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30 Avant l'incendie de nostre monastère, nous estions 24 religieux; depuis l'incendie nous sommes quinze.

40 Nous n'avons d'autres revenus que la charité des habi

tans.

50 Point de charges, parce que nous n'avons aucunes

rentes.

Voilà l'état au naturel de nostre couvent, qui est très pauvre 1.

Je suis avec respect, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Frère JACQUES, gardien des récolés.

1. Il ne sera pas hors de propos de placer ici quelques pages d'un livre. assez rare, « Notice ou abrégé historique de la fondation des couvents des récollets de la province de l'immaculée conception en Guyene. A Limoges, de l'imprimerie de P. Chapoulaud, place des Bancs, MDCCLXXVIII. » Nous en avons publié, t. x, 152, ce qui concernait les Sainte-Claire de Saintes.

« Réunion des couvents d'Oleron, de Brouage, de Cognac et de Saintes, faite en 1613, à la custodie d'Aquitaine. L'an 1613, le 10 août, le père Pierre Chamborest étant custode pour la seconde fois, on tint à Bordeaux une congrégation générale ; on accepta les quatre couvents de Saintonge, savoir: Oléron, Brouage, Cognac et Saintes, dont la cession avoit été faite dès le second du mois de juin de la mesme année. Pour en rendre la possession plus solide, on fit intervenir l'autorité du cardinal de Sourdis et de l'évêque de Saintes, auxquels il appartenoit, par la bulle de Clément VIII, de donner aux custodies les plus proches les couvents où l'on avoit introduit la réforme. Cette cession fut encore confirmée, l'année suivante, par le vicaire général de l'ordre.

Il ne seroit pas possible de comprendre cette acceptation et cette cession, si nous ne remontions plus haut. Il faut donc savoir qu'environ l'an 1610 deux religieux de Paris, animés d'un saint zèle pour la conversion des calvinistes, vinrent en Saintonge, où l'hérésie étoit plus puissante que dans les autres provinces du royaume. L'un se nommait Bernardin, l'autre Antoine; leurs noms de famille ne sont pas parvenus jusqu'à nous; on les croit originaires de Normandie.

Etant arrivés à Saintes, ils se présentèrent à Mgr Nicolas Lecornu, qui en étoit évêque; c'étoit en 1610. Ce prélat qui avoit une grande moisson, et qui manquait d'ouvriers apostoliques, leur accorda la permission de travailler dans son diocèse. Pendant leur séjour à Saintes, ils firent connoissance avec M. Gombaud et M. L'aîné, tous deux habi

B.

A Saintes, ce 26 novembre 1723.

Monseigneur, pour réponse à votre seconde lettre j'auray l'honneur de vous dire qu'il y a cent dix ans que le roy

tants de Brouage; ceux-ci leur offrirent dans leur ville une maison et toute sorte de secours.

Encouragés par cette offre, ces pères partirent pour Brouage, où Mgr Timoléon d'Epinay de Saint-Luc, maréchal de France et gouverneur des îles de Saintonge, faisoit sa résidence. Ils prièrent ce seigneur de leur accorder sa protection pour la mission qu'ils alloient entreprendre; il la leur promit et les favorisa dans toutes occasions. M. Gombaud leur donna une maison et un jardin où ils demeurèrent quelque temps.

Le gouverneur, ayant remarqué qu'ils se rendoient tous les jours plus utiles au public, crut nécessaire de leur bâtir un couvent; il en écrivit à la reine, mère de Louis XIII et régente du royaume; non seulement elle lui en accorda la permission, mais elle voulut bâtir le couvent à ses propres libéralités, ce qui fut exécuté. L'église fut dédiée à saint Louis et les récollets furent mis en possession, l'an 1612, après avoir obtenu le consentement de l'évêque de Saintes.

Il n'étoit pas possible que deux religieux puissent fournir à une aussi vaste carrière; ils demandèrent du secours à leur custodie, et n'en ayant pu obtenir, ils s'adressèrent au P. Pierre Chamborest qui leur envoya des religieux, entre lesquels le P. Bernard Duverger et le P. Jean Desnover étoient les plus distingués. Le premier devint fameux dans les missions de la Saintonge, et eut l'honneur d'être connu de Louis XIII; le cardinal de Richelieu en faisoit l'éloge. Le second étoit le premier qui avoit enseigné la philosophie et la théologie dans la custodie.

