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Telle est, en résumé, l'origine de la taille des gens d'armes. Cet impôt à l'origine n'était pas permanent, mais il le devint peu à peu, les nouvelles troupes créées par Charles VII étant en fait devenues permanentes1.

Voilà du moins la théorie. Dans quelle mesure et comment les ordonnances et les règlements de Charles VII furent-ils appliqués? C'est ce que seules les monographies pourront nous apprendre. Voici en ce qui concerne Lyon et la région lyonnaise, ce que nous révèlent les documents. L'élection du Lyonnais et la seigneurie de Charlieu se virent imposer 3o lances, chiffre qui fut réduit ensuite à 27.

Leur chef fut d'abord Geoffroy de Couvran. Ce capitaine était assisté d'un lieutenant qui est tantôt Jean de Colodsan (ou Colodran) et tantôt Jean de Barandrain 3.

Les Gens d'Armes à Lyon. Quant à la ville de Lyon, elle dut loger 8 hommes d'armes et leur suite, c'est-à-dire 8 lances. Ce chiffre ne varia pas. Si la lance avait été toujours de 6 hommes et de 6 chevaux, ces 8 hommes d'armes auraient eu avec eux 48 hommes et 48 chevaux. Mais à Lyon, comme dans beaucoup d'autres villes, le nombre de 6 hommes et de 6 chevaux par lance fournie ne fut pas atteint, tant s'en faut. Voici la liste des hommes d'armes dont nous avons pu retrouver les noms avec l'indication du nombre d'hommes et de chevaux logés avec chacun d'eux. Richard de Les

1 Comme on l'a dit très justement, Charles VII n'a pas créé une armée permanente, un impôt permanent, mais une armée et une taille qui devinrent permanentes (V. Cosneau, le Connétable de Richemont.

2 D'après l'ordonnance de Luppé le Chastel (nous voulons parler de la copie de cette ordonnance conservée aux Arch. munic. de Lyon, CCC 290, no 18), le roi avait ordonné ceci : « Que es païs de Lyonnois et seigneurie de Charlieu seront logiez trente hommes d'armes et les archiers qui sont ensemble a trois personnes et trois chevaulx pour lance et pour deux archiers, trois personnes et trois chevaulx, IX personnes et autant de chevaulx ». Ce qui fait 180 personnes et 180 chevaux (V. ce texte dans l'édition de Documents relatifs aux réformes militaires des règnes de Charles VII et de Louis XI que nous préparons. C'est à partir de 1451 que le nombre des lances imposées à l'élection du Lyonnais fut ramenée à 27. On nous permettra de rapprocher ce chiffre de ceux fournis par M. Antoine Thomas. L'Auvergne fut taxée à 160 lances, dont 40 dans la Haute-Auvergne. Le Franc Alleu eut 3 lances. Le Haut et le Bas Limousin chacun 43, la Marche 18 (V. Thomas, les États provinciaux de la France centrale, t. I, p. 153). Geoffroy de Couvran portait les titres suivants : chevalier et capitaine des gens d'armes et de trait establis tant en ceste ville comme au pays de Charlieu ».

3 Voir CC 411, no 141, le mandement du 25 novembre 1446. Jean de Calodsan est mentionné avec ce titre dans une pièce du 5 février 1446 (V. CC 411, no 183). V. CC 411, n° 187, le mandement du 2 mars 1446. Dans cette pièce, le scribe écrit Calodron.

tuet garni de 3 hommes et de 3 chevaux 1»; Jean le Breton, garni de 4 hommes et de 4 chevaux 2»; Guillaume le Breton3; Roselin Vincent, «garni de 3 hommes et de 3 chevaux'»; Jean le Huc ou le Luz ou le Luc ou le Hut, «garni de 3 hommes et 3 chevaux3»; Aleyn le Vieulx François Vignier, garni « de 3 hommes et de 3 chevaux 6 »; Jean de Bretaigne, «< garni de 6 hommes et de 6 chevaux 7»; Jean le Loup. Ainsi, sur 8 lances, une seule était conforme aux règlements, celle de Jean de Bretaigne. Une d'elles avait 4 hommes et 4 chevaux. Toutes les autres, celles du moins sur lesquelles nous avons des renseignements, comptaient 3 hommes et 3 chevaux.

