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nouveau locataire. Ainsi le lecteur pourra se faire une idée plus ou moins complète d'une grande ferme de la Hesbaye pendant la première moitié du XIXe siècle.

A cet examen des vieilles sources imprimées et manuscrites est venue s'ajouter l'étude de la «littérature » contemporaine et surtout, car cette littérature est pauvre, l'enquête personnelle, orale et écrite.

Avant de faire une monographie de région, il faudrait pouvoir disposer d'un grand nombre de monographies de communes. Malheureusement, elles n'existent pour aucune région du pays. Au dernier concours général agricole de Bruxelles, organisé par la Société provinciale d'agriculture du Brabant (juillet 1907), on avait institué un concours pour monographies de con.munes faites sur un plan uniforme : c'étaient des réponses à un questionnaire détaillé concernant la propriété foncière, l'exploitation agricole, le cultivateur, l'ouvrier agricole, les associations agricoles, etc.

Nous sommes heureux d'attirer ici l'attention sur cette initiative, certaines d'entre les réponses étant données avec beaucoup de soin. Notre attention a été spécialement attirée sur les quelques monographies de communes heshignonnes du Brabant et nous y avons trouvé certains détails intéressants. Puisse-t-il y avoir là un indice de l'intérêt qu'à l'avenir, plus que par le passé, on portera à l'étude des conditions économiques et sociales des populations agricoles! Nous serions heureux que des monographies régionales comme

celle de la Campine publiée par l'Académie et celle qui suit ici puissent susciter cet intérêt (1).

A défaut de monographies locales, il nous a fallu procéder nous-mêmes à des enquêtes. Nous les avons faites, écrites et orales.

Une enquête orale vaut naturellement mieux qu'une réponse à un questionnaire: on saisit la pensée sur le vif, il y a moyen de demander des renseignements complémentaires et de contrôler les renseignements fournis en revenant indirectement sur la même question. Il y a d'ailleurs la critique des témoignages les uns sur les autres, et, avant de commencer une enquête, il faut déjà être quelque peu au

(1) Le Ministre de l'Agriculture a publié en 1899, 1900 et 1901 des monographies pour les différentes régions agricoles du pays; mais ces monographies, intéressantes au point de vue technique, donnent peu renseignements relativement aux conditions économiques et sociales de la population agricole. La Société des agriculteurs de France a publié différentes monographies de communes faites d'après un cadre dressé par M. Cheysson. Il a été parlé de « l'hypertrophie historique >> du cadre de M. Cheysson et à bon droit, croyons-nous : l'histoire y occupe trop de place, il ne la faut ici que pour autant qu'elle est nécessaire à l'intelligence des situations actuelles. A l'Exposition internationale de Paris, en 1900, on avait réuni un très grand nombre de monographies de villages agricoles de la France; c'est dommage que la collection n'ait pas été conservée: elle aurait constitué, pour l'économie rurale de la France, une source bien intéressante. A la fin de l'Exposition, les monographies ont été renvoyées à leurs auteurs.

En Allemagne, il a été publié ces dernières années un assez grand nombre de monographies de communes, dont plusieurs comme thèses de doctorat aux universités.

courant de la question. « L'art de la monographie est sur la limite d'un autre art: celui de l'espionnage » a écrit du Maroussem (1). C'est vrai. Mais c'est là la critique de témoignages; il faut avant tout savoir à quelles personnes s'adresser et comment les interroger.

Les autorités sociales de la commune le notaire, le régisseur, le propriétaire, le curé, le secrétaire communal, le directeur des associations agricoles, les fermiers et ouvriers intelligents, les vieillards, telles sont les personnes qui peuvent fournir le plus de renseignements; mais il ne faut pas oublier qu'on est dans un milieu agricole où l'on est tout naturellement un peu défiant. L'enquêteur doit être connu d'avance ou muni de bonnes introductions.

Comment faut-il interroger?

