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a vu, de 1627; celui de Hans Ruckers, du musée archéologique d'Anvers, date de 1611, et celui d'André Ruckers, au même établissement, porte 1613.

D'autres instruments des mêmes facteurs ont été examinés par nous, et nous n'avons pu découvrir que les trois modules donnés, en grandeur naturelle, en regard de cette page.

Les inscriptions, toutefois, varient entr'elles. Notre clavecin porte: JOANNES (la rosace donnant J-R) RVCKERS FECIT ANTVERPIÆ. L'instrument de M. Pigeory fournit, en plus, l'accusatif ME, avant le verbe FECIT. Celui de Hans Ruckers, du musée d'Anvers, présente littéralement la même légende que celle figurant sur notre clavecin, c'est-à-dire la légende qui commence par JOANNES. La rosace était marquée H-R, il en résulte que c'est à cette marque de fabrique que l'on doit se rapporter pour distinguer les œuvres du père et du fils; car, autre fait à constater, l'instrument de Paris qui est de 1590, donne HANS, au lieu de JOANNES. Voilà deux inscriptions du même auteur qui ont l'air de se contredire. La rosace éclaircira le tout (').

Des nombreux clavecins d'André Ruckers qui se rencontrent encore (2), deux seulement ont conservé leur inscription: celui de Londres, sur le quel ont lit: ANDREAS RUCKERS ME FECIT ANTWERPIÆ, 1651; et un autre de 1634, qui se conserve dans un obscur village de Flandre. Les trois types de rosaces admis, malgré les différences

(1) Les initiales à jour des rosaces, qui ne tiennent qu'à un fil, pour ainsi dire, sont exposées malheureusement à une détérioration très-rapide.

(2) La plupart étant incomplets, celui-ci pour le clavier, celui-là pour le couvercle, un autre pour la table d'harmonie, les antiquaires s'en soucient mediocrement et dédaignent d'en encombrer leurs magasins. De là vient que l'un après l'autre sont mis en pièces par leurs propriétaires, et servent à allumer leurs poëles. Qu'est devenu, par exemple, celui qui se trouvait jadis au couvent d'Hanswyck à Malines? Voy. GÉNARD, Revue d'histoire et d'archéologie, t. 1, p. 462.

des inscriptions, on peut nettement distinguer les œuvres qui appartiennent au père, de celles qui concernent le fils. Du reste, le fils n'a jamais pris le nom de Hans, ni dans la marque de fabrique, ni dans les inscriptions. Les comptes seuls, dont nous avons publié des extraits, assignent indifféremment au père et au fils le nom de Hans.

André, le vieux, ou André, le jeune, fils du premier, ont-ils eu la même rosace, les mêmes procédés de fabrication et de décoration? Toujours est-il que les clavecins, portant les initiales A-R, offrent entr'eux fort peu de différences. Ceux disposés en forme de harpe, ont la physionomie moins gracieuse, moins régulière et plus lourde, que les instruments similaires de Hans et de Jean.

Il sont tous recouverts, à l'intérieur, de papier peint, portant au couvercle des devises ornées de fleurs, d'animaux et d'autres enjolivements peu artistiquement disposés. Du papier, à dessins noirs et blancs, couvrent les parois entourant le clavier, ou les claviers, car certains instruments ont des claviers superposés. L'extérieur de la caisse est peint en brun, avec quelques grossiers fleurons et encadrements blancs. Celui de Londres est exceptionnellement en noir.

Le plus ancien de ces instruments, celui du musée d'Anvers, date de 1613; le moins vieux est celui de Londres, qui remonte seulement à 1621. Nous avons lieu de croire que celui-ci appartient à André Ruckers, le jeune. A priori, le style accuse certaines différences. En confrontant les dates, on obtient l'âge de 72 ans pour André, le vieux, et l'âge de 44 ans pour André, le jeune. Le premier devait, en 1651, avoir cédé le commerce des clavecins à son fils. En outre, selon Fétis, Franck ornait les instruments du fils d'André Ruckers de fleurs et d'animaux. Cela se remarque sur le clavecin de Londres.

