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honneurs, et ses ossemens repoussés de la terre des morts jusqu'à l'époque de la révolution française, restèrent le triste témoignage de cette haine fanatique contre laquelle le tombeau même n'est pas un refuge, lui qui pourtant devrait

faire tout oublier.

pour

Raymond VII en succédant à son père en 1222, ne put. trouver le repos sur le trône. Louis VIII se déclara contre lui, devenant le chef d'une nouvelle croisade; il marcha réduire le comte, et Toulouse vit encore, en 1226, les bannières ennemies flotter autour de son enceinte, mais non pas se déployer sur ses remparts. Le roi de France, repoussé avec perte, se retira, et mourut peu de temps après. Sa femme, Blanche de Castille, mère de Louis IX, et régente du royaume, continua la guerre. Le sire de Beaujeu ravagea les environs de Toulouse avec la même atrocité que le Palatinat le fut depuis sous le règne de Louis XIV. Raymond VII que les périls n'avaient pu abattre, ne résista point aux calamités qui frappaient ses sujets: il proposa la paix ; elle se conclut à Paris en 1228. Les suites amenèrent l'abaissement de la maison de Toulouse ; la meilleure partie de ses domaines lui fut enlevée, et pour comble de misère, le comte dut souffrir que l'Inquisition s'établit dans ses états. Ce prince se souilla bien davantage; car il s'assit lui-même au rang de ces bourreaux qui déshonoraient la religion par leurs coupables excès. Dieu punit Raymond d'une telle faiblesse; il ne put revivre dans sa race; nul enfant mâle ne devint le fruit de ses divers mariages, et sa fille Jeanne qui lui succéda en 1249, mariée au comte de Poitiers Alphonse, frère de saint Louis, mourut, ainsi que son époux, en 1271; au retour de la funeste croisade de Tunis, sans laisser un héritier.

En conséquence du traité de Paris, le comté de Toulouse passa à la couronne de France; les barons et le peuple toulousain prêtèrent solennellement leur serment de fidélité à Philippe le Hardi en 1271: la réunion du comté ne fut néanmoins définitivement terminée qu'en 1361 par le roi Jean. Le nouveau souverain Philippe III vint à Toulouse en 1280, et y établit un parlement qui fut de courte durée. Ce fut en 1295 qu'une délibération des capitouls ordonna qu'à l'avenir on peindrait dans un registre tenu exprès, les

portraits de leurs successeurs. Ainsi commença ce fameux recueil si précieux pour les arts, et dont l'importance ne put trouver grâce devant les Iconoclastes de 1793.

En 1296, la ville de Toulouse envoya, sans y être contrainte, mais par zèle, un secours d'hommes nombreux et braves, pour aider Philippe le Bel à repousser les Anglais. Ce prince institua un nouveau parlement en cette cité l'an 1303, si l'on doit en croire Bardin, dont l'autorité est plus que suspecte. Du moins si cette cour fut créée, elle exista peu; car elle fut supprimée en 1310, à la suite d'une sédition des Toulousains contre ses membres.

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Ce fut en 1323 que se réunirent d'une manière plus solennelle que jusqu'alors ils n'avaient fait, les sept mainteneurs du College de la Gaie Science, troubadours célèbres. auxquels on rapporte communément la fondation des Jeux Floraux les premiers dans l'Europe, ils imaginèrent ces associations paisibles qui, toutes à l'avantage des lettres, font la gloire des pays où elles sont en honneur. Arnaud Vidal de Castelnaudary remporta l'année suivante 1324, par un poëme en l'honneur de la sainte Vierge, la Violette d'or fin, 2, prix donné.par les mainteneurs, et que les capitouls continuèrent les années suivantes. Cette glorieuse récompense était alors désignée sous le titre de la Joya de la Violetta.