Nous ne savons rien des lances établies dans les autres pays l'élection lyonnaise.

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Leurs Hôtes. Plusieurs hôtes logeaient ces hommes d'armes. Nous citerons Guillaume le Faucheux, hôte de S' Julien, Jean et Antoine de Créchinnoys, dit Cordiers, hôtes de l'Escu de France 10; François Bonier 11, Jean Guigue, hôte de la Mule 12; Claude Pèrier ou

Voir CC 411, n° 156, le mandement du 6 avril 1447.

* Voir CC 411, no 172.

3 Voir CC 411, no 158, le mandement du 5 avril 1447.

4 Voir CC 411, no 155, le mandement du 5 avril 1446. — V. CC 411, no 155, le mandement du 5 avril 1446.- Il est probable que ces divers noms s'appliquent au même personnage, bien qu'un document mentionne Jean le Hut avec cette indication : « Garni de 2 hommes et de 3 chevaux ».

5 Voir CC 411, n° 155, le mandement du 5 avril 1446.

• Voir CC 411, no 159, le mandement du 5 avril 1447.

7 Voir CC 411, no 160, le mandement du 5 avril 1447.

8 Voir aux CC 411, no 166, le mandement du 7 février 1447 où il est question de Jean le Hut garni de 2 hommes et de 3 chevaux. C'est la seule mention que nous ayons rencontrée de ce genre. Elle ne prouvera certainement pas qu'il s'agit d'un personnage différent de celui mentionné plus haut (no 1).

9 Voir CC 411, no 170, le mandement du 7 février 1447 prescrivant de payer 2 livres 5 sols à Guillaume le Faucheux pour le logement de 3 hommes et de 3 chevaux octobre, novembre, décembre). V. aussi CC 411 la quittance du même en date du 3 mars 1447, de 9 francs. — V. CC 411, no 150.

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10 Voir CC 411, no 173, le mandement prescrivant de leur payer livres pour 4 hommes et 4 chevaux qui y séjournèrent 4 mois finissant au mois de janvier.

11 Voir CC 411, no 190, la quittance du 3 mars 1446, de 9 francs pour leur séjour durant 3 mois d'un homme « contenant 6 hommes et 6 chevaux ». — V. aussi CC 411, no 142, le mandement du 23 octobre 1446 prescrivant de payer 19 1. 10 sols à Bonier pour le lougiz et l'hostelage de 8 hommes et de 8 chevaux, pendant 9 mois et les despens de 9 jours en attendant leur paiement (la quittance est du 10 décembre ».

12 Voir aussi CC 411, no 146, le mandement du 23 octobre 1446 prescrivant de payer 8 livres pour 4 hommes et 4 chevaux durant 8 mois jusqu'au mois d'août inclusivement. — La quittance est du 22 novembre.

Claude Marion, hôte de l'Épée1; Jehan Ayguez, dit Chevalier, hôte du Mouton; Tévenète, sœur de Guigue Mercier 3; la veuve de Hugon Grant'.

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Leur Entretien. Les dépenses nécessitées par leur entretien étaient de deux sortes: 1° Les frais de leur «ostelage », payés directement par la ville aux hôtes, dont nous avons conservé les quittances; 2° leur solde payée par la ville, d'abord au capitaine des gens d'armes, puis à partir d'une certaine date, au Receveur des vivres des gens d'armes. Quand, pour une raison ou pour une autre, la solde n'était point payée à temps, la ville fournissait à

1 Voir CC 411, no 190, la quittance du 3 mars 1446, donnée par Claude Perier au Consulat de 9 francs reçus pour l'entretien d'i homme à 6 chevaux pendant 3 mois.