Avec ces secours les P. P. récollets ne se bornèrent plus à la ville de Brouage; ils allèrent dans les lieux circonvoisins; ils passèrent à l'ile d'Oléron où les habitans paroissoient plus attachés à la nouvelle religion, et pour cette raison étoient plus difficiles à ramener dans le sein de l'église. Les cordeliers avoient eu autrefois un couvent dans le chateau d'Oléron; un seigneur de Pons en étoit le fondateur. Dès les premières guerres civiles, les huguenots l'avoient entièrement ruiné et avoient si cruellement maltraité les religieux qu'ils se crurent obligés de l'abandonner pour toujours.

Les récollets, disposés à tout souffrir pour la vraie foi, entreprirent cette mission. Ils trouvèrent quelques personnes qui leur furent favorables et qui leur donnèrent une maison pour faire leurs exercices. Mais voyant qu'ils ne pouvoient pas toujours l'habiter, ils formèrent le dessin de demander l'emplacement des pères cordeliers et d'y bâtir un couvent. Ils consultèrent M. le maréchal de Saint-Luc, qui approuva le projet et envoya M. L'ainé à Angoulême pour demander cet emplacement

Louis XIII nous établit à la citadelle de Xaintes; six ans après, sa majesté, ayant besoin de notre couvent pour y faire

aux pères cordeliers qui tenoient pour lors leur chapitre dans cette ville. Ces R. R. P. P. l'accordèrent; leur cession est de l'an 1611. Aussitôt on commença à bâtir un couvent. Le peu de catholiques qu'il y avait dans l'isle en firent toute la dépense.

Les huguenots, voyant cet établissement, en devinrent plus furieux; ils ne pouvoient souffrir que ces religieux combattissent leurs erreurs, ni qu'ils leur enlevassent quelques uns de leurs frères qui se convertissoient. Ils chassèrent les récollets et brûlèrent leur couvent, pendant les guerres de 1622. L'année d'après, Louis XIII ayant dompté ces rebelles, les récollets rentrèrent dans l'isle, et ils rebâtirent leur couvent, ainsi que nous l'avons remarqué dans notre tableau chronologique. S'étant trouvé trop près de la citadelle, on fut obligé de le transporter plus loin; on ne bâtit point d'église; ce ne fut que longtemps après que le père Florent André l'entreprit. Il réussit à faire un très beau vaisseau, qui est très commode pour les religieux et pour le public. Jusqu'alors on s'étoit contenté d'un oratoire, qu'on avoit dressé dans une aile du cloître. Lorsqu'en 1611 les récollets bâtissoient le couvent pour la première fois, le père Duverger fut donner une mission à Cognac, ville agréablement située sur la Charente; il étoit accompagné de plusieurs religieux. Les habitants, édifiés de leur zèle, voulurent les retenir et leur bâtirent un couvent, avec la permisssion de l'évêque de Saintes. Dame Guillemette de Limeur, épouse de noble Gabriel de Salcède, lieutenant général du régiment de Picardie, suffisamment autorisée de son mari, leur donna deux maisons et quelques petits jardins. La croix fut plantée, le 22 janvier 1612; monsieur Pierre Gay, maire de Cognac, tenoit un bout d'un ruban rouge attaché à la croix et M. de Salcède, l'autre bout. Nous apprenons, par un mémoire du P. Côme d'Albois, que ce couvent étoit très petit et borné par une rue qui fut fermée du consentement de M. d'Epernon, gouverneur de la province et de la ville. Le lieutenant général appointa la requête qui fut présentée à ce sujet : c'étoit en 1622, sous le gardienat du P. Bruno Chassain. Le peuple renversa les murailles pendant la nuit; elles furent relevées par l'autorité de M. d'Epernon, qui envoya ses gardes pour défendre les maçons.

L'an 1635, le P. Janvier Rousset ayant été fait gardien dans la dernière congrégation du trienne du P. Martin Carrier qui fut tenue â Cognac, il entreprit de faire un nouveau couvent plus grand et de bâtir une église, qu'il finit dans son trienne, avec les trois chapelles qui sont du côté de la rue, et le dortoir simple qui est le long de l'église; il ne fut aidé de personne qui mérite le titre de bienfaiteur que Mlle de Fanjaux, qui donna 1000 livres, à condition qu'on feroit bâtir une chapelle avec

des fortifications, nous donna 10,800 livres pour nous établir

droit de sépulture, ce qui fut accordé. M. le comte de Jonzac, lieutenant du roi en Saintonge, posa la première pierre de l'église, qui fut bénite par le même P. Janvier Rousset, le 3 septembre 1635.

En la susdite congrégation, M. de Reyniole, lieutenant criminel, demanda d'être reconnu pour fondateur, comme héritier de M. et Mme de Salcède. On examina les deux contrats qu'il produisit, et on n'y trouva pas l'obligation de les reconnoître pour fondateurs; il y avoit seulement celle de dire dix messes annuellement. Il fut débouté de sa demande.