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L'érection de l'évêché de Toulouse en archevêché l'an 1317, la Reconstruction des remparts de la ville, celle de la Maison commune, édifiée près les débris de l'ancien capitole détruit par les Visigots, la Halle au blé bâtie, des querelles fréquentes entre les corps de magistrature et les écoliers, sont les objets qui occupent la plus importante partie de l'histoire de notre cité pendant le reste du quatorzième siècle. Le roi de France Charles V et le roi d'Aragon, vinrent se réunir, en 1364, dans Toulouse. Bientôt après, à la voix du fameux connétable Duguesclin, quatre cents généreux Toulousains partirent pour aller en Espagne venger sur le cruel dom Pèdre, roi de Castille, la mort tragique de Blanche sa femme, issue du noble sang de France. La poésie a célébré cette époque glorieuse de notre histoire, quand nos pères, naguère aimables troubadours aux Jeux Floraux, se montrèrent, dans les champs de

l'honneur, guerriers redoutables. Cette chevaleresque expé dition eut lieu en 1365.

L'emprisonnement d'un grand vicaire qui avait dépassé l'étendue de ses pouvoirs, attira en 1366, contre Toulouse la colère du Saint-Siége. Le pape Urbain V s'armant de rigueur, jeta l'interdit sur la ville et les églises. Il fallut dépouiller les autels de leurs ornemens, coucher les croix, les reliquaires, les images à plate terre, et les revêtir du voile de deuil. Les cloches se turent. A peine le sacrement du baptême ouvrait aux enfans le livre de vie, à peine le viatique porté furtivement allait consoler celui que la tombe réclamait. Les orateurs sacrés ne faisaient plus entendre leur voix accusatrice ou rassurante; les prêtres circulaient au milieu de leurs concitoyens, la tête, la barbe rase, les vêtemens couverts de cendres, comme des ombres silencieuses qui ne pouvaient plus unir les époux, ou réconcilier les repentans. Ce spectacle, répété chaque jour, remplit le peuple d'épouvante; il se hâta de crier merci, et l'interdit fut levé après les réparations convenables.

Cette même année les Toulousains, toujours ennemis des Anglais, ayant armé pour les combattre, éprouvèrent devant Montauban un échec considérable. Le roi Charles VI venant les visiter en 1389, créa dans leurs murs l'ordre de l'Espérance; il leur donna un parlement sans cesse demandé par le peuple, souvent accordé, mais aussi toujours supprimé par les intrigues de celui de Paris. Le dernier dont nous parlons fut bientôt après transféré à Beziers; il subit ensuite la destinée de ceux qui l'avaient précédé, et fut réuni à celui de Poitiers.

Toulouse eut aussi sa part des malheurs qui désolèrent la France sous le règne de Charles VI. Moins infortunée cependant que plusieurs autres villes du royaume, elle ne subit pas le joug odieux de l'Angleterre ; elle sut se refuser à d'autres lois qu'à celle de ses maîtres: le temps n'était pas venu où les leopards devaient souiller son enceinte. Le dauphin, depuis Charles VII, lui donna un parlement en 1420; c'était tout ce qu'il pouvait faire. Persécuté lui-même par les ennemis de sa maison, son trône était ébranlé de toute part, lorsqu'une simple bergère apparaissant, le glaive à la main, au milieu des guerriers lassés, leur redonnant

une nouvelle vigueur, les ramena à la victoire. Le monde connaît les exploits de Jeanne d'Arc; le ciel peut seul nous apprendre le secret de sa mission. La patrie fut sauvée par elle; l'Anglais fut confondu, et Charles VII, solennellement couronné à Rheims, se trouva possesseur de l'héritage de ses pères.

Charles VII ayant chassé les Anglais du nord de la France, les poursuivait à outrance dans la Guienne. Toulouse, où il était venu, devint son quartier général en 1442. Enfin voulant récompenser la fidélité et les services que les gens du Languedoc avaient rendus à sa cause, il institua le parlement de Toulouse en 1443, et cette cour, installée l'année suivante, subsista depuis autant que la monarchie.

