construire à Dijon, avec une somptuosité digne de sa puissance. Des agrandissements successifs, dùs aux libéralités de ses successeurs et des particuliers, en firent un établissement considérable dans la suite. Les religieux paraissent y avoir été, dès l'origine, en assez grand nombre, car plusieurs essaims en sortirent bientôt '. La première colonie de Dijon fut très-probablement la maison de Tonnerre. Cette maison fut fondée, selon les historiens locaux, par Eudes III lui-même, vers 1209, au faubourg Bourgberault. On ignore les circonstances qui déterminèrent cet acte et les conditions dans lesquelles il fut accompli, car tous les anciens titres de cet établissement ont disparu. Cet hôpital vit plus tard son développement entravé par l'érection du célèbre Hôtel-Dieu des Fonte 'Histoire ms de l'hôpital de Dijon, par le frère Calmelet, chap. I. * G. Jolivot, Etat généraux de 1576. Recherches sur l'assemblée des habitants de Tonnerre. Auxerre, 1876, p. 69. nilles (1293), dû à la munificence de la reine des Deux-Siciles, Marguerite de Bourgogne '. Au mois de mai 1215, Henri, seigneur de Fouvent-leChâtel, donnait au maître de Dijon l'hôpital qu'il venait de construire en ce lieu. Dans sa charte de fondation, il abandonne aux frères et aux pauvres de sa maison les meix adjacents; il leur assigne par chaque année deux muids de grain, moitié froment, moitié avoine; il leur abandonne les langues de tous les animaux qui seront tués dans son bourg; plus l'usage dans les bois, les champs et autres biens de la terre; plus deux hommes avec leurs familles, désignés et pris entre ses justiciables; plus les revenus des foires qui se tiendront à la fête des apôtres S. Pierre et S. Paul; plus les mets et autres restes qui sortent de dessus sa table et de celle de ses successeurs ». Dans le même acte, Henri de Fouvent ratifie la donation qu'avait faite à la maison de Dijon, au mois de mai précédent, Girard d'Achey, du fief de Diélosse, avec la justice, les bois, terres arables, prairies, four banal et moulin, le tout mouvant de la seigneurie de Fouvent. On ignore la date précise où l'hôpital de Bar-sur-Aube fut fondé mais ce fut vraisemblablement vers la même époque, car une bulle d'Alexandre IV le cite en 1256. Ces trois maisons n'ont jamais cessé d'appartenir au commandeur magistral de Dijon, qui les entretenait de frères et en nommait les recteurs '. << Un pieux chevalier, nommé Jean de Montferrand, introduisit à Besançon les religieux de Montpellier et leur assigna, dans le bourg, un vaste terrain, franc de toute servitude...... On attribue généralement cette fondation à 'C. Dormois, Notes historiques sur l'hôpital de Tonnerre. Auxerre, 1853. Histoire ms. de l'hôpital de Dijon, par le frère Calmelet, chap. I. Pièces justif., no XI. Hist. ms. de Dijon, chap. I. Voy. l'année 1203; elle est, à coup sûr, antérieure au 30 août 1207, époque précise de la mort de Jean de Montferrand' ». Les comtes de Bourgogne reçurent les frères du Saint-Esprit avec faveur et les dotèrent de privilèges, de rentes et de terres; mais ce fut surtout chez la classe moyenne, dans la bourgeoisie et la commune, qu'on leur fit le meilleur accueil « La plupart fils de bourgeois ou d'artisans, toujours en contact avec les gens du peuple, auxquels ils se consacraient tout entiers, ces religieux mendiants conquirent de suite leurs sympathies, et, chose singulière, durent à leurs libéralités la plus grande partie de leur dotation. C'est ainsi que se fonda l'hôpital conventuel le plus important de France, siége habituel des visiteurs généraux et gardien, jusqu'à la fin, de la régularité de la discipline, alors que la plupart des autres avaient succombé au relâchement. La maison fut bientôt peuplée d'un grand nombre de frères et de sœurs, heureux de se dévouer à une si belle œuvre; la noblesse fut