V. aussi CC 411, no 153, le mandement du 7 juillet 1446 prescrivant de lui remettre 14 gros pour le logement durant 1 jour et 1 nuit de 3 hommes et de 3 chevaux. La quittance est du 4 octobre. V. aussi CC 411, no 167, le mandement du 7 février 1447 prescrivant de lui payer 18 sous 9 deniers représentant les frais de 3 hommes et de 3 chevaux durant le mois d'octobre et 8 jours de novembre. La quittance est du 4 mars. V. CC 411, no 151. — V. CC 411, no 152.

2 Voir CC 411, n° 174, le mandement prescrivant de fournir 40 sous pour le supplément de logis de 4 hommes et de 4 chevaux durant les mois de novembre et de décembre. Au dos, la quittance du 22 avril. — V. aussi CC 411, no 143, le mandement du 25 novembre 1446 prescrivant de lui remettre 4 livres 10 sous pour l'ostelage de 6 hommes et de 6 chevaux (septembre et octobre passés). V. la quittance du 9 décembre.

3 Voir CC 411, no 174, le mandement prescrivant de fournir 30 sous pour le logement de 3 hommes et de 3 chevaux. Au dos, quittance du 10 février. V. aussi CC 411, no 144, le mandement du 4 décembre 1446 prescrivant de lui payer 3 livres pour l'ostelage de 6 hommes et de 6 chevaux (octobre et novembre). La quittance est du 13 décembre.

4 Voir CC 411, no 155, le mandement du 6 avril 1446 prescrivant de lui remettre 3 livres pour la « croyssance » des frais de 4 hommes et 4 chevaux pendant janvier, février et mars. Au dos, quittance du 31 mai.

5 Voir CC 411, no 171, le mandement prescrivant de payer 30 sols pour le supplé ment du 7 février 1447 des mois de décembre et de janvier). Quittance du 14 mars. -V. aussi CC 411, no 155, le mandement du 5 avril 1446 prescrivant de payer à Jean le Huc 6o sous pour le supplément de 4 mois. — V. CC 411, no 157, le mandement du 5 avril 1447 prescrivant à l'hôte du Lion de payer 3 livres tournois pour les dépenses faites pendant 2 jours par Jean le Loup, par Jean le Breton, etc. (en tout 9 personnes, plus 9 chevaux), en attendant le paiement des vivres et des gages des gens d'armes. La quittance est du 1er juin. — V. CC 411, no 158, le mandement du 5 avril prescrivant de payer 3 livres 11 sous 3 deniers à Berthet de Villenove pour le supplément de « l'ostelage » de Roselin Vincent (garni de 3 hommes et de 3 chevaux durant 3 semaines de novembre, décembre, janvier, février et mars. La quittance est du 12 juin. - V. CC 411, no 156, le mandement du 6 avril 1447 prescrivant de payer 30 sous à Richard de Lestuet (garni de 3 hommes et de 3 chevaux) pour l'accroissement d'ostel en février et en mars. La quittance est du 25 avril. — V. CC 411, no 166, le mandement du 7 février 1417 prescrivant de payer 4 livres to sols à Jean le Hut pour un supplément d'hostelage pendant 6 mois. La quittance est du 91 février,

l'homme d'armes un supplément qui représentait le montant des frais faits par les soldats pendant le nombre de jours où ils n'avaient rien touché.

Les États du Lyonnais et les Réformes. En ce qui concerne toutes ces questions, les États provinciaux ont dans plusieurs régions joué un rôle considérable : ainsi, dans la Marche et le Limousin. En fut-il de même dans la région lyonnaise? Il nous est assez difficile de le dire. Nous savons cependant de façon certaine que les États du Lyonnais furent convoqués à Lyon, le 14 décembre 1447. Nous avons conservé la lettre accréditant Jean de Bar, général des finances, et Theaul de Valpergue, auprès d'eux, ainsi que la lettre de Charles VII, ordonnant aux habitants de s'y faire représenter. Quelque temps auparavant, Jean de Bar avait été envoyé dans le Centre pour coopérer à l'application des réformes 3. Nous avons tout lieu de supposer qu'il fut chargé d'une besogne analogue à Lyon. Nous n'avons malheureusement pas d'autres traces de l'activité des États provinciaux du Lyonnais.

