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Le fermage est toujours très régulièrement payé vers la fin de l'année. C'est alors que le fermier reçoit le prix des betteraves à sucre qu'il a livrées à la fabrique. Les petits cultivateurs sont même plus exacts à payer leur fermage que les grands, parce qu'ils ont peur que la terre ne leur soit enlevée (1).

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Bâtiments de ferme. Les bâtiments d'une grande et moyenne ferme hesbignonne sont caractéristiques. «< Tout semble disposé pour repousser une attaque, dit de Laveleye, et l'on croirait voir une petite forteresse plutôt que la demeure d'un cultivateur (2)». Et H. M. Jenkins, reprenant l'image, dit que « the farmhouses invariabily present the fortresslike appearence » qu'il avait déjà décrite (3). Les murs des bâtiments sont en briques, parfois en pierres de la localité. Pour les grandes fermes, les toitures sont assez souvent en ardoises, pour les fermes moyennes, en tuiles ou en ardoises. Le corps de logis, les écuries, les étables et la grange forment généralement les quatre côtés d'un carré ou d'un rectangle constituant une vaste cour pavée au milieu de laquelle se trouve la fosse à fumier. Il y a peu d'ouvertures dans les murs extérieurs de la construction. Dans les vieux bâtiments, les fenêtres à l'étage sont petites et étroites. La maison d'habitation, surtout dans les fermes récemment bâties, est installée avec un certain luxe et en tout cas elle est très confortable. Elle est disposée de façon à permettre la surveillance de l'intérieur de la ferme. Dans les fermes nouvellement bâties, les écuries et les étables sont voùtées. Dans les fermes plus anciennes le plafond se compose d'un

(1) Voir un projet-type de bail à ferme pour la Hesbaye, dans Publications du Cercle d'études des agronomes de l'État. I. Projet-type de bail à ferme pour des diverses régions agricoles de la Belgique. Bruxelles, Weissenbruch, 1904, pp. 6 et suiv.

(2) Essai sur l'économie rurale de la Belgique. Bruxelles, Tarlier, pp. 219-220.

(3) The Journal of the Royal Agricultural Society of England. Seconde serie. Volume the sixth, 1870, p. 38.

plancher, parfois il n'est formé que par un gîtage en bois, sur lequel repose le fourrage. Généralement les mangeoires, dans les étables, sont établies contre les murs latéraux et il y a un couloir central entre les deux rangées d'animaux. Les granges sont très vastes. Derrière le carré se trouve parfois un hangar trop peu spacieux pour abriter le matériel agricole. Dans beaucoup de ces fermes, la cour est défectueuse, souvent elle est trop petite, en grande partie occupée par le fumier, qui n'est que trop souvent lavé par les eaux des toits.

Depuis une vingtaine d'années les bâtiments de ferme ont été beaucoup améliorés, les étables ont été voùtées et un pavement est venu remplacer dans la cour les briques sur champ. On commence également à établir le fumier en dehors de la cour de la ferme (1).

Les petites fermes ne représentent pas cet aspect caractéristique les bâtiments se trouvent sur une ligne, avec parfois quelques annexes à côté ou derrière. Ici encore le fumier se trouve généralement devant la porte d'entrée; il reçoit aussi toutes les eaux et le trop-plein du purin s'écoule souvent sur la voie publique.

Il est assez difficile d'évaluer la valeur des bâtiments, valeur qui naturellement diffère beaucoup d'une ferme à une autre : nous croyons que, en moyenne, cette valeur correspond à 300 francs l'hectare.

Comme nous l'avons déjà noté, les bâtiments se trouvent généralement au centre de la commune; il n'est que quelques grandes fermes au milieu des terres.

Logement. Le grand fermier est bien logé. Son mobilier présente toujours un air confortable, même parfois du luxe.

(1) Voir la description des bâtiments de la ferme de Bernissem dans Ene Ferme belge à vol d'oiseau. Rapport présenté à la Commission d'examen de l'Université catholique de Louvain pour l'obtention du diplôme d'ingénieur agricole par Paul Roure y Rovirola. Louvain. I efever. 1885, pp. 18 et suiv.

Cela n'est pas étonnant même comme fermier, il se trouve à la tête d'un capital d'exploitation assez considérable.

L'habitation du petit cultivateur comprend, au rez-de-chaussée, une cuisine, parfois une place de réserve avec alcôve, un lavoir et un fournil.

A l'étage, il y a deux, parfois trois chambres à coucher. Celles-ci ne sont pas toujours suffisamment aérées; le mobilier est rudimentaire. Assez souvent, la maison pourrait être plus proprement tenue. Jamais des animaux ne logent dans les mêmes pièces que les habitants.

Travail du cultivateur et des membres de sa famille.— Le grand cultivateur dirige son exploitation et la surveille. Sa femme soigne la basse-cour et parfois l'étable, mais, dans les grandes fermes, les jeunes fermières ont une tendance à ne plus se charger de l'étable, ni même de la basse-cour. A certains points de vue cela présente un avantage : elles pourront davantage s'occuper du ménage, soigner mieux les enfants et procurer plus de confort au mari.

