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» et demie de fleches, une bonne longue espée a deux >> mains, avec une dague a deux taillans, de pied et demi » d'alemelle (1): et s'il advient que a la premiere monstre » qui se fera, il y ait aulcuns archiers qui, pour la briefté » du temps ou autrement, ne puissent recouvrer l'ha» billement tel que dit est, viennent à la premiere mons» tre habilliés de brigandines (2) ou de jacques, au mieux » et le plus honnêtement qu'ils pourront, et pour cette >> fois mondit seigneur s'en contentera, pourveu qu'ils » promettront et se obligeront que a la seconde revue ils >> seront tous habilliés de la manière dessus ditte.

» Les coulevriniers, arbalestriers et picquenaires seront » de pied et auront les habillements tels qui s'en suivent: » à savoir, le coulevrinier un haubergeon (3), l'arba» lestrier un haubergeon et le cret (4), et le picquenaire » un jacque ou haubergeon, lequel qu'il voudra, et s'il » choisit le haubergeon, il aura avec un glaçon (5); et >> auront habillement de teste chascun selon son cas.

L'homme d'armes a trois chevaux, habillié comme » dessus, aura pour mois de gages quinze francs de >> trente-deux gros le franç, et les trois archers à cheval » habilliés, comme dit est, feront une paye, et auront >> semblablement quinze francs par mois, qui est a

(1) Alumelle, lame. V. plus baut.

(2) Armure légère, faite de lames de fer jointes et qui servait de cuirasse. Originairement, dit M. Roquefort, on nommait brigands les soldats qui portaient cette armure; et comme ceux que la ville de Paris soudoya en 1356, pendant la captivité du roi Jean, commirent une infinité de vols, on désigne ainsi depuis, les voleurs et les coquins. (3) Haubert plus léger.

(4) Peut-être de crista; ce serait le capuchon de mailles attaché au haubert.

(5) Sorte de casaque.

» chascun cinq francs, ditte monnoye : le coulevrinier » et l'arbalestrier auront chascun quatre francs par mois, >> et le picquenaire deux patars par jour. »

La paie du conductier était de cent francs de trentedeux gros par mois, avec la paie de sa lance (1). Le dizenier recevait neuf francs outre sa paie qui lui était faite en pietres de 18 sols pièce, au lieu de francs de 32 gros, et le chef de chambre était payé de la même manière, moyennant quoi les conductiers, dizeniers et chefs de chambre n'avaient pas le droit de rien prélever sur les compagnons (2). Le duc Charles avait un armurier en titre qui se faisait appeler noble homme. C'était Alexandre du Pol, natif de Milan. Il avait 120 écus de pension, s'était établi à Dole et obligé à fournir par an, cent cuirasses de guerre complètes, au prix de 15 écus, pièce, et cent corselets, au prix de 4 écus (3).

Du Clercq observe quelque part que les bons archers étaient rares en Bourgogne (4). Mais les coustilliers et les hommes d'armes y étaient en réputation. On ne redoutait pas moins les piques de Flandre, appelées goedendag, parce qu'elles donnaient un terrible bonjour.

A grand bastons pesans ferrés,
Avec leur fer agu devant
Vont ceux de Flandre recevant,
Tiex baston qu'ils portent en guerre
Ont nom Godendac en la terre;
Godendac c'est bon jour à dire,
Qui en françois le veut descrire :

Cils bastons sont longs et traitis

Pour ferir à deux mains faitis, etc.

(1) V. plus bas ce qui est dit des monnaies.

(2) Mém. pour servir à l'histoire de France et de Bourgogne, p. 286. (3) Ibid. 277.

(4) T. IV, p. 181.

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C'est ainsi que s'exprime Guillaume Guiart à propos de la bataille de Courtrai, en 1302, où les Flamands repoussèrent les Français, principalement avec cette arme (1).

Du Clercq décrit également « la pique qui est un bas>>ton (arme) de la longueur d'une lanche d'homme d'ar>> mes; mais elle est plus menue ferrée et acherrée au » debout, et sont très dangereux bastons (2). »

Après la bataille de Mont-le-Hery, le duc de Calabre amena aux princes ligués, dont le comte de Charollois était l'ame, <«< une maniere de gens non armés, que on appelloit SIMPLES, lesquels estoient moult hardys gens(3). » L'armure des hommes d'armes fut long-temps d'un poids énorme; on l'avait reprise sous Charles IX et Henri III, et Lanoue se plaint qu'un jeune gentilhomme a trente cinq ans estoit tout estropié des épaules, d'un tel fardeau (4). Olivier de la Marche nous fournit de cette pesanteur un exemple que nous rapporterons d'autant plus volontiers, qu'il appartient aux vingt années des Mémoires de Du Clercq. Dans une rencontre durant la guerre contre les Gantois, Adolphe de Clèves et Corneille, bâtard de Bourgogne, poursuivirent trop vive→

(1) DANIEL, Histoire de la Milice française. Paris, 1721. T. I, p. 435.