prise du même enthousiasme, et le tropplein de l'hôpital de Besançon ne tarda pas à s'écouler non seulement dans toute la Franche-Comté, mais dans les Vosges, la Lorraine et la Suisse romande. << Un pieux bourgeois de Gray, nommé Girard d'Arc, fit, au mois de février 1238, donation au Saint-Esprit de Besançon d'une maison, meix et dépendances, situés sur les bords de la Saône, non loin d'une des portes de la ville, entre la rue du Pont, la maison du garde-pêche et les murailles de Gray. En reconnaissance de ce bienfait, frère Benoît, alors maître de l'hôpital de Besançon, s'engagea à fournir au donataire, à sa femme et à ses enfants, les vêtements et la nourriture comme aux autres religieux du Saint-Esprit, s'ils faisaient profession dans l'Ordre, soit à Gray, soit ailleurs. » Le recteur de Besançon « prit de 'A. Castan, Notice sur l'hôpital de Besançon, I, p. 162. ⚫ J. Gauthier, Notice sur l'hôpital de Gray, p. 2. suite possession de la maison de Girard d'Arc. L'hôpital du Saint-Esprit de Gray était fondé. ' » Fig. 8. Hôpital du Saint-Esprit de Gray, d'après un ancien dessin (1640). Poligny dut apparemment aux comtes de Bourgogne sa colonie de frères. La petite ville de Neufchâteau en fut dotée par son souverain, le duc Mathieu II de Lorraine (1236). La construction des bâtiments fut terminée seulement en 1261, ainsi que l'atteste une inscription encore conservée. Ces deux maisons devaient avoir, seules, hélas! le glorieux privilège de perpétuer le nom de l'Ordre jusqu'à nos jours. Ce fut dans les mêmes circonstances à peu près qu'on vit s'élever les maisons hospitalières de Dole, Chaussin (1239), Vaucouleurs (1270), Toul (1238), Saint-Lieffroy (1225), les Longeaux, etc. Toutes ces fondations, effectuées à très peu d'intervalle, témoignent de la faveur prodigieuse avec laquelle l'Ordre fut accueilli dans ces 'J. Gauthier, ibid., p. 3. Nous renvoyons, pour les preuves de ces fondations, ainsi que de toutes celles qui vont suivre, aux notices spéciales qui terminent l'ouvrage. provinces et la vitalité puissante de la maison magistrale de Besançon. Cette force d'expansion ne s'arrêtera qu'au XVe siècle, alors que partout ailleurs les maisons encore debout auront grand'peine à se maintenir. A l'autre extrémité du territoire, la maison conventuelle d'Auray devient un centre non moins important. Nous ignorons l'année de son établissement; mais un bref d'Honorius III, du 23 novembre 1220, énumère jusqu'à vingt-deux hôpitaux de régions fort diverses, qui lui devaient l'existence. Au nombre de ces maisons, il faut citer celle de Coutances, fondée au mois de mai 1209, par l'évêque Hugues de Morville, avec le concours du chapitre, en faveur des pauvres, des enfants trouvés, des matelots et des pèlerins qu'attirait le sanctuaire du Mont-SaintMichel'. Cette fille d'Auray devint, elle aussi, le centre d'une province normande d'établissements hospitaliers, grâce au concours de la confrérie de l'Ordre, fondée simultanément pour lui servir d'appui. Nantes, SaintMalo, Mayenne, Saint-Girons, Montmorillon, SaintJean-d'Angely, Millau, Libourne, Bergerac, étaient les principales dépendances d'Auray, tandis que Saint-Lô et Valognes se rattachaient à Coutances. Pour suivre un mouvement si puissant et si rapide, il faudrait parcourir la France entière et montrer, au centre, Angers avec ses quinze suffragants; au midi, Aix, Agen, Toulouse, Montauban, Bordeaux, Angoulême, Vienne, Arles, Nîmes, Narbonne, Grenoble, Fréjus, Draguignan, Clermont, le Puy, etc., foyers féconds qui propagent l'Ordre partout autour d'eux. Mais comment énumérer tous ces asiles charitables, qui s'élèvent et germent comme par enchantement sur le sol de la France? Du nord au midi, ' Gallia Christ, t. XI, col. 253, Instrum. XXVII. * Hist. ms de l'hôpital de Neufchâteau, par l'abbé Renard, chap. VII. |