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Ainsi que nous l'avons dit, les charges supportées par les habitants à raison de cette organisation sont de deux sortes: 1° les frais d'hostelage; 2° la taille pour les « vivres et gages des gens d'armes >>. Si on s'en tenait à la lecture d'un certain nombre de documents, on pourrait croire que les frais d'ostelage, par homme et par mois, s'élevaient à 5 sols par jour et par homme. (compris les frais de logement du cheval qui était avec lui). Un document cependant nous révèle que le prix de sept sols et demi fut aussi payé. Cela résulte des documents que nous avons mentionnés plus haut.

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Voir à ce sujet A. Thomas, les États provinciaux de la France centrale sous le regime de Charles VII, t. I.

La lettre du roi accréditant Jean et Theaul de Valpergue est du 29 novembre Bourges); elle a été publiée dans le t. I, des États provinciaux de la France centrale sous Charles VII, p. 61-62. Le titre donné à Jean de Bar indique qu'il sagit d'une lettre postérieure à 1444 (v. ibid., p. 274, la notice sur Jean de Bar). - La seconde lettre est du 24 novembre 1447 (Bourges). En voir le texte, Pièces justificatives, no CXCVI.

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Voir Thomas, ibid., p. 274-276. - C'est lui «< qui fut encore commissaire en Auvergne en 1446 et chargé spécialement, avec le maréchal de La Fayette, d'exposer aux États les trois procédés que le roi laissait à leur choix pour l'entretien des gens de guerre logés dans le pays; de même en 1448. Il fut encore envoyé auprès d'eux au commencement de 1449 »,

Solde des Gens d'Armes. Quant à la solde, elle donna lieu à un impôt spécial, connu dans l'histoire sous le nom de taille des gens d'armes.

A partir de 1452, nous sommes très exactement renseignés sur cette taxe par la lettre que les élus adressaient chaque année aux Lyonnais. Les originaux de ces lettres sont perdus, mais à partir de cette date, elles ont été recopiées dans les registres consulaires qui nous en ont ainsi conservé le texte. La première que nous connaissons est de 1451 et est datée du 21 décembre. Il s'agit d'une lettre des élus sur le fait des aides ordonnés pour la guerre ». Par ce message, les fonctionnaires royaux apprenaient aux Lyonnais qu'en vertu de lettres patentes de Charles VII, données à Villedieu-deComble, le 9 novembre, l'élection du Lyonnais devait fournir 10.044 livres pour l'entretien de 27 lances, plus les frais', plus 100 livres pour les gages du capitaine des francs archers, et 66 livres pour six brigandines destinées à ces derniers. Ce document nous révèle en même temps que l'année précédente, semblable impôt avait été exigé et que cette année-là le roi avait ramené de 30 à 27 le nombre des lances entretenues par les Lyonnais. Mais les habitants de Lyon ne gagnèrent rien à cette diminution, car les élus les taxèrent à 2.700 livres, chiffre exigé d'eux l'année précédente. C'est que Lyon, après cette date comme avant, eut toujours à loger huit lances. Cette somme devait se lever à quatre termes fixés par les élus. Désormais, chaque année, dans les derniers mois, nous verrons une lettre semblable adressée par les élus aux Lyonnais. Si nous divisons par 27 (le nombre des lances) le chiffre de 10.0f, nous trouvons que chaque lance recevait 372 livres par an. Quant aux lances établies à Lyon, un calcul du même genre nous révèle qu'elles devaient recevoir en moyenne 337 livres 50. Nous disons en moyenne, car nous savons qu'elles ne comptaient pas toutes le même nombre d'hommes.

A partir de 1455, cette taille se compose de deux éléments: l'un qui est fixe et qui est aussi le plus important, comprend les sommes nécessitées par l'entretien des « gens d'armes », 2 700 livres sur les 10.0ff livres que l'élection du Lyonnais devait fournir pour

Il est question de cette lettre du si décembre 1451, envoyée par les élus aux Lyonnais, dans la délibération du 20 janvier 1452 (BB 4, fol, 178 v-179). Le texte de cette lettre se trouve à la suite,

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