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soit regretté à Rome, parce que les grandes vertus, et les plus aimables, et qui trouvent par là le plus de traverses et d'agitations, trouvent enfin justice quand elles ont disparu de ce monde. Tout son diocèse est accablé de sa perte; j'en suis en mon particulier très touché, quoiqu'il y ait longtemps qu'il n'eût plus rien de vivant que le corps; mais il a fait un si grand et si saint usage de son âme et de son esprit, tant qu'il les a possédés, qu'on ne peut s'accoutumer à la privation de l'étui même qui les contenoit. Il a donné pendant sa vie trois millions aux pauvres, quoiqu'il n'eût que son archevêché, et qu'il vécût même magnifiquement aux occasions qui l'exigeoient; mais, hors de là, tout étoit fort épargné, et donné aussitôt. Ainsi, avec d'extrêmes regrets en ce monde, il s'est acquis en l'autre de grandes richesses, et qui seront éternelles. Il étoit grand-oncle de ma belle-fille, avoit fait son mariage, leur avoit donné la bénédiction nuptiale et le festin, et c'est la dernière cérémonie qu'il ait faite ; et il me faisoit l'honneur de m'aimer depuis bien des années.

Le retour du Pape n'animera guère la capitale du monde chrétien. Il ne fera que changer le théâtre des cérémonies ecclésiastiques, où il est infatigable, et où il va recommencer à vous fatiguer tous. Cependant les pauvres nonces se morfondent bien, et, avec eux, tout ce qui entrevoit, dans ce mouvement, des changements des nonciatures; et c'est ce qui m'en donne le plus d'impatience par mes desirs pour vous, Monsieur, et l'attachement avec lequel je vous honore.

Le duc DE SAINT-SIMON.

A M. L'ABBÉ GUALTERIO.

La Ferté, 1 août 1729.

Toujours ravi, Monsieur, de recevoir de vos nouvelles.

Quelque stériles que soient celles de votre cour, elle ne laisse pas de faire des canonisations et des leçons de bréviaire qui en pourront produire, et des refus de gratis, en même temps qu'elle capitule sur M. Bichi, qu'elle fera enfin cardinal, et qu'elle récompense magnifiquement le roi de Sardaigne de sa fermeté avec elle sur tous chapitres. Nous ne verrons pas, je pense, si tôt de pape religieux après celui-ci, et qui n'ait passé par aucun ministère. En attendant, les pauvres nonces se morfondent bien, et il ne se fait aucun mouvement que dans les premières charges du palais. Le Santa-Maria fait faire des fortunes pour parvenir à la sienne. Je voudrois bien voir quelque jointure qui vous avançât avant la fin d'un pontificat qui peut durer encore, et un conclave qui a la mine d'être difficile et long. Agréez, Monsieur, mes desirs sincères, ne pouvant ce que je voudrois pour vous témoigner tout mon sincère dévouement.

Le duc DE SAINT-SIMON.

A M. L'ABBÉ GUALTERIO.

La Ferté, 29 août 1729.

Toujours mille remerciements, Monsieur, de l'honneur de vos lettres et des nouvelles qui les accompagnent. S'il ne se faisoit à Rome que des cardinaux, et point de nouveaux saints, je pense que cela seroit beaucoup mieux, et même le Bichi, tout étrange qu'il sera après s'être chargé d'un nouveau tribut en ce genre pour le roi de Sardaigne. Le cardinal Borghèse et M. Acquaviva doivent beaucoup à M. Santa-Maria, qui les pousse à la pourpre pour s'y élever, et qui se moquera bien après des pasquinades. Les pauvres nonces pourront bien se morfondre assez pour mourir prélats, au peu de chapeaux qui

vaquent et aux sujets qui leur seront encore préférés. En attendant, ils voient conclure la paix et le passage de D. Carlos en Italie sans y avoir de part et sans s'en consoler, comme leur maître, par des fonctions ecclésiastiques, ni espérer de tirer beaucoup de l'épuisement de la Chambre apostolique. Il faut que les prières de ces Messieurs-là ne soient guère bonnes, puisque la volonté et la santé du Pape demeurent les mêmes. Il y a lieu de craindre que celles du grand-duc seront meilleures, et que son futur successeur n'essuie bien de la tribulation avant de l'être. Il faut jouir, en attendant, de la tranquillité que cela va procurer. Je voudrois bien que la vôtre fût troublée par des emplois dignes de vous, et que vous fussiez bien persuadé, Monsieur, de tout l'empressement des desirs avec lesquels je vous honore.

