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frais 1». Les Lyonnais se trouvèrent fort embarrassés: ils acceptèrent l'offre, mais à la condition qu'il y eut à leur tête un «< bon chief sage et discret» afin « de garder la ville de tomber en malveillance et indignacion envers mon dit seigneur le Dauphin2 ».

Le Chapitre consulté par eux les approuva, et le 20, ils donnèrent réponse au grand Maître d'Hôtel et à l'Amiral de France. La réponse était accompagnée de présents consistant dans « une carpe, un bochet et une anguille des plus belles piesses que l'on avait pu trouver », car c'était un excellent moyen pour qu'ils n'oubliassent pas auprès du roi les intérêts de la ville3.

On espérait d'ailleurs voir bientôt Charles VII en personne, qui était alors sur les frontières du Lyonnais, mais le 25 on apprit que le souverain s'éloignait. On décida alors le lendemain d'envoyer Jean de Villenove auprès de lui pour obtenir un don sur les aides ou << rebat des vivres des gens d'armes ». Ce messager de la ville devait gagner à sa cause les seigneurs de la cour en leur offrant jusqu'à cent francs ou cent escus s'il voyait que la chose en valut la peine. Le roi feignit de se laisser convaincre et le 12 novembre, Villeneuve rapportait que Charles VII avait consenti à ne laisser que le nombre des gens d'armes désiré par les habitants.

1 C'est ce que nous apprend le procès-verbal de la séance du 19 octobre 1452 (BB 6, fol. 28 vo), dont le texte se trouve aux Pièces justificatives, no CCXVIII. 2 Voir Pièces justificatives, n° CCXVIII, la délibération du 19 octobre.

3 Aynard de Villenove et Benoît Cheval envoyés le 19 auprès du Chapitre pour lui soumettre le cas, rapportèrent le lendemain la réponse du chapitre qui approuvait les consuls (v. BB 6, fol 25 vo). — A la suite de ce rapport, les conseillers « ont conclus et ordonné que demain a matin l'en donne audit Monseigneur le grant maistre d'ostel et aussi a Monseigneur l'admiral de France lequel est avecque lui une carpe, un bochet et une anguille des plus belles piesses que l'on pourra finer en la peyssonnerie et que le procureur de la ville les leur présente (ibid.) ». — V.

4 BB 6, fol. 3o vo. Délibération du 25 octobre. Ce jour-là on pria Aynard de Villenove et le procureur d'aller trouver le roy qui « a present estant es marches et païs de Lionnois et lequel l'en esperoit de jour en jour venir en ladicte ville est deliberez de soy en retourner et esloigner le dit païs sans venir en la dicte ville. Ils devaient lui fere la reverence et lui exposer les charges et foule du dit païs et obtenir provision.

5 BB 6, fol. 30 vo-31. — Délibération du 16 octobre. Les envoyés devaient « s'il estoit besoing de fere aucun don ou plesir a aucun ou aucuns des seigneurs de la court pour avoir et obtenir du roy aucun don sus les aides ou aucun rebat des vivres des gens d'armes ou autre équivalent, qu'iceulx de Villenove et procureur le puissent fere ou promectre de fere au nom de ladicte ville la ou ilz verront estre necessere jusques a la somme de cent francs ou cent escus en plus s'ilz voent que la chose le vaillie. »>

6 BB 6, fol. 32.

Ce n'était là qu'une parole en l'air, car le surlendemain on apprenait que le roi entendait avoir cent ou cent-vingt cinq lances à Lyon.

Mais les notables et les conseillers estimaient que 25 lances étaient le chiffre maximum de troupes que la ville put entretenir. Ils le firent dire au grand Maître d'Ostel chargé de leur logement1.

Toutefois, rien ne fut changé à ce qui avait été fait l'année précédente. La révolte de la Guyenne allait absorber pour longtemps l'activité de Charles VII, qui dut passer l'année suivante à la reconquérir.

Le 16 novembre 1452, Jean de la Goute se présenta aux consuls de la part des élus pour leur réclamer les 3.088 livres 15 sous représentant leur quote-part de la taille demandée à l'élection du Lyonnais pour l'entretien des gens d'armes. Les lettres de commission de cette année-ci sont très détaillées: elles nous révèlent que chacune des 27 lances entretenues en Lyonnais devait avoir 6 hommes et 6 chevaux, et que chaque lance recevrait 31 francs par mois, y compris l'état du capitaine. A la taille des gens de guerre s'ajoutaient 100 livres pour le capitaine des francs-archers et 60 livres pour ceux-ci3.

Le 7 janvier 1453, les notables et les conseillers se réunirent pour délibérer à ce sujet : ils votèrent une taille de 4 deniers pour livre qui devait être perçue à 4 termes (janvier, avril, juillet, octobre1).

Mais comme on ne pouvait fournir immédiatement le premier quarteron réclamé par Jean de la Goute, (772 livres, 2 sous, 9 deniers), et que les conseillers avaient déjà pour ce fait été mis

BB 6, fol. 32 v⚫. Délibération du 14 novembre. Le roi voulait cent ou six vins lances en la ville. On résolut de « se tirer par devers le grand maistre d'ostel qui doit les loger afin qu'il ne louge en ladicte ville plus de ses dites XX lances ou moins se fere que peut >>.

