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Parfois, le fermier doit fournir caution pour le paiement du fermage. Il arrive que celui-ci est stipulé payable en deux fois. Le bail, quand il s'agit de fermes, commence généralement à la mi-mars (1). Le contrat stipule assez longuement quels sont les rapports entre fermier entrant et sortant. Le sortant quitte, par exemple, la ferme le 16 mars à midi; en automne il sème en grain dur (céréales d'hiver) le tiers des terres labourables. Il doit semer aussi, la dernière année, une certaine étendue en trèfles. Le prix de la graine employée pour ce semis lui est remboursé par l'entrant. A la récolte, le sortant coupe les blés, les lie et les met en dizeaux. Le fermier entrant met à sa disposition les chariots attelés et les conducteurs, mais le reste du personnel est fourni par le sortant. Celui-ci fait également le battage: il jouit du grain; les pailles et les balles restent pour l'entrant. Assez souvent, la récolte est vendue à celui-ci. Après le premier janvier, le sortant ne peut plus laisser de bêtes en pâture; il paie les 2/3 du fermage de l'année de sa sortie, celui des prairies y compris (2).

Quand il s'agit d'une ferme de moindre importance, il est simplement stipulé que le sortant doit ensemencer en grains d'hiver et en trèfles une certaine quantité de terres; parfois, c'est le fermier entrant qui lui doit rembourser le prix de la graine.

Généralement le fermier sortant n'a pas droit à un dédommagement pour arrière-engrais ou pour améliorations par lui. exécutées. Dans ces conditions, l'on conçoit que les travaux d'amélioration, s'il en exécute, sont minimes. Ils consistent

(1) Pandectes belges, Vo bail à ferme, no 17.

(2) Idem, no 491, jugé « qu'en Hesbaye, il est d'un usage général que les fermiers paient le tiers du fermage la première année et les deux autres tiers après la dernière récolte des grains d'hiver qu'ils ont semés avant leur sortie ». Idem, no 313, jugé « qu'il est d'usage constant, en Hesbaye, que le fermier sortant qui n'a pas joui du grain d'hiver la première année de son bail a droit à la récolte de ceux qu'il a semés la dernière année de son exploitation »>.

en clôtures ou en prairies artificielles. Parfois, le sortant parvient à se faire payer une certaine indemnité par l'entrant en menaçant celui-ci de labourer les prairies. Les fermiers seraient généralement partisans d'un dédommagement.

En 1850, le Comice agricole de Namur-Nord et d'Eghezée nomma une commission mixte, composée de propriétaires et de fermiers, pour étudier la question des baux à ferme. Voici quelles sont les conclusions auxquelles cette commission s'arrêta, conclusions qui furent adoptées par l'assemblée générale:

1o Le Comité reconnaît que la propriété et le progrès de l'agriculture dépendent, en grande partie, de la stabilité dans la position du cultivateur qui ne peut être obtenue, dans les terres affermées, qu'au moyen de baux à long terme.

En conséquence de ce principe, le Comice recommande aux propriétaires, dans leur propre intérêt, l'abandon de la faculté du renon par triennal, clause funeste aux améliorations agricoles; il conseille le terme de douze ans, sans renon, comme suffisant dans les fermes en bon état de culture;

2o En ce qui concerne les exploitations rurales détériorées, celles qui demandent de grands travaux d'amélioration foncière et les défrichements, le Comice déclare qu'un bail de dix-huit ans lui paraît nécessaire pour les mettre en bon état de culture.

Les convenances et l'intérêt des familles pour le cas de force majeure telle que succession, partage, vente, peuvent être garantis par une clause résolutoire conçue de manière à réserver aux fermiers la restitution des dépenses pour engrais dont ils n'auraient pas eu le temps de jouir...;

3o Le Comice signale à la plus sérieuse attention des propriétaires de terres affermées les diverses améliorations, telles que drainage, défoncements pour amender le sol, épierrements, etc., etc.

Considérant que ce genre de travaux crée de nouvelles valeurs foncières, qui s'incorporent définitivement à la terre, constituent une plus-value de la propriété ou du capital foncier; que c'est à celui-ci, en conséquence, à pourvoir à cette nature de dépenses;

Considérant néanmoins que ce but peut être atteint de trois manières différentes : l'intervention directe du propriétaire avec payement d'intérêts par le fermier; l'avance du capital par celui-ci, avec conditions de remboursement à sa sortie; enfin, la répartition de la dépense par moitié entre les deux parties contractantes, sans stipulation d'intérêts ni de remboursements, le Comice présente les formules numéros 2, 3 et 4 (qu'on fait suivre) comme résumant ces trois systèmes (1).

Depuis 1850, la question du fermage n'a guère fait de progrès en Hesbaye. Les baux se font encore pour neuf ans et parfois y figure la stipulation que renon pourra être donné pour la fin de la troisième ou de la sixième année. Le fermier sortant n'a pas droit à dédommagement pour arrière-engrais ou travaux d'amélioration qu'il aurait exécutés. Le prix du fermage pour les grandes et moyennes fermes louées en bloc est d'environ 150 francs l'hectare. En 1800, la terre se louait 60 francs l'hectare. Ce prix a augmenté graduellement pour arriver jusqu'à 230 francs en 1870 (2). A partir de 1875, il a fléchi rapidement; depuis six, sept ans il est en hausse.