Il faut évidemment préparer son enquête d'avance: nous avions sous les yeux, là où cela pouvait se faire, le questionnaire qui suit et dont nous nous sommes servis pour les renseignements à demander par écrit.

On prend immédiatement quelques notes, spécialement quant aux chiffres cités et, rentré chez soi, on rédige les réponses.

Il faut à l'enquêteur trois qualités sur lesquelles nous attirons spécialement l'attention: il doit montrer, par son interrogatoire, qu'il n'est pas complètement ignorant des choses au sujet desquelles il recueille plus de renseigne

() Voir son guide: Les enquêtes. Pratique et théorie. Paris, Alcan, 1900 p. 179. Il y a des réserves à faire concernant la théorie de la méthode de l'auteur. Voir, à cet égard, l'articulet de V. BRANTS, Encore la question de méthode. A propos d'un livre récent, dans LA RÉFORME SOCIALE, 16 avril 1900, pp. 629-633.

ments; il faut qu'il prenne grand intérêt à la question et il lui faut une bonne dose de patience, pour revenir toujours sur les mêmes sujets et ne pas interrompre trop intempestivement quand l'interrogé fait des digressions et «< raconte des histoires >>.

On ne peut interroger personnellement tous ceux qui sont disposés à fournir des renseignements il y a l'enquête écrite.

Nous avons envoyé à ces personnes le questionnaire suivant; il est détaillé et de nature à effrayer à première vue par la multiplicité des renseignements demandés; nous l'avons fait si détaillé parce que la réponse devient plus facile quand elle peut être adéquate à une question nette.

Et nous n'avons aucunement lieu de nous plaindre d'avoir procédé de telle façon nous avons reçu un grand nombre de réponses très intéressantes.

Une lettre accompagnait le questionnaire, lettre dans laquelle il était dit que, s'il y avait certaines questions d'un ordre plus délicat ou des questions pour lesquelles la personne à qui le questionnaire était envoyé n'avait pas de compétence particulière, nous eussions déjà été heureux d'obtenir des réponses aux questions relatives à des objets spécialement connus. Si certaines réponses devaient être moins favorables à la population de la commune, nous nous engagions à ne pas faire connaître la source d'où nous tenions le renseignement.

Le questionnaire ne contient pas moins de cent cinquantedeux questions et beaucoup d'entre elles sont subdivisées.

QUESTIONNAIRE.

Propriété foncière.

1. A qui appartient la terre : à des habitants de la région ou de la commune ou à des étrangers?

Où habitent ces étrangers?

Ont-ils de l'influence dans la région ou dans la commune ? Comment ?

2. Y a-t-il des grands propriétaires qui exploitent eux-mêmes tout ou partie de leurs terres? Comment le font-ils?

3. Sur les 100 cultivateurs, combien y en a-t-il qui sont propriétaires :

a) de toutes les terres qu'ils exploitent?

b) de partie des terres qu'ils exploiteut? c) rien que de leur maison?

Quelle catégorie de cultivateurs 5, 10, 20, 30 et plus d'hectares est surtout propriétaire des terres exploitées? 4. Les ouvriers agricoles ont-ils certaine propriété?

Leur maison seule, ou des terres adjacentes? Quelle étendue de terre ?

5. Le nombre des cultivateurs et ouvriers agricoles, propriétaires de leur maison et de toutes ou partie des terres qu'ils exploitent, s'accroît-il?

Depuis quand et quelles en sont les causes?

6. Leur propriété est-elle hypothéquée ?

A quelle occasion (par exemple acquisition, liquidation de succession), la propriété est-elle hypothéquée?

Les hypothèques diminuent-elles ou augmentent-elles?
Depuis quand? Quelles en sont les causes?

Chez qui emprunte-t-on sur hypothèque?
Quel est l'intérêt?

Rembourse-t-on les créances hypothécaires? Y a-t-il fréquemment des biens hypothéqués vendus sur expropriation?

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