Le petit clavecin carré que nous connaissons de ce maître (le vieux ?) est le seul de ses instruments qu'il nous ait été permis d'apprécier convenablement, sur le rapport

de la sonorité. Cette sonorité est distinguée, précise et vigoureuse, vu les moyens mécaniques employés pour l'obtenir. Nous avons été surpris autant que charmés, à l'audition de cette épinette. Rien d'étonnant, d'après cela, si Burney, qui n'estime pas beaucoup les grands clavecins d'André, ait fait une réserve, quant aux instruments de petite dimension de ce facteur (').

Traduisons ici la description du clavecin du South Kensington museum, due au chef de la famille Broadwood, qui a fait généreusement don de l'instrument au gouvernement anglais. Ce que cet éminent facteur de pianos, qui est en même temps un habile archéologue, dit de la sonorité du clavecin que mania Hændel, s'applique généralement à tous les clavecins du xvIIe siècle. Delà résulte qu'une étude acoustique de ces vénérables reliques devient presque une impossibilité. Tout au plus nous est-il donné d'apprécier leur mécanisme, qui, à quelques détails insignifiants près, est identique. D'ailleurs, sur cette matière, Hullmandel et d'autres ont écrit des choses qui ne sauraient être amendées.

« Cet intéressant souvenir de Hændel est aussi digne d'attention, en ce qu'il est un des instruments les mieux construits sortant des ateliers des célèbres manufacturiers, la famille Ruckers d'Anvers. Il n'est remarquable par aucune beauté de décoration, sauf l'ornementation conventionnelle de l'époque; mais la structure montre beaucoup d'art dans la manière de faire, et par là l'on voit que le clavecin était presque à l'état de perfection, au XVIIe siècle.

« Les deux claviers étaient employés pour obtenir plus de variété dans les tons. Le plus bas, muni de marteaux frappant sur deux jeux de cordes, dont l'un était accordé une octave plus haut que l'autre, était le plus élevé en ton; le clavier supérieur, n'opérant que sur un jeu de cordes, était

(1) Voy. La musique aux Pays-Bas, t. 1, p. 194 et 195.

le plus bas. Mais le clavier inférieur pouvait n'agir que sur une rangée de cordes, au moyen de clefs que le musicien ôtait. En touchant les notes, on reconnaît une qualité de son particulière, notamment dans le haut, et un timbre incisif, mais doux et délicat, témoignant de la beauté primitive de l'instrument.

« On peut supposer que les touches ne sont pas du temps de Hændel. Nous ignorons par qui les claviers qui existent maintenant ont été mis, ni quand, mais la mode des touches blanches et noires est indubitablement moderne ('). On ne peut douter qu'il n'y ait eu des touches proportionnées au reste du clavecin; nous pouvons supposer qu'elles ont été usées, pour donner une raison à la substitution de celles qui existent.

« Le corps de bois, verni en noir, les charnières de cuivre, les ornements et les devises, sont dans le style de l'époque. A l'intérieur du couvercle est écrit: SIC TRANSIT GLORIA MUNDI, sur le battant du haut: MUSICA DONUM DEI, et sur la bande étroite de bois, au-dessus des touches supérieures: ANDREAS RUCKERS ME FECIT, ANTWERPIÆ, 1651. Sur la planche d'harmonie, on lit 1651, et, dans la rosace ornementale, les initiales A-R.

« Parmi les fleurs représentées sur la table d'harmonie, on voit un concert de singes; l'un bat la mesure, un autre joue de la viole de gambe, etc.

« Une troisième devise existait, il y a à peu près quinze ans: ACTA VIRUM PROBANT. Elle fut effacée par un ouvrier occupé à raccommoder la planche (munie de cette devise) où se trouvait la serrure, et qui avait été fendue.

<< Comme instrument, ce clavecin a vécu. On ne sait plus l'accorder, et tout essai de ce genre pourrait devenir désastreux, car la planche d'harmonie céderait. C'est

(1) Ceci n'est pas exact. Les touches du clavecin de Jean Ruckers de 1627, dont l'authenticité ne saurait être contestée, sont blanches et noires.

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