BB 6, fol. 33 vo.

Le texte des lettres de commission des élus a été recopié dans les registres consulaires.

BB 6, fol. 32 v°. Nous apprenons par ce document que l'on mit une taille unique de 4 deniers au lieu de 4 tailles successives de denier « affin de obvier a multiplicacion de papiers, paine et travaulx de soy assembler, et a plusieurs autres fraiz, despenses et charges ». Cette taille devait se lever à « quatre termes et quatre quarterons de ladite année présente et commence le premier quarteron en ce present moys de janvier, le second au moys d'avril, le tiers et dernier au mois d'octobre prouchain venant ». Elle devait être levée par Rolin Guerin.

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trois fois aux arrêts, ceux-ci prescrivirent à Rolin Guérin de se faire prêter cette somme et de la verser le plus tôt possible entre les mains du receveur royal'. Il rembourserait ensuite l'emprunt avec l'argent provenant du premier terme de la taille, dès qu'il l'aurait recueilli 2.

Les gens de guerre n'étaient d'ailleurs pas aimés des Lyonnais, car, malgré les soins dont on les entourait (ils étaient logés, nourris et payés), ils étaient un véritable fléau pour ceux qui les hébergeaient.

Ces hôtes en étaient particulièrement mécontents. Ils déclaraient que la présence de gens d'armes chez eux leur ferait perdre leur clientèle, car personne ne viendrait loger là où on «< saurait les dis gens ». Aussi, exigèrent-ils une compensation: on leur accorda le 3 février 1453 une indemnité dérisoire de six sous par lance3. La présence de tous ces soldats avait encore pour les Lyonnais un autre inconvénient; elle irritait le Dauphin qu'ils avaient tant d'intérêt à ménager. Ainsi, le 5 février, ils reçurent la visite de Monseigneur de Chateauvillain, envoyé du Dauphin Louis. Ce messager leur déclara que son maître, lors d'un récent voyage de Vienne à Saint-Priest, avait appris les mesures de précautions prises contre lui à Lyon, tant

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Le 23 janvier BB 6, fol. 40 vo). V. Pièces justificatives n° CCXX. — Ce document nous apprend entre autre choses que Jean de la Goute pour avoir paie ment de cette somme avait « desja contraint et fait donner les arrests pour la tierce foys a iceulx conseillers ».

2 Voir Pièces justificatives, n° CCXX.

3 BB 6, fol. 42. — Délibération du 3 février. Les hôtes avaient déclaré qu'« ilz ne pourront louger ne recueillir les dis gens d'armes en leurs hostelleries que ne feust leur tres grant dommage veu et consideré que la plus part' d'eulx et quasi tous tenoent les dites hostelleries a grans louages et grans charges, lesquelles charges ilz ne pourroent paier, se ainsi estoit qu'ilz eussent les dis gens d'armes pour ce qu'ilz perdront leurs hostes et n'en viendront nul louger la ou il sauront les dis gens d'armes requerans iceulx hostes, que se fere se povoit, qu'ilz n'eussent point le dit lougiz des dis gens d'armes ». On décida de les apaiser. Pour les degrever et relever decharge leur sera paié pour accroyssance des dis lougiz et oultre ce qu'ils ont pour iceulx longis des dis gens d'armes de et sur les deniers communs de ladite ville et pour le receveur d'iceulx deniers pour chacun moys qu'ilz les tiendront decy en la, c'est assavoir audit Jaquemet Guigue qui a ung homme et cinq chevaulx, dix sous tournois, audit Vincent de la Lisse qui en a quatre et quatre chevaux VII sous VI deniers, audit Gerbe qui en a quatre et quatre chevaux VII sous et VI deniers, audit Quartillon qui en a autant VII sous VI deniers tournois, et semblablement aux autres habitans de ladite ville qui ont lougez les dis gens d'armes et qui diceulx se plendront qu'il leur soit paié semblablement ladite croissance selon le nombre qu'ilz auront desdis gens d'armes et a raison de dix sous tournois pour six hommes et six chevaulx ».

par les habitants que par les gens de guerre, ce dont il était «< bien esbay et mal contens ». Il leur demanda aussi de faire savoir au grand Maître d'Ostel « qu'il n'eut jamais doubte » de son maître1. Mais ces entrevues déplurent au représentant du roi qui répondit sèchement aux conseillers de ne pas aller voir Monseigneur de Chateauvillain sans la permission des officiers royaux1. On obéit, car la ville était alors en instance pour obtenir divers privilèges (création d'une Université, prolongation des foires). D'ailleurs, les représentants du roi le grand Maître d' « Ostel », l'évêque d'Aleth, Élie de Pompadour, et Girert le Bourcier reçurent bientôt après du vin de Beaune « du melieur que l'en pot finer? ». Cela ne contribua pas peu à leur faire oublier les relations de la ville avec le représentant du Dauphin, La taille des gens d'armes ne donna lieu à aucun incident nouveau cette année-là.

