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«La plaine choisie pour la revue est comprise entre le canal de la Haute-Marne et la Marne. Des bois immenses l'entourent.

Au milieu de cette plaine s'élèvent les tribunes; celle du milieu est réservée au Président de la République ; d'autres, à droite et à gauche, sont destinées aux sénateurs, députés, membres du Conseil général, aux autorités civiles du département, aux membres de la presse et à quelques rares privilégiés.

La revue commence ..... Le spectacle est merveilleux.

Les chasseurs de la 1re division, les dragons, l'artillerie à cheval et les deux brigades de cuirassiers au trot et au son des trompettes, dans un nuage de poussière qui rend la chevauchée absolument fantastique. Des salves d'applaudissements éclatent partout; elles redoublent à la vue des immenses carrés formés par l'infanterie de ligne, hérissée de baïonnettes, véritable forêt d'hommes et d'armes.

L'impression produite par ce spectacle est absolument unique. En admirant la belle tenue et l'aspect martial d'une partie de notre armée, on était comme fasciné.

Le défilé des quatre corps d'armée, et des brigades de chasseurs à pied et d'infanterie de marine, représentant l'armée ennemie, s'est terminé par la charge des seize régiments de cavalerie, avec leur artillerie, qui ont fait au galop un parcours de deux kilomètres, pour venir s'arrêter net à quelques pas des tribunes.

Le spectacle a été si grandiose que les assistants, paralysés, n'ont pas eu la force d'applaudir. Beaucoup pleuraient de joie patriotique.

A partir de sept heures, les troupes commandées par le général Saussier commençaient à déboucher de tous les côtés en tenue de campagne.

Le corps qui a figuré l'ennemi se montre le premier vers l'est; un quart d'heure plus tard apparaissent les 5o et 7o corps, le 5° à l'ouest, le 7 à l'est; à sept heures et demie, le 6 et le 8° corps se montrent également vers l'est. Enfin, à huit heures, on aperçoit la 1re division de cavalerie à l'est et la 5° à l'ouest.

Après un court repos, les troupes se portent sur le front de la

revue.

Un peu avant neuf heures, elles sont toutes en place et forment sept colonnes.

L'ensemble de ces sept colonnes donne 114 bataillons d'infanterie, dont 96 de ligne, 12 de chasseurs à pied et 8 de marine; 92 escadrons de cavalerie, dont 16 escadrons de cuirassiers, 36 de dragons, 32 de chasseurs et 8 de hussards, 404 pièces d'artillerie, dont 300 montées et 104 à cheval.

A neuf heures précises, le canon donne le signal de l'arrivée du Président de la République.

M. Carnot est dans un landau altelé à la Daumont ; il a près de lui M. de Freycinet. A la portière de droite et à la portière de gauche se tiennent le général Saussier et le général de Miribel, l'épée à la main.

Le Président de la République, débouchant par la gauche du front de bataille, passe la revue des troupes et gagne ainsi la tribune qui a été élevée à son intention sur un point d'où la vue s'étend très loin sur l'immense plaine qu'enveloppent la Marne et le canal.

Aussitôt la revue passée, la cavalerie se met en mouvement et passe au grand trot.

Les 3o, 6o, 7 et 8e corps défilent ensuite dans l'ordre indiqué, le 5o corps étant suivi du ballon, qui excite, on le pense bien, la curiosité publique. La vue de ces masses, qui ne forment pourtant pas le quart de ce que seraient des corps d'armée mobilisés, donne une impression de force extraordinaire. Il est peut-être monotone de voir se reproduire quatre fois le même spectacle, mais cette répétition même est l'expression de l'homogénéité parfaite et de l'unité qui règnent dans notre armée. Il y a, certes, des différences entre ces corps: mais elles s'effacent devant l'intime cohésion qui fait d'eux un seul tout.

Les bataillons de chasseurs et les bataillons d'infanterie de marine, qui venaient les derniers comme troupes ayant figuré l'ennemi, étaient peut-être plus sémillants que les régiments d'infanterie de ligne; mais ils sont loin de faire naître au même degré que ceux-ci le sentiment de la puissance de notre armée.

La charge de la cavalerie et de l'artillerie à cheval, qui a terminé cette solennité magnifique, en était la digne clôture.

Au moment où elle s'effectuait, le câble du ballon était détaché et l'aérostat faisait une ascension libre.