(4) Le rapport de la Commission est reproduit dans l'Annuaire agricole ae Belgique, par H.-J.-B. BIVORT. Bruxelles, Stapleaux, 1852, pp. 320 et suiv.

2) En 1810, 70 francs l'hectare; en 1830, 80 francs et en 1850, 100 francs. Ce sont des chiffres trouvés dans de vieux actes; nous en citons encore plus loin; ce ne peuvent être que des moyennes. « Le prix moyen de location des fermes est difficile à établir. Il est telle exploitation en bonne terre, n'ayant pas été jusque-là cultivée en betteraves et que les preneurs ont destinée, du consentement du propriétaire prévu au bail, à la culture de cette racine ('/; de l'étendue totale chaque année) qui, quoique mesurant 100 hectares, ont été remises à 240 francs et à 265 francs par hectare en bloc, pour une période de dix-huit ans. En moyenne cependant, les grandes fermes en terre fertile sont louées de 200 à 240 francs et. quand le sol est moins bon, à 140 francs par hectare. Dans les locations parcellaires, le prix varie de 180 à 300 francs par hectare pour trois, six et neuf ans. Rapport de A Damseaux, professeur à l'Institut agricole de Gembloux, daté du 10 octobre 1877, reproduit dans L'Agriculture belge de E. DE LAVELEYE, ouvrage cité plus haut, p. 209. Les chiffres s'appliquent particulièrement au canton de Gembloux. TOME V. LETTRES, ETC. 6

Il est de grands fermiers qui, pendant de nombreuses années, occupent la même ferme, mais tous ne sont pas dans ce cas. Assez souvent ils ne font que un, deux, parfois trois termes de neuf ans. En annexe, nous reproduisons, à titre d'exemple, le contrat de bail d'une grande ferme des environs de Landen, fait le 21 avril 1896. Nous reproduisons également quelques articles du contrat de bail de cette même ferme, fait le 25 janvier 1905.

Les petits cultivateurs ne louent généralement pas en bloc. Ils prennent en location de l'un et de l'autre propriétaire et se font déclarer adjudicataires aux locations publiques de terres. Ce sont les établissements publics (bureau de bienfaisance, fabrique d'église, etc.) qui doivent faire procéder aux adjudications publiques. Assez généralement, le petit cultivateur et les ouvriers agricoles qui veulent avoir des terres en offrent alors des prix exorbitants; ces locations publiques servent souvent à vider des rancunes personnelles, à tel point qu'un notable, au cours de notre enquête, nous dit : « C'est à ne plus vouloir faire partie de la fabrique d'église »>! Il y a également des propriétaires particuliers, mais c'est rare, qui louent leurs terres publiquement pour en faire le plus haut prix possible. Il est cependant des communes où l'on nous a dit que des propriétaires qui, précédemment, louaient publiquement ont abandonné la location publique et louent actuellement de la main à la main, pour éviter que les petits propriétaires ne s'entendent pour ne pas surenchérir.

Assez souvent, les petits locataires ont un contrat de bail écrit. Ces contrats sont faits pour un terme de neuf ans; parfois y figure la stipulation de renon pour la fin de la troisième ou de la sixième année.

En cas de bail tacite, celui-ci dure trois ans.

D'après un ancien dicton, « la charrue fait bail pour trois

ans >>.

En pratique, ces baux peuvent être considérés comme de véritables contrats à vie. Le locataire qui paie régulièrement continue à exploiter la terre.

Il est d'usage que la partie qui veut mettre fin au bail donne congé.

Notons, à cet égard, la coutume originale qui existe encore dans le pays de Looz. Le propriétaire qui veut mettre fin au bail met la charrue en terre à la fin du triennal, après la récolte principale et avant l'ensemencement d'une récolte d'été (navets ou sarrazins), en tous cas avant le 15 septembre. S'il ne met pas la charrue en terre après l'enlèvement de la récolte principale et s'il laisse semer des navets ou fumer la terre à nouveau, le preneur commence un nouveau bail de trois ans. On admet cependant que le labour fait par le locataire avant le 15 septembre ne peut être invoqué par lui pour la tacite reconduction.

Le prix du fermage pour la terre louée en détail est très élevé 200 à 250 francs l'hectare est un prix très communément payé en sus de l'impôt foncier et de toutes contributions. Assez souvent, le locataire paie au propriétaire un dixième du prix de location « pour les contributions ». Le locataire d'une ferme de 100 hectares nous dit un jour que, si son propriétaire lui permettait de louer la ferme en détail, il donnerait volontiers 30 francs de plus à l'hectare que son fermage actuel et qu'il vivrait en rentier. Nous donnons en annexe quelques prix atteints dans des locations publiques de parcelles de terre pour la partie flamande et la partie wallonne de la Hesbaye. Nous y joignons un contrat de bail pour une commune du nord-est de la province de Liége, située entre Landen et Waremme. Le prix du fermage pour parcelles, louées en détail, est bien souvent trop élevé, exagéré en ce sens qu'il ne correspond pas à la valeur productive du sol et que le locataire, parfois, ne parvient à le solder qu'à l'aide du salaire que ses enfants ont gagné dans l'industrie.

Le petit cultivateur, devant débourser trop pour le fermage, n'a souvent pas de quoi acheter suffisamment d'engrais de commerce; c'est là une des causes qui expliquent que dans des régions avoisinantes, où la terre est moins fertile et le fermage moindre, le petit cultivateur a des récoltes aussi belles et parfois plus belles qu'en Hesbaye. Il fume davantage ses terres.

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