Imágenes de páginas
PDF
EPUB

DES ÉDITEURS

(DES MÉMOIRES PARTICULIERS RELATIFS A L'HISTOIRE DE FRANCE)

SUR

LA PERSONNE ET LES MÉMOIRES

DE

JACQUES DU CLERCQ.

LES Mémoires de Jacques Du Clercq, que nous publions aujourd'hui, n'avaient jamais été imprimés. Le manuscrit en est déposé à la bibliothèque de l'abbaye de Saint-Vaast d'Arras, sous la cote G.

Jacques Du Clercq nous apprend qu'il naquit en 1424, et qu'il fut licentié ès droits, conseillier de Philippe-le-Bon, duc de Bourgogne, en la chastellenie de Douay, Lille et Orchies. Il paraît qu'il fixa sa résidence à Arras. En 1446,

il épousa la fille de Balduin de la Lacherie (1), gentilhomme qui demeurait à Lille. On lit dans le cinquième livre de ses Mémoires, que son père, nommé comme lui Jacques Du Clercq, s'était marié à une demoiselle Le Camelin (2), de Compiègne. Ses ancêtres toujours attachés aux comtes de Flandre, les avaient constamment servis, soit dans leurs conseils, soit dans leurs armées.

Suivant quelques écrivains (3), l'auteur des Mémoires eut un frère qui fut abbé de Saint Vaast, et qui se distingua par la sagesse de son administration. Cependant il ne parle point de ce frère dans son ouvrage. Il n'en fait même aucune mention dans le tableau généalogique de sa famille qu'il y a inséré (4).

Les Mémoires de Du Clercq parcourent un espace d'environ dix-neuf années : ils commencent en 1448, et finissent en 1467. On voit dans la Préface que l'auteur avait conçu le projet de les étendre bien au-delà de cette date; sans doute que les maladies, ou la mort, l'empêchèrent de l'exécuter. Le manuscrit, tel qu'il est sorti de ses mains, n'avait point encore été tiré de son premier dépôt (5); et l'on a droit de s'en étonner, quand on réfléchit que beaucoup d'autres ouvrages du même genre, qui lui sont inférieurs à plus d'un titre, ont été réimprimés plusieurs fois. Le mérite de celui-ci consiste dans la simplicité de la narration, dans un ton de bonne-foi, un certain air de franchise qui captive nécessairement la confiance du lecteur.

(1) De la Cherie, MS. (2) De Camelin, MS.

[blocks in formation]

(3) Lisez....Bibliotheca Belgica Valerii Andreæ, page 406. (4) Voy, plus haut p. 11.

F. D. R.

(5) Le manuscrit même n'est connu que par l'indication très-superficielle qu'on en trouve dans la Bibliothèque Historique de la France, tom. II, pag. 195, no 17297, et par l'extrait d'un seul de ses chapitres, inséré parmi les Preuves de l'édition de Commines, par Lenglet. (Voy. pag 5. F. D. R.)

Je me suis enquis (dit naïvement Du Clercq dans sa Préface) au mieulx que j'ai sceu et pu; et je certiffie à touts que ne l'ay fait ny pour or, ny pour argent, ny pour sallaire, ny pour compte (1) à prince qui soit, ny homme, ny femme qui vescut. Ne voulant ainsy favoriser, ny blasmer nul à mon pouvoir, fors seulement déclarer les choses advenues ; je prie tout prince, chevaliers et seigneurs, si j'ay en ce mis chose qui desplaise, que sur moy ne le veuillent imputer à mal; car ne l'ay fait à nulle intention de nuyre, ou vitupérer personne par hayne: aussy s'il y a quelque chose qui plaise, qu'il ne m'en soit point sceu de gré; car ne l'ay fait pour l'amour d'aulcun, ny pour en amender.