Le Président de la République est alors descendu de la tribune. devant laquelle étaient rangés les militaires appelés à recevoir une décoration; les deux commandants des armées, les généraux Davout et de Galliffet, ont reçu la médaille miiitaire, la plus haute des récompenses qu'il soit possible de leur accorder.

Après la revue, M. le Président de la République a offert à l'Hôtel-de-Ville de Vitry un déjeuner de 180 couverts aux généraux et aux officiers étrangers.

Au dessert, M. Carnot a prononcé le toast suivant, que tout le monde a écouté debout:

Les belles manoeuvres de 1891, dont il y a quelques jours, sur le terrain même des opérations, la parole éloquente de M. le ministre de la guerre précisait devant vous le but et la portée, se sont aujourd'hui terminées par une revue, qui est leur digne couronnement.

L'armée a montré une fois de plus ce que la France peut attendre d'elle, et le pays entier, qui l'a suivie avec un intérêt passionné pendant tout le cours de cette épreuve, lui est reconnaissant d'avoir justifié sa confiance et son affection.

Dans sa clairvoyance, le peuple sait ce qu'il doit à cette admirable école de dévouement, d'abnégation, de discipline et de patriotisme, qui est devenue l'école de tous; il sait que, si la calme fermeté, la sagesse, la loyauté internationale peuvent gagner au pays de sincères amitiés, une confiance justifiée dans ses ressources est un gage de la paix qu'il ne veut pas voir troubler. Depuis le simple soldat, si vaillant, si alerte, jusqu'aux plus hauts chefs, qui rivalisent de dévouement et d'activité, l'armée nous donne cette confiance. Je me fais, au nom du gouvernement de la République, l'interprète des sentiments de la France entière, en la remerciant et en levant mon verre en son honneur. >

ACADÉMIE DE Reims. Séances des mois de janvier et février 1892. Les quatre premières séances de l'année ont été bien remplies. Celle du 8 janvier a été consacrée à un compte-rendu par M. Plançon de l'oeuvre posthume de Michelet, intitulée Rome. Ce volume, écrit par l'auteur, en 1829, et publié récemment par sa veuve, contient de nombreuses pages que tous peuvent admirer sur les mœurs italiennes, sur les beautés de la nature, et particulièrement sur les chefs-d'œuvre de la peinture et de la sculpture.

Dans les séances des 22 janvier et 26 février, M. Demaison a présenté son étude, encore inédite, fort importante par ses découvertes et ses aperçus très nets, sur les architectes de la cathédrale de Reims, depuis le commencement du XIe siècle jusqu'à la fin du xve. Libergier et Robert de Coucy sout définitivement éliminés en tant qu'inspirateurs du plan primitif du monument. Le premier maître de l'œuvre paraît avoir été Jean d'Orbais, qui construisit le chevet et traça probablement le plan général.

- M. le président Ponsinet a fait une communication, le 12 février, sur la commune de La Neuville-au-Pont, près SainteMénehould, et a indiqué l'existence de chartes et d'autres anciens documents qui y sont conservés à la cure.

Le même jour, M. Lamy, architecte, a lu un travail approfondi sur la question des logements ouvriers en général et sur les tentatives faites à Reims pour en créer dans les meilleures conditions.

S'inspirant des principes posés avec tant de compétence par M. l'ingénieur Cheysson, M. Lamy a exposé bien des questions intéressantes et actuelles sur le maintien de la santé publique et sur l'amélioration de la vie de famille. Le même membre a décrit ensuite les beaux restes d'architecture gothique, mis au jour, l'an dernier, à Reims, dans une maison de la rue de Sedan.

Dans la séance du 22 janvier, M. Jadart a analysé les publications de l'Académie de Rouen en 1889-90, et fait connaître les

notices de M. l'abbé Porée sur Robert Nanteuil, l'immortel graveur rémois; de M. de Beaurepaire, sur les juges du procès de Jeanne d'Arc; et de M. l'abbé Sauvage, sur les souterrains fabuleux de la cathédrale de Rouen. Le même membre a donné, dans la séance du 26 février, un coup d'œil général sur la sigillographie des Sociétés savantes, en décrivant les sceaux, attributs, emblèmes et devises d'un grand nombre d'entre elles.

H. J.

SOCIÉTÉ HISTORIQUE ET ARCHÉOLOGIQUE DE CHATEAU-THIERRY (Séance du 2 février 1892).

