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statistiques publiées dans l'Exposé de la situation administrative en font foi, des centaines de kilomètres de chemins vicinaux furent améliorés dans la province de Liége.

La Hesbaye fut surtout privilégiée sous ce rapport. Sur la rive droite du Geer, on trouvait le silex sur place et la configuration du terrain ne nécessitait presque aucun travail d'art. Très tôt encore, vers 1850, la province de Liége adopta une combinaison fort ingénieuse, celle de l'association des communes pour l'entretien des chemins vicinaux de grande communication, sous la surveillance et avec l'intervention de la province. Ce système, qui a donné d'excellents résultats, est près d'être étendu à tout le pays; la province de Limbourg est en train de l'organiser et sa partie hesbignonne jouira aussi du bienfait de l'entretien uniforme de la voirie de grande communication, lequel dépendait jadis du caprice et des ressources des communes intéressées. Si sur le haut plateau au sous-sol de silex les villages sont reliés entre eux par d'excellentes routes macadamisées, il n'en est pas de même pour la région de l'ouest du Geer, où la pierre manque. Il s'ensuit que pour se rendre en hiver d'une commune à l'autre, on est parfois obligé de faire des détours énormes. L'humidité plus grande y fait préférer le pavé au macadam qui ne résiste plus aux lourds charriages, et l'on conçoit que dans ces conditions, la construction de routes devenant beaucoup plus frayeuse, la voirie n'ait pas atteint le développement qu'elle a dans la région centrale.

Un grand nombre de chemins de terre qui traversent nos campagnes ondulées sont creux; servant à la fois au passage et à l'écoulement des eaux, ils s'encaissent de plus en plus.

M. Tihon a consacré dans le Bulletin de l'Institut archéologique liégeois (1) une étude intéressante aux chemins creux de la Hesbaye. Nous en citons ici un passage: « Les voies de communication, dit l'auteur, sont extrêmement nombreuses

(1) Tome XXV, 1896, pp. 1 à 132.

dans nos campagnes et beaucoup d'entre elles présentent cette particularité, d'être sur des portions parfois très longues de leur trajet en contre-bas du sol environnant. Ces chemins creux ou encaissés sont appelés en wallon liégeois haveie; ces mots, d'après Grandgagnage, dérivent du latin excavare, creuser ».

« A remarquer que hauen en allemand signifie tailler, hacher, et pourrait être le primitif de notre mot wallon. Une même racine a fourni probablement tous ces mots; Jean d'Outremeuse l'emploie dans le sens de fossé. Les parois ou berges des chemins creux portent en wallon le nom de tiges. Scheler dérive ce mot de theodic, goth thiudisk, popularis, commun à tous. Primitivement, ces chemins étaient gazonnés, on y faisait paître le bétail en commun, de là le nom de tiges qui leur fut donné et l'est parfois encore. Aujourd'hui le gazon y devient rare, on le rencontre en dehors de la voie charretière et sur les berges des chemins creux auxquelles le nom de tiges a été étendu. Les renflements du sol portent le nom de tiers, tiennes, les dépressions s'appellent fonds ou vaux. Vallons et collines portent souvent des noms spéciaux et dont la plupart remontent à une haute antiquité. L'étude de ces applications a une grande importance pour l'archéologue.

» M. Golesloot avait d'abord attribué le creusement des chemins à l'action des eaux. Dans le travail que nous venons de citer (1), il abandonne cette idée, la trouve aussi puérile qu'insensée et après avoir plaisanté les eaux intelligentes, reconnaît exclusivement dans les voies profondes un plan préconçu et la main de l'homme.

>> Pour nous, le plan préconçu n'existe pas et nous admettons que l'eau a joué un rôle important dans la formation de ces tranchées.

>> Notre proposition sera donc celle-ci : « Le creusement de nos chemins est dû au travail de l'homme et à l'énergie des

(1) Bulletin des commissions royales d'art et d'archéologie de Belgique, t. XIX, pp. 258-385.

forces naturelles » (pp. 2 et 4', et puis l'auteur explique (p. 25) comment sous l'action du charroi, des eaux qui découlent et de l'enlèvement de la terre des côtes pour la réparation des ornières, les chemins se sont sensiblement creusés, et il ajoute (p. 28): « Le seul souci du campagnard est d'assurer son passage. Les pentes l'effraient peu, puisqu'on rencontre un grand nombre de villages construits dans des vallées profondes. Ce qui lui importe davantage, c'est que son bétail puisse circuler sans danger, que ses chariots puissent rouler sans grands heurts ni cahots, c'est pour cela qu'il comble les trous et les ornières de ses chemins. Cela fait, il ne s'en préoccupe pas davantage. Encore aujourd'hui, nous le voyons attendre qu'un plus pressé les ait réparés ou se dépêcher de s'en servir aussi longtemps qu'ils sont en bon état.

>> Cette insouciance, cet égoïsme, cette répugnance du paysan à effectuer des travaux qui ne lui sont pas uniquement utiles expliquent parfaitement l'étroitesse des chemins creux.

