tera l'image et les attributs de la Justice sous la garde de deux sergents du guet : c'est la juridiction criminelle du Châtelet, qui a donné ses premières armes à la police de Paris. Du reste, interrogez-moi là-dessus tout à votre aise; je vous répondrai le plus éxactement qu'il me sera possible, et vous me remercîrez..... sur les ruines du Châtelet et du Fort-l'Évêque.>>> Chacun de nous interrogea bien vite notre bienveillant antiquaire : << Parlerons-nous, au début de ce travail historique, de l'origine militaire du grand et du petit Châtelet? - Cinq ou six lignes seulement, et vous aurez l'air d'en savoir beaucoup; écrivez : L'île de la Cité a eu l'honneur de renfermer Paris tout entier; la ville dut songer de bonne heure à se fortifier: les Romains lui donnèrent, pour se défendre, des murailles solides; les Parisiens remplacèrent les constructions romaines par de grandes tours en bois; enfin, dans les premières années du douzième siècle, Louis le Gros fit élever deux forteresses pour la défense de la Cité : le grand Châtelet, au nord; le petit Châtelet, au midi. Je ne pense pas que les lecteurs des Prisons de Paris tiennent beaucoup à connaître l'histoire des deux Châtelets, sous le rapport militaire; il ne s'agit point, dans cet article, des Parisiens assiégés par les Normands: vous n'avez à parler que de la justice et des prisonniers d'autrefois. Nous vous écoutons, comme si l'on vous nommait Félibien ou Sauval. La prison du grand Châtelet commencé avec l'enceinte de Philippe-Auguste; la juridiction de la vicomté et de la prévôté de Paris s'y établit, en vertu d'une ordonnance qui précisait, en même temps, le nombre des officiers, des auditeurs et des notaires qui devaient en dépendre. La cour du Châtelet se divisait en quatre sections: l'audience du parc civil, celle du présidial, la chambre du conseil et la chambre criminelle. Sur la porte de cette dernière chambre, on lisait, au dix-huitième siècle, ce distique du poëte Santeuil : Hic pœnæ scelerum ultrices posuere tribunal: : << Sauval, que vous rappeliez tout à l'heure, divise le grand Chà telet en huit parties, ou prisons particulières : le berceau, le paradis, la grièche, la gourdaine, le puits, les chaines, la boucherie, les oubliettes. Au quinzième siècle, le grand Châtelet reçut un supplément de cachots, sans compter les chartres basses que lui avait déjà prêtées la prison supplémentaire du petit Châtelet. Une ordonnance du mois de mai 1425 réglait de la manière suivante le prix de geôlage que devaient payer les prisonniers, selon l'état de chaque personne : << Vous pourrez lire dans l'Histoire de Paris, de Dulaure : « Il << paraît que les prisonniers étaient descendus dans le cachot dit « la fosse, par une ouverture pratiquée à la voûte du souterrain, << comme on descend un seau dans un puits. Peut-être que cette << fosse du Châtelet était celle qu'on nominait chausse d'Hypocras, <<< où les prisonniers avaient les pieds dans l'eau, et ne pouvaient << se tenir debout ni couchés; sa forme devait être celle d'un cône « renversé. Ordinairement, les prisonniers y mouraient après << quinze jours de détention. Un autre cachot avait reçu le nom « de fin d'aise : il était plein d'ordures et de reptiles; au reste, la « plupart des noms de ces prisons, et notamment celle qu'on << appelait les oubliettes, en donnent une affreuse idée. « Les officiers du Châtelet célébraient chaque année, le lundi <<< après le dimanche de la Trinité, une fête ou cavalcade appelée « la montre. La marche était ouverte par une musique guerrière << composée de timbales, trompettes, hautbois, et par les attributs ◄ d'une justice militaire, tels que le casque, la cuirasse, les gan« telets, le bâton de commandement et la main de justice, emblè<< mes dont chacun était porté par un individu. Puis, suivaient << quatre-vingts huissiers, ou sergents à cheval, cent quatre-vingts << sergents à verge, précédés de leurs trompettes et timbales, et << portant leurs signes d'honneur. << Ceux qui figuraient dans cette partie de la cavalcade étaient « tous vêtus en habits courts et de diverses couleurs. Venaient <<< ensuite cent vingt huissiers priseurs, vingt huissiers audien<< ciers, couverts de leurs robes de palais; douze commissaires au << Châtelet, en robe de soie noire; un des avocats du roi, un des <<< lieutenants particuliers et le lieutenant civil : ces derniers se << faisaient remarquer par leur robe rouge; puis des greffiers du « Châtelet et quelques huissiers fermaient la marche. Cette caval<< cade se portait successivement chez le chancelier, le premier << président, le procureur général, et chez le prévôt de Paris. << Elle avait sans doute la même origine, le mème motif que les << marches pompeuses que célébraient les clercs de la chambre « des comptes et ceux du parlement; mais elle s'est maintenue << plus longtemps, et la montre du Châtelet n'a cessé qu'à l'épo« que de la révolution. >>> - Puisqu'il s'agit d'une scène publique, d'une solennité qui se rattache à l'histoire du Châtelet, ne serait-il pas à propos de rappeler, avec Sauval, la fameuse cérémonie des Roses? La présentation des roses appartient bien plus aux coutumes du parlement qu'à celles du Châtelet; mais, du reste, cette redevance intéressait toutes les cours du royaume, un peu plus, un peu moins, et vous aurez raison de reproduire le récit de Sauval : « Le roi paie tous les ans un droit de roses au parlement et à toutes les cours souveraines. Les pairs de France des derniers temps devaient et présentaient eux-mêmes des roses au parlement, en avril, mai et juin. Les princes étrangers, les cardinaux, les princes du sang, les enfants de France, même les rois et les reines de Navarre, en faisaient autant. « En 1541, le parlement de Paris, au mois de juin, ordonna que Louis de Bourbon, prince du sang, duc de Montpensier, créé duc et pair en 1536, lui présenterait des roses, avant François de Clèves, duc de Nevers, pair de France depuis l'an 1505, et n'eut point d'égard qu'en cette redevance il s'agissait de pairie, non de sang et de naissance. |