I. On se rappelle qu'en 1891, M. Fr. Moreau a découvert dans le parc de Fère-en-Tardenois un mors antique assez semblable à un autre mors qu'avait trouvé M. Morel sur les bords de la Noblette, dans les plaines catalauniques, et que cet archéologue avait dénommé «< mors asiatique », dans la pensée qu'il pouvait avoir servi à la cavalerie d'Attila (suprà, p. 516, note 1). La comparaison entre ces objets est à l'ordre du jour de la séance.

II. Moulin analyse quelques-uns des faits relatifs à l'histoire de Montreuil-aux-Lions (canton de Charly).

III. La Société a reçu de M. Berthelé la description du monument de Jean de La Fontaine, au Ranelagh de Passy, par M. J. Legrand, avec gravure de Thiriat (Extrait du Magasin pittoresque); de M. David: « Notice descriptive de la commune de Fresnes » ; de M. Mauge, de Chézy-l'Abbaye: deux assignats, l'un de 25 I, l'autre de 25 sols.

M. Elisée Briet communique trois pièces d'argent, de Philippe le Bel, dont une à fleur de coin.

Dans l'une des dernières séances de la Société d'archéologie de Seine-et-Marne, réunie à Me!un sous la présidence de M. G. Leroy, M. Aubergé a donné lecture d'une Etude sur le traité de paix conclu à la Tombe, près Montereau-fault-Yonne, en 1418.

Après sa lecture, pleine de documents et d'appréciations intéressantes, M. Aubergé a présenté quelques fossiles de la craie, trouvés à La Tombe, et quelques outils de l'âge de pierre, recueillis dans la même localité où ils abondent..

On a écouté avec non moins d'intérêt une lecture faite par M. G. Leroy, sur un portrait de la femme du surintendant Foucquet, qui est dans l'église de Courtry, près Melun. Madame Foucquet, Marie-Madeleine de Castille-Villemereuil, ne semble avoir jamais eu de portrait, tandis que les traits du surintendant ont été souvent reproduits par les principaux artistes, peintres et graveurs du temps. Cette Marie-Madeleine, peinte par Le Brun, pour

l'église de Maincy, aurait échappé à un auto-da-fé de l'an II et se trouve aujourd'hui dans l'église de Sivry-Courtry, canton du Châtelet-en-Brie (Seine-et-Marne).

M. Alexandre Tausserat, de Vinay (Marne), archiviste-paléographe, attaché au Ministère des affaires étrangères, vient d'être nommé officier d'Académie.

n'a

M. Alexandre Tausserat, pour qui l'histoire de la Champagne pas de secrets, est un de nos plus zélés collaborateurs. Amateur passionné des arts, il publie chaque année, dans notre Revue, une chronique du Salon où il rend compte avec un talent incontesté des œuvres envoyées par les artistes champenois.

La distinction honorifique obtenue par M. Tausserat était des plus méritées. S. T.

Parmi les soldats qui se sont distingués au Tonkin, lors de la prise de Xon-Ma, le 27 septembre dernier, nous sommes heureux de relever le nom d'un de nos compatriotes, M. Didrel, de Reims, sous-lieutenant au 2me tonkinois.

A la suite de cette affaire, M. Didrel a été cité à l'ordre du jour en ces termes :

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« A conduit sa section au feu avec une extrême vigueur le 21 septembre 1891, au combat de Xon-Ma et, au moment de l'assaut, est entré le premier dans le repaire.

A fait preuve d'un sang-froid et d'une énergie remarquables, en tuant de sa main un Chinois qui l'avait manqué d'un coup de fusil tiré à bout portant. »

Cimetière Gallo-ROMAIN A ORMES (Marne). — Le village d'Ormes, à une lieue de Reims, n'avait donné lieu, jusqu'ici, à aucune découverte. L'établissement d'une briqueterie, à proximité des dernières habitations, lieudit Les Chapelles, a mis au jour, récemment, plusieurs vases antiques en terre, d'une forme et d'une facture assez grossières. L'un d'eux a été offert au Musée de Reims par M. Labassée, propriétaire du terrain.

Nous avons vu, chez un habitant d'Ormes, d'autres vases et divers objets trouvés dans les mêmes fouilles, spécialement trois monnaies romaines : l'une de Domitien, l'autre d'Hadrien, et la troisième avec le mot Roma. Il nous paraît en résulter que ce cimetière remonte à l'époque romaine, ce qui n'a rien d'étonnant dans cette région. La plaine de Reims comptait de nombreux établissements agricoles, avant comme après la conquête, et l'étymologie du nom du village d'Ormes, Ulmis, confirme notre idée.

H. J.

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