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des Epigrammes, et quelques autres pièces de poésies frangaises et latines, le Dialogue de la Poésie et de la Musique, le Dialogue sur les Héros de Romans, une Traduction du Traité du sublime de Longin, des Réflexions critiques sur cet auteur, et des Lettres.

:

Boileau a été l'un des collaborateurs du grand ouvrage qui a pour titre Médailles sur les principaux événements du Règne de Louis-le-Grand. On lui attribue, de moitié avec Racine, la Campagne de Louis XIV, ouvrage imprimé sous le nom de Pélisson et que Fréron fils a reproduit sous ce titre : Eloge historique de Louis XIV sur ses conquêtes depuis 1672 jusqu'en 1678. Enfin il fut chargé, avec Racine, de corriger le style des Constitutions de la maison de Saint-Cyr, rédigées par Madame de Brinon. (M. Amar, Répertoire de littérature.)

SATIRES.

Boileau, dans la satire, n'a pas la véhémente indignation de Juvénal; il n'a ni tout le sel ni toute la grâce d'Horace; il n'a pas la vigueur ni l'aimable nonchalance de Régnier; mais en retour il ne pousse pas l'hyperbole aussi loin que Juvénal, et, en peignant le vice, il ne laisse pas soupçonner qu'il soit atteint lui-même et gangréné par la corruption contre laquelle il s'indigne; il ne tend pas comme Horace à faire prévaloir les doctrines d'un épicurisme commode, plus dangereux encore par l'élégance qui le décore; il n'a pas comme Régnier cette sorte de cynisme candide qui, à la vérité, ne démoralise pas, mais qui effarouche la délicatesse de l'âme. En un mot, pour la pureté morale, il est supérieur à ses devanciers; comme poète, il doit peut-être leur céder le pas. (M. Géruzes).

Quoi qu'il en soit, lorsque les sept premières satires parurent, en 1666, avec le discours au roi, elles eurent un succès prodigieux : « Non pas, dit La Harpe, parce que c'étaient des satires, mais parce que personne n'avait encore si bien écrit en vers. » Boileau était, en effet, le premier qui apprit aux Français à toujours chercher le mot propre, à lui donner sa place, à faire valoir les expressions par leur arrangement, à

relever les petits détails, à cadencer la période, enfin à connaltre toutes les ressources de la langue poétique. Voilà ce qu'on dut admirer en lui dès le début de sa carrière, voilà ce qui lui mérita les plus honorables suffrages, et d'abord celui de Molière. Celui-ci devait lire quelques chants de sa Traduction de Lucrèce dans une société où se trouvait le satirique: Boileau lut d'abord sa satire adressée à Molière, sur la difficulté de trouver la rime. Quand Molière l'eut entendue, il ne voulut plus lire sa traduction, disant qu'on ne devait pas s'attendre à des vers aussi parfaits que ceux de Despréaux, et qu'il lui faudrait un temps infini, s'il voulait travailler comme lui ses ouvrages. On a reproché à Boileau d'avoir souvent dit en beaux vers des choses futiles, et Voltaire disait en comparant les sujets du satirique français avec ceux que Pope a traités :

Qu'il peigne de Paris les tristes embarras,

Ou décrive en beaux vers un fort mauvais repas,

Il faut d'autres objets à notre intelligence.

Mais il faut faire observer ici que, dans la satire du mauvais repas, remplie de vers que tout le monde a retenus, le poète jette adroitement plusieurs détails accessoires, qui ne sont point sans intérêt pour le fond. Il ne faut pas oublier d'ailleurs que Despréaux a fait les satires sur les folies humaines, sur la noblesse, où le sujet est peut-être moins approfondi que dans Pope, mais où respire une morale saine, pure, élevée : les idées peuvent en paraître dépourvues d'originalité, et c'est là le caractère du vrai, qui finit toujours par prendre une physionomie commune. Au reste, ce n'est pas la profondeur des pensées, c'est le mérite si rare de faire de beaux vers, c'est le style qui fait vivre, sentir, admirer les ouvrages des poètes. Ce mérite, ce style se trouve dans toutes les satires de Boileau; il est toujours vrai dans ses tableaux comme dans ses jugements. Nous ne dirons rien des Satires sur l'équivoque et sur l'homme, les plus faibles de toutes. Dans la Satire sur les femmes, Boileau revient trop souvent sur la même idée : son plus grand défaut est d'être monotone et de manquer de gaieté dans un sujet où la gaieté n'était pas moins nécessaire que la

variété.

Boileau, dans la satire morale, évita de nommer les personnes; pour les travers du caractère, il laisse le champ libre à l'allusion, et c'est affaire aux commentateurs de chercher alors contre qui le trait porte; quant aux vices qui déshonorent, il prit le louable parti de les stigmatiser par des peintures générales, abandonnant à l'opinion et aux tribunaux le châtiment des coupables. Il est plus sévère, il est impitoyable pour les délinquants littéraires : il ne veut pas qu'ils jouissent impunément d'une faussé célébrité; il prétend que les sifflets viennent au moins contrarier ou même couvrir le bruit de la louange imméritée. Il sera vraiment heureux s'il parvient à ·

Faire siffler Cotin chez nos derniers neveux.