» A ce motif, on peut en ajouter un autre. Il est très probable, pour ne pas dire certain, que les terrains voisins des habitations ont été cultivés les premiers et que l'exploitation du sol s'est étendue au fur et à mesure des besoins de la population. Par conséquent, les exploitants des terres plus éloignées ont dû se frayer une route à travers les propriétés des fermiers, premiers occupants, et en suivre autant que possible les limites. On comprend qu'ils n'aient pris que la largeur suffisante au passage d'un chariot ou d'une charrette. >>

Ajoutons qu'assez souvent de hautes haies bordent ces chemins ravinés qui ne peuvent donc que bien difficilement être séchés par le soleil. A certaines saisons de l'année et après de fortes pluies, les chemins de terre sont dans un état tel qu'un fermier de Bouckhout (sud du canton de Saint-Trond) nous dit que parfois pour arriver à la grand'route, il attelle avec une longue chaîne jusque onze chevaux à un chariot de 3,000 à 3,500 kilogrammes de betteraves avec 30% de tare et que, ordinairement, il lui faut pour ce charriage huit chevaux. Les cultivateurs qui ne disposent pas de tant de force motrice ne chargent leur chariot que sur la grand'route.

Depuis que le Gouvernement accorde le transport gratuit pour l'empierrement de chemins ruraux, bien des chemins ont été améliorés, mais il reste beaucoup à faire à cet égard; il est des communes qui voudraient empierrer, mais l'autorité supérieure exige une largeur de 436 qui n'y est souvent pas et qui est inutile pour des chemins servant simplement à l'exploitation des terres.

Si les mailles du réseau voyer hesbignon sont très serrées, celles du réseau ferré le sont beaucoup moins. Pendant très longtemps, la Hesbaye ne fut traversée au centre que par une ligne de chemin de fer, celle de Tirlemont à Liége par Waremme, un service de bateaux à vapeur reliait Namur à Liége. Entre 1860 et 1875, quelques lignes furent construites aux extrémités : Namur à Liége, Liége à Hasselt, Landen à Statte, Landen à Ramillies, mais bien des communes du plateau central se trouvaient encore à 2 et 3 lieues de la voie ferrée. Enfin, depuis 1885, la construction de quelques chemins de fer vicinaux est venue satisfaire en partie les besoins de la culture qui, en s'industrialisant de plus en plus, demande des moyens de transport à bon marché et surtout à proximité des terrains producteurs. Ce fut d'abord la ligne de Waremme à Huy (Statte) qui coupa dans le sens vertical toute la région comprise entre les lignes à grande section de LandenHuy, Huy-Liége et Liége-Landen. Ce fut ensuite celle d'Ans à Oreye puis à Saint-Trond, pour ainsi dire parallèle à la ligne de Liége-Landen, puis les lignes d'un intérêt plus secondaire, telles qu'Oreye- Waremme, Oreye-Looz-Hasselt, TongresFexhe et, enfin, l'an dernier, la ligne que nous pourrions appeler le Grand-Central hesbignon, de Hannut à Jemeppe et Fexhe, qui traverse, en faisant de nombreux détours, une région jusqu'ici très dépourvue de moyens de communication.

Mais ce n'est pas assez, de nombreuses communes ne touchent pas encore au réseau ferré même secondaire et les cultivateurs qui les habitent ont leurs frais généraux sérieusement augmentés par suite de la difficulté des transports. Pour répondre à leurs desiderata, on projette de nouvelles lignes,

mais il est regrettable de constater que l'administration des vicinaux n'avance dans l'étude de ces projets qu'avec une excessive lenteur.

Nous serions injustes à son égard si nous ne disions que parfois la responsabilité de ces retards incombe aux communes intéressées elles-mêmes, qui ne parviennent pas à s'entendre quant au tracé des lignes projetées.

CHAPITRE II.

La propriété en Hesbaye.

Comme dans tous les pays riches, la propriété communale n'existe guère en Hesbaye, sauf peut-être dans quelques villages de l'extrémité ouest de la région (1). Tous les biens ont été l'objet d'une appropriation individuelle, les communes hesbignonnes ne possèdent plus que par-ci par-là quelques prés humides plantés de peupliers du Canada, arbres dont la vente constitue une ressource précieuse en cas de travaux extraordinaires. Cependant, nous devons le reconnaître, les bureaux de bienfaisance locaux et surtout les bureaux de bienfaisance, hospices et autres établissements publics des villes de Tongres, Tirlemont, Saint-Trond et Liége ont des biens disséminés dans toutes les communes de la Hesbaye flamande et wallonne. Ces propriétés, d'origines diverses, sont, en général, très morcelées; aussi sont-elles d'habitude louées en détail.

Il est bien difficile en Belgique, disons quasi impossible, d'étudier la propriété foncière; il n'y a pas suffisamment d'éléments pour cette étude.

(1) Grand-Leez (Gembloux) possède un bois communal de 105 hectares et environ 80 hectares de prairies et de terres arables. La superficie totale de la commune est de 1,200 hectares.

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