Aux calamités sans nombre qui désolaient notre patrie, la peste et la famine mêlèrent leurs ravages. Un incendie horrible acheva d'anéantir cette triste cité en 1463, durant le séjour qu'y faisait le roi Louis XI. Il fallut pour relever quelque peu Toulouse, lui remettre, pendant cent ans, ses impôts que sa misère ne lui permettait plus de payer. Pour comble de maux, la peste reparut encore avec la disette , sa compagne inséparable; des inondations extraordinaires, et qui surgirent tout à coup du sein de la terre sans cause apparente, ajoutèrent à ces fléaux. Les maladies contagieuses se perpétuèrent pendant près de deux siècles avec de faibles interruptions, tant alors l'ignorance était grande, les lois sanitaires sans vigueur, et l'administration insouciante sur les points les plus importans.

fut

Pour adoucir en quelque sorte la peinture de ces temps désastreux, nous ferons observer à nos lecteurs que ce dans les trois ou quatre dernières années du quinzième siècle que mourut la célèbre Clémence Isaure. Plusieurs années auparavant elle avait, par ses largesses, relevé le college de la Gaie Science, menacé d'une entière destruction l'incurie des magistrats municipaux. Animée d'une noble ardeur pour les lettres, qui allégea dans son coeur la tristesse d'un amour malheureux, elle institua les Jeux Floraux. En créant des fleurs nouvelles d'or et d'argent, elle voulut se survivre dans ses bienfaits, et par son testament elle laissa de grands biens à la ville, à la charge par celle-ci de fournir à tous les frais de la célébration des Jeux.

par

Ses intentions, quoique souvent attaquées par la malveillance, furent exactement exécutées. En vain des esprits jaloux de sa gloire cherchèrent à nier son existence, des preuves multipliées les ont confondus. Elles sont aujourd'hui irrécusables; "et lorsque maintenant nous possédons une partie de ses ouvrages littéraires, il n'est plus permis de douter qu'elle ait vécu : ses ennemis les plus zélés sont également forcés de reconnaître son existence autant que celle de ses bienfaits.

Dans le commencement du règne de François I en 1515, le parlement réforma l'université de Toulouse: cette insti tution remontait au temps des comtes; elle jouissait de grands priviléges peu en harmonie avec le repos des citoyens. Elle se glorifiait d'avoir vu sortir de son sein quatre papes, douze cardinaux, et un grand nombre de prélats, de magistrats, de savans, de professeurs, qui la rendirent célèbre dans toute l'Europe. Les écoliers qu'elle formait devaient porter une tunique ouverte, une soubreveste fermée, un corset sans manches, un capuchon, des mitaines, des brodequins, et tous ces habits ne devaient pas coûter plus de vingt à vingt-cinq sous tournois.

Durant ce nouveau siècle, la peste recommença ses terribles ravages. La prise du roi à Pavie en 1525 fut le complément de toutes les calamités de la France en général, et de Toulouse en particulier. Il fallut songer à fortifier la ville; l'alarme y devint générale, dans la pensée que les Espagnols, franchissant les Pyrénées, voudraient la réduire sous leur pouvoir. Ces maux étaient grands sans doute, mais de plus terribles se préparaient.

A cette époque le lutheranisme infesta l'Europe; son apparition en deçà des Alpes ramena la guerre civile dans le royaume, augmentée de toutes les fureurs auxquelles le fanatisme peut donner naissance. Les bûchers éteints dans le

sang des Albigeois, se rallumèrent; les familles furent divisées; les Huguenots, oppressés parce qu'ils avaient voulu lutter contre la religion dominante, se lassèrent de l'être; ils coururent aux armes, et le royaume et le Languedoc furent parcourus par des insensés qui déchirèrent leur propre patrie.

Sur ces entrefaites, François I, délivré de ses chaînes,

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