Le moyen cultivateur s'occupe aussi spécialement de la direction et de la surveillance des travaux, parfois il conduit lui-même ses attelages, sinon ses enfants conduisent les chevaux.

Les petits cultivateurs s'occupent de tous travaux agricoles et travaillent même beaucoup plus que les ouvriers: eux, leur femme et leurs enfants. Nous avons déjà eu l'occasion de dire à quoi les enfants sont employés; ils travaillent, en général, trop pour leur âge; nous devons en dire de même des femmes de petits cultivateurs, qui font la plantation des pommes de terre, le binage avec la houe et à la main, travaillent aux champs pendant la moisson, déchargent en grange, ramassent les pommes de terre, font le décolletage des betteraves, travaillent au battage mécanique du blé, à l'épandage du fumier, etc.

Nourriture. « On ne remarque pas sans étonnement que le Hesbignon, placé sur le sol le plus productif, est celui des

habitants du département qui se nourrit le plus mal. Il ne mange que du pain de seigle, toujours mal cuit parce que, à défaut de bois, on chauffe le four avec de la paille, et il exporte ce qu'il a de mieux. » Cette constatation de Thomassin (1) ne pourrait plus se faire maintenant. De vieilles personnes parlent encore du temps où en Hesbaye on ne mangeait que trois fois par jour (2) Vers 1860, on prenait le matin du café ou de la soupe faite à la farine et à la petite bière, avec des tranches de pain de seigle enduites de sirop. En été, on portait, vers 8 heures, de la même soupe au champ avec une tartine; à midi on avait des pommes de terre avec des carottes cuites et du lard; le soir des pommes de terre et de la salade. Chez certaines petites gens, les mets étaient préparés à l'huile de colza.

Actuellement la nourriture est bien plus abondante et plus substantielle. Le matin, avant d'aller au travail, c'est-à-dire à 5 heures en été et à 6 1/2 en hiver, on fait un premier déjeuner composé de café avec tartines beurrées. Le second déjeuner se prend à 8 heures ou 8 1/2 heures. Il se compose encore de café et tartines, mais toujours, quand le travail est dur, même chez les petits cultivateurs, on ajoute du lard ou, le vendredi, des œufs. A midi, il n'y a pas toujours du potage, mais des pommes de terre avec légumes, du lard ou du jambon, du pain et de la bière. Dans certaines fermes, surtout quand la bière n'est plus bonne, on prend une tasse de café après le dîner. A 4 heures, le goûter se compose de tartines beurrées et de café. Le soir, au souper, on a des pommes de terre avec des légumes ou de la salade et parfois du potage. A ce repas, on mange peu de viande.

Le dimanche, le lard ou le jambon est généralement remplacé par de la viande fraîche.

(1) Ouvrage cité, p. 215.

(2)« Trois repas, l'un léger, le matin, l'autre vers le milieu du jour qui est le principal et l'autre vers le soir plus léger, forment la règle générale qui souffre peu d'exceptions. » COURTOIS, ouvrage cité, 1828, p. 182.

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Dans les grandes fermes, le cultivateur et sa famille mangent dans une pièce séparée. Dans les moyennes et les petites fermes, ils prennent le plus souvent place à la même table que les domestiques et les ouvriers; parfois une moitié de la table est réservée à ceux-ci. Anciennement il n'y avait qu'un récipient au milieu de la table. Cet usage, qui existe encore dans certaines fermes, a pour ainsi dire complètement disparu. Chacun a actuellement son assiette et son verre. Il est encore à noter ici que la femme du petit cultivateur, participant personnellement trop au travail, ne soigne pas toujours la nourriture comme il le faudrait. D'ailleurs, au point de vue de l'art de la cuisine, elle aurait encore beaucoup à apprendre.

Cultures. Pendant la première moitié du XIXe siècle, la Hesbaye était une région à céréales. « Les céréales forment, lisons-nous dans le rapport de M. de Lafontaine, présenté au Congrès agricole de Bruxelles en septembre 1848, la base de sa culture. C'est en vue de leur production la plus abondante que travaille le cultivateur hesbignon. Il établit son bénéfice net sur leurs ventes plus ou moins avantageuses. Point de cultures industrielles la vente des pommes de terre, depuis la maladie de ce tubercule, est le seul produit autre que les céréales qui paraisse au marché. Dès lors se résument facilement les objections qu'il présente lorsqu'on préconise l'engraissement à l'étable et l'assolement basé sur la culture des racines. Il nous demande comment il nourrira ses chevaux; comment, avec moins de paille, il produira suffisamment de fumier; comment, enfin, il n'y aurait pas diminution du bénéfice net s'il doit restreindre la sole des céréales pour augmenter celle des racines (1). » Et plus loin encore, dans ce même rapport, il parle de « la culture vicieuse de plusieurs céréales successives, telle qu'elle est pratiquée en Hesbaye ».

(4) Congrès agricole de Belgique, réuni à Bruxelles les 24-24 septembre 1848. Bruxelles. Imprimerie de Deltombe, 1848, p. 134.

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