(2) T. II, p. 25.

(3) T. IV, p. 181.

(4) XVe Disc. Milit. Montaigne lui-même a fait un chapitre sur ce sujet, c'est le ge du livre II. Il y cite ces vers de Claudien in Ruff. Livre II, v. 358 et seqq., qui peignent merveilleusement un ancien

homme d'armes à tout ses bardes:

Flexilis inductis animatur lamina membris,
Horribilis visu; credas simulacra moveri
Ferrea, cognatoque viros spirare metallo :
Par vestitus equis, ferrata fronte minantur,
Ferratosque movent, securi vulneris, armos.

ment l'ennemi. Le gouverneur du bâtard courut après lui et l'arrêtant : « Comment, monsieur, voulez-vous » par votre verdeur et jeunesse, mettre ceste noblesse en » danger, qui vous suit a pié, a pesantes armes et par » telle chaleur, qu'il faut les plusieurs porter et sou» tenir par les bras? vous devez être le chastel et le » fort où tous les autres se doivent rassembler et forti» fier, et l'on ne vous peut consuyr ne ratteindre : et » certes si les ennemis retournoyent et vous trouvoyent » en tel travail et desroy, cette vaillance vous seroit » tournée a honte, par le dommage qu'a vostre cause » pourroit avoir la campaignie (1). »

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Toutes les précautions étaient prises pour les hommes d'armes en qui reposait l'espoir du succès. C'était avec la cavalerie qu'on faisait la guerre ; on n'en savait pas assez pour sentir que l'infanterie la fait.L'épaisse encolure des chevaux de Flandre convenait parfaitement à cette pesante gendarmerie, aussi étaient-ils très - recherchés. Equorum robore, dit Marchantius, ad ferendam panopliam agilitate et forma præstantium adeo ut pulli aliundè adducti, ex tenui origine grandescant et deformi enitescant (2). La Hollande et la Frise disputaient cet avantage à la Flandre; les foires de Valkenburg sont encore renommées.

Quant à la tactique, Du Clercq ne rappelle jamais que l'ordre en trois batailles. Les manoeuvres et évolutions n'étaient cependant pas négligées, car les mêmes ordonnances militaires de Charles de Bourgogne prescrivent aux conductiers (ou capitaines) chefs d'escadre (d'es couade) et de chambre, étant en garnison, d'exercer

(1) Liv. I, ch. 25. (2) Fland., p. 14.

leurs gens quelquefois tout armés, quelquefois seulement du haut de la pièce, c'est-à-dire de la cuirasse et de l'armet, à combattre avec la lance en se tenant serrés, à s'éparpiller, puis à se rallier ensuite. On voit par cette ordonnance que les archers mettaient souvent pied à terre, qu'alors leurs chevaux s'abridaient trois à trois, que les chevaux des archers les suivaient dans le combat, lorsqu'ils en descendaient, que l'office des pages des gens d'armes était de conduire les chevaux ainsi abridez, et enfin que les pages, les chevaux des archers, et les archers mêmes étaient derrière les picquiers ou enfermés dans les bataillons ronds ou carrés des picquiers. On ne peut douter qu'il n'y eût aussi quelque exercice pour l'infanterie, car on en formait des bataillons, comme on le voit par la bataille de Bouvines, et en d'autres occasions (1).

Le tableau de la maison du duc Philippe qui fait suite à cette dissertation, instruira de l'état de l'artillerie et du génie sous son règne. On sait que les canons furent d'abord de fer; Louis XI en fit faire douze de fonte, auxquels il donna les noms des douze pairs, et dont un fut pris à Mont-le-Hery. Le plus gros dont il soit fait mention dans l'histoire de France, était de 500 livres de balles; il fut fondu à Thours, sous Louis XI, et portait depuis la bastille jusqu'à Charenton. Du reste, il est probable qu'on donna d'abord le nom de canon, non-seulement aux grandes pièces d'artillerie, mais encore aux armes à feu d'un très-petit calibre, que l'on pouvait porter et remuer avec la main, telles que les cra→ paudaux, coulevrines (2), dont au rapport de Juvenal

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