu le jour et il était d'ailleurs désirable de voir publier dans son ensemble la série de ces poésies morales, satiriques et « potinières ». Le petit recueil, dû sans doute, ainsi que le conjecture M. Guy, « à quelque collectionneur d'Arras, curieux de tout ce qui concernait sa ville, jaloux de conserver les productions de la muse locale », n'est pas seulement intéressant au point de vue littéraire et philologique (spécialement lexicographique); les nos V et VIII, en particulier, contiennent des tableaux de mœurs assez pittoresques. Il l'est davantage par ses pièces satiriques qui nous donnent d'utiles indications sur l'histoire intérieure de la capitale artésienne au XIIIe siècle. Ces dernières sont remplies de noms propres. Les principales familles bourgeoises d'Arras : les Crespin, les Doucet, les Esturion, les Loucard, les Nazart, les Poncin y sont fréquemment citées et on

y retrouve maint personnage qui a joué un rôle dans les affaires de la cité. L'iden tification de ces personnages était naturellement le travail le plus important au point de vue historique. Pour dresser le glossaire des noms propres, de 50 pages compactes, qui accompagne les textes, M. Guy s'est livré à des recherches laborieuses et délicates dans la bibliothèque et les archives municipales d'Arras et dans les archives départementales du Pas-de-Calais, ainsi qu'à la Bibliothèque Nationale et aux archives départementales du Nord (pour ne rappeler que les sources manuscrites), Et il s'empresse de nous dire que des recherches plus longues dans les riches archives du Pas-de-Calais amèneraient des résultats beaucoup plus complets et précis.

Grâce à cette identification, on peut situer les pièces du recueil, au moins celles qui contiennent des indications biographiques, entre 1248 et 1280. Quelques-unes, faisant allusion à des évènements contemporains, peuvent être datées de façon plus rigoureuse. Quatre d'entre elles, les plus intéressantes, se rapportent à une scandaleuse affaire de taille communale qui dut causer quelque tapage à Arras, en 1269, et se termina par le procès et la condamnation des coupables. Un grand nombre de riches bourgeois y sont attaqués, avec une mordante ironie, et accusés d'avoir fait de fausses déclarations de fortune, avec la complicité des magistrats.

Une remarque le nom de Saint-Rou macle, dont on vante les miracles merveilleux (V, 7; XIII, 12) a d'abord paru à M. Guy une invention plaisante. Il a cependant trouvé, nous dit-il (p. 144), un Saint-Remaclus dans la Gallia christiana (III, 823) et nous donne sa trouvaille pour ce qu'elle vaut. L'auteur ignore donc que le culte de Saint-Remacle, évêque de Maestricht et abbé de Stavelot, est très

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239.-Comte Thierry de LimburgStirum. Cartulaire de Louis de Male. 1848 à 1358. Tome I. Bruges, De Blancke, 1898. in-4o de XIX-663 pp. Publication de la Société d'Emulation.

Le cartulaire de Louis de Male fait partie des archives du Conseil de Flandre. Il en est même le registre le plus ancien et renferme des actes qui vont de 1348 à 1358 et se rapportent presqu'exclusivement aux possessions du comte en Belgique.

L'éditeur estime que ce recueil a été rédigé pour le chancelier de Flandre. Il a jugé utile de nous le présenter dans le désordre de sa rédaction les actes y sont consignés, en effet, sans aucun ordre, ni ordre chronologique, ni ordre au point de vue de l'objet auquel se rapportent les textes. Il a même cru nécessaire de reproduire les pièces déjà publiées ailleurs, afin de rendre aussi fidèlement que possible la physionomie du cartulaire.