Le duc DE SAINT-SIMON.

A M. L'ABBÉ GUALTERIO.

La Ferté, 18 septembre 1729.

Toujours ravi, Monsieur, d'apprendre de vos nouvelles ; le monde en fournit peu, et, comme c'est signe de paix, je pense que c'est tant mieux. Pour votre tranquillité domestique, je pense que vous pouvez en être en repos. Les peuples ne savent que souffrir et crier, et c'est bien le moins que ceux qui les font crier le souffrent. Quand ce bon pape-ci mourra, ce sera un saint en paradis, plus certain que quelques-uns de ceux qu'il y croit mettre, et dont il laisse faire de si belles légendes; et les Romains prendront grand'part en son bonheur éternel. Je pense que son successeur sera choisi moins ecclésiastique et plus prince, moins moine et plus évêque, et que les fonctions et les cérémonies auront moins de cours. Ce sera

Quelque stériles que soient celles de votre cour, elle ne laisse pas de faire des canonisations et des leçons de bréviaire qui en pourront produire, et des refus de gratis, en même temps qu'elle capitule sur M. Bichi, qu'elle fera enfin cardinal, et qu'elle récompense magnifiquement le roi de Sardaigne de sa fermeté avec elle sur tous chapitres. Nous ne verrons pas, je pense, si tôt de pape religieux après celui-ci, et qui n'ait passé par aucun ministère. En attendant, les pauvres nonces se morfondent bien, et il ne se fait aucun mouvement que dans les premières charges du palais. Le Santa-Maria fait faire des fortunes pour parvenir à la sienne. Je voudrois bien voir quelque jointure qui vous avançât avant la fin d'un pontificat qui peut durer encore, et un conclave qui a la mine d'être difficile et long. Agréez, Monsieur, mes desirs sincères, ne pouvant ce que je voudrois pour vous témoigner tout mon sincère dévouement.

Le duc DE SAINT-SIMON.

A M. L'ABBÉ GUALTERIO.

La Ferté, 29 août 1729.

Toujours mille remerciements, Monsieur, de l'honneur de vos lettres et des nouvelles qui les accompagnent. S'il ne se faisoit à Rome que des cardinaux, et point de nouveaux saints, je pense que cela seroit beaucoup mieux, et même le Bichi, tout étrange qu'il sera après s'être chargé d'un nouveau tribut en ce genre pour le roi de Sardaigne. Le cardinal Borghèse et M. Acquaviva doivent beaucoup à M. Santa-Maria, qui les pousse à la pourpre pour s'y élever, et qui se moquera bien après des pasquinades. Les pauvres nonces pourront bien se morfondre assez pour mourir prélats, au peu de chapeaux qui

vaquent et aux sujets qui leur seront encore préférés. En attendant, ils voient conclure la paix et le passage de D. Carlos en Italie sans y avoir de part et sans s'en consoler, comme leur maître, par des fonctions ecclésiastiques, ni espérer de tirer beaucoup de l'épuisement de la Chambre apostolique. Il faut que les prières de ces Messieurs-là ne soient guère bonnes, puisque la volonté et la santé du Pape demeurent les mêmes. Il y a lieu de craindre que celles du grand-duc seront meilleures, et que son futur successeur n'essuie bien de la tribulation avant de l'être. Il faut jouir, en attendant, de la tranquillité que cela va procurer. Je voudrois bien que la vôtre fût troublée par des emplois dignes de vous, et que vous fussiez bien persuadé, Monsieur, de tout l'empressement des desirs avec lesquels je vous honore.

Le duc DE SAINT-SIMON.

A M. L'ABBÉ GUALTERIO.

La Ferté, 18 septembre 1729.

Toujours ravi, Monsieur, d'apprendre de vos nouvelles ; le monde en fournit peu, et, comme c'est signe de paix, je pense que c'est tant mieux. Pour votre tranquillité domestique, je pense que vous pouvez en être en repos. Les peuples ne savent que souffrir et crier, et c'est bien le moins que ceux qui les font crier le souffrent. Quand ce bon pape-ci mourra, ce sera un saint en paradis, plus certain que quelques-uns de ceux qu'il y croit mettre, et dont il laisse faire de si belles légendes; et les Romains prendront grand'part en son bonheur éternel. Je pense que son successeur sera choisi moins ecclésiastique et plus prince, moins moine et plus évêque, et que les fonctions et les cérémonies auront moins de cours. Ce sera

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