Les diverses comparaisons que nous avons faites des récits de Du Clercq, avec ceux des historiens de son temps les plus accrédités, déposent en faveur de sa véracité. L'accord qui règne entre eux sur les mêmes faits qu'ils racontent, est une épreuve de son exactitude, lorsqu'il est question d'anecdotes intéressantes négligées par ses contemporains, et scrupuleusement recueillies par lui seul. Ce sont ces détails particuliers sur-tout que nous avons cru devoir conserver; car nous ne dissimulerons point que nous avons retranché de ces Mémoires tout ce qui ne serait qu'une répétition de ce que l'on a déjà la dans ceux de Richemont et d'Olivier de la Marche, ou de ce qu'on lira dans Commines et dans la savante préface de Lenglet.

Nous convenons encore, que nous avons été tentés plus d'une fois de refondre entièrement le style de Du Clercq, souvent incorrect, diffus et plein d'expressions populaires. Mais ce que le lecteur y aurait gagné, ne s'acquiert jamais qu'aux dépens d'un bien réel. L'historien qu'on veut faire connaître n'a plus sa physionomie; il a perdu son caractère d'originalité. Cette réflexion a d'autant plus aisément retenu notre plume, , que nous atteignons l'époque heureuse où la plu

(1) Complaire. F. D. R.

part des auteurs, qui paraîtront désormais dans cette collection, doivent plaire autant par les agrémens d'une diction naïve, que par la clarté avec laquelle leurs Mémoires sont rédigés.

A ces Mémoires de Du Clercq, nous avons joint deux pièces qui méritent l'attention du lecteur. La première (1) est une lettre de la Pucelle d'Orléans, qui n'a jamais été imprimée, et qui peint le caractère fier et singulier de cette fille célèbre. Cette lettre est accompagnée de remarques et d'observations judicieuses. Elles sont l'ouvrage d'un savant,: membre de deux académies, aussi recommandable par sa modestie que par la sagesse de son esprit, par la profondeur de son érudition, que par l'application qu'il en a faite à éclaircir les points les plus importans de notre histoire.

La seconde pièce est relative à Jacques Cœur (2). On y relève des erreurs accréditées par le témoignage de plusieurs écrivains, qui, dans leurs recherches, se sont écartés des bonnes sources. Vient ensuite l'extrait d'un ouvrage attribué au même Jacques Cœur. C'est un état des finances du royaume, sous Charles VII, accompagné du tableau de la recette et des dépenses de ce monarque. Ce morceau, presqu'ignoré, nous a paru digne d'être tiré de l'oubli.

Avant de terminer cette notice, qu'il nous soit permis de témoigner notre reconnaissance à MM. les religieux de l'abbaye de Saint-Vaast, qui ont bien voulu nous ouvrir leurs archives. Nous remercions aussi les hommes éclairés qui, par amour pour les lettres, nous ont facilité les moyens d'étendre nos recherches, et de donner un nouveau prix à cette collection.

(1) Voyez à la suite de ces Mémoires l'Observation, No 1. (Nous avons suprimé cette pièce. Voy. la Préface et T. IV, pag. 340. (2) Voyez l'Observation No 15: (T. IV, pag. 346.

F. D. R.)
F. D. R.)

DES MÉMOIRES

DE

JACQUES DU CLERCQ

ET DU FRUIT QU'ON EN PEUT TIRER.

LES

Les personnes habituées à la lecture des anciens conçoivent difficilement l'intérêt que présentent nos gothiques annales. Chez les historiens grecs et latins, les événemens se pressent, s'accumulent, se rapportent tous à un centre commun. Dans les beaux temps de leurs républiques, les Romains et les Grecs étaient des factieux, qui conspiraient pour le salut ou la prospérité de la patrie. On dirait qu'il n'y avait d'intéressant dans le monde que Rome, Athènes ou Sparte, et que le reste était fait pour servir d'ornement et de spectacle à leur gloire. Qu'était-ce que l'Afrique auprès des projets ambitieux d'un tribun? A côté de Péricles ou de César, l'Asie se montrait bien petite. Il paraîtrait que l'histoire a suivi la

TOME I.

2

« AnteriorContinuar »