Dans l'introduction, M. de L. appelle l'attention du lecteur sur certains évènements politiques qui se sont présentés à l'époque de la rédaction du registre, tels les démêlés du comte avec le duc de Brabant. Il nous parle du conseil qui assistait le comte et que Wielant appelle conseil privé. Il est d'avis que le conseil se rattache à l'ancienne curia comitum Flandriæ, dont nous trouvons des mentions certaines au XIe siècle, et qui était investie d'attributions judiciaires, administratives et politiques. Cette manière de voir nous semble très juste.

Cependant, nous nous permettons d'exprimer le regret que l'auteur se soit rapporté, pour nous décrire ce conseil, à des renseignements puisés à d'autres sources

qu'au cartulaire même. Il aurait pu, peutêtre, à l'aide des pièces qu'il a étudiées en vue de la publication, nous faire connaître l'importance respective des différentes attributions de ce conseil. Dépourvu de toute idée exacte sur la teneur du recueil, le lecteur entre de plein pied❘ dans l'examen de ce registre, et comme tout y a été consigné par le scribe du XIVe siècle dans un désordre parfait, on se sent dès le début pris de décourage

ment.

L'auteur a désiré conserver, disionsnous, la physionomie du cartulaire. L'idée est heureuse, à condition cependant qu'on ne l'exagère pas. L'historien souhaite avant tout de pouvoir manier avec aisance tel ou tel document publié. Ici il se sent tout à fait désorienté, tant par le désordre chronologique des textes que par les courtes analyses, faites par le scribe de l'époque et généralement mal rédigées, qui figurent en tête de chaque acte, tantôt en flamand, tantôt en français, tantôt en latin. Il aurait fallu ajouter, nous semble

chaque pièce en langue moderne. Cela seul eût déjà rendu le recueil plus maniable.

Nous voudrions présenter encore une autre observation. S'il convient de ne pas encombrer inutilement les pages d'une grande superfluité de notes afin d'éviter le reproche de vouloir faire un faux étalage. d'érudition, d'un autre côté il ne convient pas davantage de tomber dans l'excès contraire. M. de L. a vraiment été un peu trop avare de commentaires et l'historien, qui voudra se servir de la source si hautement intéressante qu'il publie, devra se résoudre à faire un travail qui lui incombait en grande partie.

Trois excellentes tables pourront remé. dier à cette situation et rendre le manie-t-il, une analyse complète et précise de ment de ce gros volume possible: l'une nous indiquera, avec le plus grand soin, les noms des personnes; une seconde les noms de lieux; une troisième, enfin, classera tous les actes par ordre de matière. Cette dernière table surtout, de la plus haute importance, sera, nous l'avouons d'une exécution très difficile, puisqu'une foule de considérations tant juridiques qu'économiques doivent présider à son élaboration. Ainsi, nous voudrions voir le mot cens renseigné non pas d'une façon générale, mais avec des distinctions se rapportant à la nature juridique des dif férentes prestations foncières. De même le mot fief, par exemple, ne sera pas seulement suivi de la longue énumération de tous les numéros qui traitent du fief mais il devra comprendre des subdivisions, renseignant les différentes opérations dont le fief est l'objet. C'est dans ce sens que la table des matières devra, à notre avis, être conçue et elle ne pourra rendre de réels services que si elle est projetée dans ce sens. En émettant ces considérations, loin de nous l'idée de vouloir donner des conseils à l'auteur. Celui-ci est suffisamment connu de nous tous par ses excellents travaux historiques pour que nous puissions avoir pleine confiance dans la valeur de la table, dont il nous annonce d'ailleurs la confection.

Il serait téméraire d'émettre dès à présent une opinion définitive sur le cartulaire publié par M. de Limbourg-Stirum. Nous devons attendre la suite de ce travail, surtout les tables qui nous donneront le fil conducteur à travers ce labyrinthe de pièces jetées pêle mêle par le rédacteur du XIVe siècle.

G. DES MAREZ.

240. E. Prarond. Abbeville aux temps de Charles VII, des dues de Bourgogne maîtres du Ponthieu, de Louis XI. Paris, Picard, 1899. in-80 de 418 pp.