་་

A ce propos, on l'accuse de cruauté, et il se défend au nom du goût qu'on outrage et qui crie vengeance. Au même titre, la satire morale est légitime. Les sots et les pervers ont trop beau jeu quand il ne s'élève pas, au nom du goût et de la conscience, quelque homme de talent qui les inquiète. Il est vrai que la satire ne corrige guère ceux qu'elle poursuit, mais elle les châtie et peut les intimider: c'est là son rôle et son utilité. Mais, il faut le dire hautement, le satirique qui tirerait sa vocation du seul besoin de médire, qui n'aurait d'autre intention que l'insulte, serait au-dessous même de ses victimes. Il faut que l'intention soit droite, le cœur pur, l'esprit éclairé, dans une semblable entreprise; c'est la conscience du bien qui doit flétrir le vice, c'est le sentiment du beau et du vrai qui doit ridiculiser l'erreur et la sottise. A ce double titre, Boileau, homme de bien et de goût, était légitimement investi de la magistrature satirique qu'il exerçait. La satire neuvième, exclusivement littéraire est le meilleur modèle et la meilleure apologie du genre. Jamais Boileau n'a été mieux inspiré; il se justifie admirablement et il attache au front de ses ennemis un ridicule ineffaçable. Dans cette pièce, qui passe à bon droit pour un des chefs-d'œuvre de notre langue, le cadre, ingé nieusement tracé, se remplit naturellement de traits vifs, d'idées piquantes, de sentiments vrais, qui forment un ensemble achevé contre lequel la critique n'a point de prise. Ses

ennemis ne s'en relevèrent pas ce fut un coup de maître et un

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Quel sujet inconnu vous trouble et vous altère?
D'où vous vient aujourd'hui cet air sombre et sévère,
Et ce visage enfin plus pâle qu'un rentier

A l'aspect d'un arrêt qui retranche un quartier?
Qu'est devenu ce teint dont la couleur fleurie
Semblait d'ortolans seuls et de bisques nourrie,
Où la joie en son lustre attirait les regards,
Et le vin en rubis brillait de toutes parts?
Qui vous a pu plonger dans cette humeur chagrine?
A-t-on par quelque édit réformé la cuisine?
Ou quelque longue pluie inondant vos vallons,
A-t-elle fait couler vos vins et vos melons?

Répondez donc enfin, ou bien je me retire.

دار

Ah! de grâce, un moment, souffrez que je respire.
Je sors de chez un fat qui, pour m'empoisonner,
Je pense, exprès chez lui m'a forcé de diner.
Je l'avais bien prévu. Depuis près d'une année,
J'éludais tous les jours sa poursuite obstinée.
Mais hier il m'aborde, et, me serrant la main :

« Ah! monsieur, m'a-t-il dit, je vous attends demain.
N'y manquez pas au moins. J'ai quatorze bouteilles
D'un vin vieux.... Boucingo n'en a point de pareilles :
Et je gagerais bien que, chez le commandeur,
Villandri priserait sa sève et sa verdeur.
Molière avec Tartufe y doit jouer son rôle ;

Et Lambert, qui plus est, m'a donné sa parole.

C'est tout dire, en un mot, et vous le connaissez.

Quoi! Lambert?-Oui, Lambert: à demain.-C'est assez.

Ce matin donc, séduit par sa vaine promesse,
J'y cours, midi sonnant, au sortir de la messe.
A peine étais-je entré, que, ravi de me voir,
Mon homme en m'embrassant m'est venu recevoir :
Et, montrant à mes yeux une allégresse entière:
« Nous n'avons, m'a-t-il dit, ni Lambert ni Molière ;
Mais puisque je vous vois, je me tiens trop content.
Vous êtes un brave homme : entrez, on vous attend. »>

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A ces mots, mais trop tard, reconnaissant ma faute,
Je le suis en tremblant dans une chambre haute
Où, malgré les volets, le soleil irrité

Formait un poêle ardent au milieu de l'été.

Le couvert était mis dans ce lieu de plaisance,
Où j'ai trouvé d'abord, pour toute connaissance,
Deux nobles campagnards, grands lecteurs de romans,
Qui m'ont dit tout Cyrus dans leurs longs compliments.
J'enrageais. Cependant on apporte un potage.
Un coq y paraissait en pompeux équipage,
Qui, changeant sur ce plat et d'état et de nom,
Par tous les conviés s'est appelé chapon.
Deux assiettes suivaient, dont l'une était ornée
D'une langue en ragoût, de persil couronnée;
L'autre, d'un godiveau tout brûlé par dehors,
Dont un beurre gluant inondait tous les bords.
On s'assied mais d'abord notre troupe serrée
Tenait à peine autour d'une table carrée
Où chacun, malgré soi l'un sur l'autre porté,
Faisait un tour à gauche et mangeait de côté.
Jugez en cet état si je pouvais me plaire,
Moi qui ne compte rien ni le vin ni la chère,
Si l'on n'est plus au large assis en un festin,
Qu'aux sermons de Cassagne ou de l'abbé Cotin!

Notre hôte cependant, s'adressant à la troupe,

« Que vous semble, a-t-il dit, du goût de cette soupe? Sentez-vous le citron dont on a mis le jus

Avec des jaunes d'œufs mêlés dans du verjus?
Ma foi, vive Mignot et tout ce qu'il apprête! »>
Les cheveux cependant me dressaient à la tête :
Car Mignot, c'est tout dire, et dans le monde entier
Jamais empoisonneur ne sut mieux son métier.
J'approuvais tout pourtant de la mine et du geste,
Pensant qu'au moins le vin dût réparer le reste.
Pour m'en éclaircir donc, j'en demande ; et d'abord
Un laquais effronté m'apporte un rouge-bord
D'un Auvernat fumeux, qui, mêlé de Lignage,
Se vendait chez Crenet pour vin de l'Hermitage,
Et qui, rouge et vermeil, mais fade et doucereux,
N'avait rien qu'un goût plat et qu'un déboire affreux.
A peine ai-je senti cette liqueur traîtresse,

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