Au début de 1454, Jehan de la Goute présenta aux consuls une nouvelle lettre de commission: il n'y avait de changé que le chiffre de l'impôt qui s'élevait insensiblement d'année en année depuis la reprise de la guerre. La ville, cette année-là, était taxée à 3.095 livres, 16 sous3. Comme en 1453, les conseillers et les notables votèrent une taille de 4 deniers pour livre payable à 4 termes.

Comme en 1453 également, les consuls durent, pour éviter les arrêts à Roanne, recourir à l'emprunt pour payer au receveur le premier quarteron (771 livres, 9 sous). Mais les autres versements se suivirent régulièrement pendant toute l'année.

En 1455, le receveur fut changé : ce fut François Jordayn qui

BB 6 fol. 43.

n° CCXXIX.

Délibération du 5 février.

V. Pièces justificatives,

? Délibération du 15 avril (BB 6, fol. 49).— Item les dessus nommés conseillers nouveaulx apres le departement des autres dudit conseil ont esté d'oppinion que actendu les matieres et afferes que la ville a devers le roy et que l'on n'a enquores rens donné ne fait point de plesir à mes seigneurs qui sont en ceste ville de par le roy, que pour ce qu'ilz aient cause de fere bon rapport au roy de ladicte ville et escripre s'il est besoing au roy et a son conseil desdictes afferes que l'on donne a mon seigneur l'evesque d'Alet, Monseigneur le Grand Maistre d'Ostel et a mestre Girerd le Bourcier, à chacun ung ponczon de vin de Beaune du melieur que l'on puisse finer ».

1 C'est le to janvier 1454 que les conseillers s'occupent pour la première fois de ces lettres de commission (BB 6, fol. 64 vo). Le premier terme indiqué était le 1" décembre 1453. La taille de 4 deniers fut votée par les consuls et les notables le 13 janvier (f° 65 vo-96). V. CC 74 le détail de la perception. Délibération du 17 janvier 1454 (BB 6, fol. 66). n° CCXXV.

- V. Pièces justificatives,

succéda à Jean de la Goute et réclama au nom des élus, Ayme Sàla et Pierre du Bec 3.120 livres : la perception de cet impôt ne donna lieu à aucune observation. On peut cependant remarquer en passant que le receveur en demanda le payement plus tôt que d'habitude, le 30 décembre2. Ce fait s'explique assez par les nécessités de la guerre contre les Anglais pour qu'il ne soit pas nécessaire d'y chercher une autre explication. Aussi, vota-t-on cette année, le 2 janvier, le paiement du premier quarteron dont il n'était pas question d'ordinaire avant le milieu ou la fin de mars.

En 1456, le chiffre de la taille s'éleva brusquement à près de 5.000 livres (exactement 4.914 livres, 7 sous, 6 deniers) pour la levée desquelles on vota, le 11 janvier, un impôt de 4 deniers par livre3. Il y eut mille difficultés cette année-là entre le receveur et les Lyonnais, mais comme elles ont trait à la nature des monnaies qui devaient servir au payement, nous y reviendrons dans un appendice spécial. Nous apprenons par le procès-verbal de la séance du 23 janvier que le receveur municipal Rolin Guérin avait avancé la somme nécessaire au paiement du dernier terme de l'année précédente et qu'il n'était pas encore remboursé5. Ce fait montre la peine qu'avait la ville à satisfaire aux exigences sans cesse grandissantes du pouvoir royal. Au cours de l'année 1455, les conseillers avaient bien essayé d'obtenir du roi «< rabat des lances », entretenues aux frais de la ville. Jean Grant avait même été envoyé auprès de Charles VII à cette intention, mais le 12 septembre (1455) il avait rapporté une réponse négative. Le roi avait

1 C'est le 10 décembre 1454 (BB 6, fol 97 vo), que les consuls s'occupent pour la première fois officiellement de ces lettres de commission.

2 Nous savons par la délibération du 30 décembre 1454, que François Jourdayn avait prescrit aux conseillers de venir le lendemain tenir les arrêts à Roanne. Ceux-ci décidèrent de réunir les notables et le 2 janvier 1455 (BB 6, fol. tot vo), eut lieu le vote d'une nouvelle taille de 4 deniers. - V. CC 75 les détails de la perception.

3 (BB 8, fol. 4, vo 5). Délibération du 11 janvier. V. Pièces justificatives, n° CCXXXV. V. CC 77 (malheureusement incomplet) les détails de la perception ainsi que CC 76.

4 Voir aussi notre article sur la Circulation des Monnaies à Lyon, déposé à la Gazette de Numismatique.

5 Voir Pièces justificatives, no CCXXXVI. « Au regard du quart et derrier quarteron de l'année passée que le dict Raoulin en chevisse le miculx qu'il pourra avec le dit Jourdain receveur ou son commis et de l'interet qu'il dira en sa conscience avoir soubstenu et souffert au payement d'icellui quarteron ilz l'en degreveront ainsi qu'il sera veu et advisé. »

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