L'histoire d'Abbeville au XVe siècle

touche de trop près à celle de nos provinces pour que nous ne soyons obligés de mentionner, au moins brièvement, ce livre. M. Prarond est un spécialiste de l'histoire du Ponthieu et d'Abbeville; il l'a connaît à fond et personne, pensonsnous, n'en a, plus que lui, fouillé les archives. Il a publié sur ce sujet un nombre considérable de volumes et de notices, notamment la biographie historique et archéologique d'Abbeville, Abbeville avant la guerre de cent ans, la Ligue à Abbeville, etc. On trouvera dans le présent volume de précieux renseignements sur la participation de la ville à la guerre de cent ans; on la verra balottée entre les Anglais et les Français, obligée de servir tantôt les uns tantôt les autres, se débattant contre les charges militaires et les difficultés financières. Occupée par Louis XI, elle fait bientôt retour aux ducs de Bourgogne et est finalement reprise par le roi de France. Obligée de prendre part à toutes les luttes de ses princes, elle voit en même temps ses privilèges violés. Ce volume foisonne en outre de renseignements économiques et de notes d'intérêt purement local. On pourrait, en les utilisant et en les complétant, car l'auteur n'a pas tout donné, écrire une histoire très vivante d'Abbeville. Nous regrettons que M. Prarond n'ait pas cru devoir le faire et se soit contenté de publier une sorte de répertoire confus où il donne, année par année, des extraits de comptes, de délibérations échevinales ou de chroniques relatant les affaires dont la commune eut à s'occuper et les principaux évènements auquels elle prit part; l'auteur énumère ensuite de la même façon, sous la rubrique faits divers, les faits qu'il juge de moindre importance. Il ne se formalisera pas de cette observation puisqu'il dit lui-même que son livre est touffu et prie « les courageux qui voudront bien l'ouvrir d'en parcourir d'abord la table. »

C'est en effet le seul moyen de lire le volume; encore cette table n'est-elle pas suffisante. A. DELESCLUSE.

241.-G.-B. Cavalcaselle et J.-A. Crowe. Storia dell' antica Pittura fiamminga. Edizione originale italiana con ritratto e biografia del Calvalcaselle. Firenze, Successori Le Monnier, 1899. in-8° de XLV-476 PP.

Deux hommes, Crowe un anglais et Cavalcasselle un italien, ont particulièrement bien mérité de l'histoire de l'art. Outre l'ouvrage dont nous venons de transcrire le titre, on leur doit également un ouvrage sur Raphaël, une histoire de la peinture en italie du IIe au XVIe siècle, et enfin une vie du Titien. Leurs recherches portèrent sur la peinture flamande et leur premier ouvrage, écrit en langue anglaise, parut à Londres en 1857. Il eut un grand retentissement grâce à la précision et la nouveauté des informations. Traduit en français par M. Delpierre, il fut enrichi de remarquables commentaires par feu MM. Alex. Pinchart et Ch. Ruelens. M. Springer en publia une traduction en allemand en 1875; le texte en avait été fixé d'accord avec Messieurs Crowe et Cavalcaselle. Mais, fait surprenant, il n'existait pas d'édition italienne. C'est à l'initiative du docteur Amerigo Tkalac que cette lacune a été comblée, et, à sa demande, M. Luigi Cinotti a traduit l'édition allemande en la confrontant avec le texte anglais. La tâche de M. Tkalac a consisté à revoir les épreuves. Ajoutons que l'ouvrage débute par une biographie de feu M. Cavalcaselle, due à la plume de M. A. Pognisi.

L'édition italienne n'apporte aucun élément nouveau; elle ne tient compte d'au. cune des découvertes faites depuis vingtcinq ans; elle ne signale ni les recherches de M. Henri Hymans, ni celles de M. A.-J. Wauters, ni celles de MM. Carl, Justi, Bode,

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