Dans la même congrégation, M. Pierre Gay, lieutenant général de Cognac, demanda permission de faire bâtir une chapelle avec droit de sépulture pour lui et l'aîné des siens. Il donna 1,000 livres, et elle fut bâtie l'an 1638, sous le gardiénat du père Hilaire de Montlouis.

La maison noble de Saint-Orents, ou Aurents, a fait bâtir la citerne, et fondé une chapelle. Louis XIII a été le bienfaiteur de ce couvent.

Le R. P. Martial Hardy, prédicateur du roi et ancien provincial, l'a presqu'entièrement refait. Il y a un très beau corps de logis et un degré dont on admire la construction. Le père Gabriel Fraisseix avoit commencé.

Revenons à nos premiers missionnaires. Le P. Bernard Duverger vint prêcher à Saintes; il le fit avec tant d'applaudissements que les habitans souhaitèrent d'avoir des récollets dans leur ville. Monseigneur l'évêque, Nicolas Lecornu, leur donna l'église de Saint-Fremont, vulgairement Saint-Friont. On rapporte cet établissement à l'an 1615, ce qui ne s'accorde pas avec l'acte d'acceptation qui est de 1613. On conjecture que les récollets étaient déjà établis dans quelque maison de la ville en qualité de missionnaires; en effet, ils étoient d'abord venus à Saintes avant d'aller à Brouage.

L'église de Saint-Fremont étoit placée en un lieu élevé, près de la citadelle, un peu éloigné de la ville. Le duc d'Epernon, gouverneur de Saintonge, jugeant qu'il étoit nécessaire pour le service du roi d'agrandir la citadelle, prit toute la place destinée pour le couvent. Cet inconvénient obligea les récollets de se placer ailleurs; on leur donna un fond dans la ville, près la rivière de Charente; le nouveau couvent fut bâti en partie des libéralités de Louis XIII, et en partie de celles de Mgr Raymond de Montagne, évêque de Bayonne, qui fut enterré dans l'église en qualité de fondateur. Elle est dédiée à saint Bonaventure et possède une relique de ce saint docteur, qui y est en grande vénération. Mgr Jacques Raoul, évêque de Saintes, la sacra en 1630.

L'an 1719, ce couvent fut totalement réduit en cendres par un accident dont on n'a jamais pu savoir l'origine. On perdit dans cet incendie les mémoires précieux des missions de la Saintonge, qui auroient servi à l'histoire de la province. Le couvent fut rebâti peu de temps après ;

dans la ville 1. M. de Montagne, nostre fondateur, nous donna l'emplacement, où nous sommes depuis 106 ans ; je ne saurois vous fournir la date des lettres patentes de sa majesté: il y a cinq ans que le feu consuma tous nos titres avec tout le couvent. Nous sommes actuellement douze prestres, trois frères et un petit serviteur de messes. J'ai l'honneur d'être avec un profond respect, monseigneur, votre très humble et très obéissant serviteur.

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Pour répondre, monseigneur, à la lettre que vous m'avès fait l'honneur de m'écrire, je vous dirai :

10 Que notre monastère est de fondation royalle, bâti par

mais parce qu'on s'étoit servi des vieux fondements, on a encore été obligé de le réparer en 1757. Le R. P. Martial Hardy en a fait un très beau couvent. Le R. P. Chrisologue Volk, ancien provincial, y a beaucoup contribué.

Quoique ces quatre couvents, Brouage, Oléron, Cognac et Saintes, eussent été acquis par les soins et travaux du P. Bernard Duverger, la custodie d'Aquitaine n'y avoit aucun droit, puisque ce religieux et ses compagnons n'avoient été envoyés en Saintonge que pour secourir les PP. Bernardin et Antoine, qui avoient toujours conservé la qualité de supérieurs. Mais ceux-ci, reconnaissants du service qu'on leur avoit rendu et n'ayant pu obtenir aucun secours de leur custodie, ils entrèrent dans celle d'Aquitaine, à laquelle ils donnèrent les quatre couvents dont nous venons de rapporter les fondations. >>

L'ouvrage contient en outre des chapitres sur Saint-Léonard, 1594; Limoges, 1596; Saint-Junien, 1598, Saint-Jean de Luz et Ciboure, Libourne, Périgueux, 1611; Guéret, 1614; Confolens, 1618; Pons, 1623; Marennes, La Rochelle, 1628; Archiac, 1654, etc.

1. Briand, Histoire de l'église santone, II, 492, a donné quelques détails à ce sujet d'après un mémoire du syndic de l'hopital général contre Jacques de Léglise, curé de Saint-Pierre.

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