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De tout ce qui précède, on peut conclure hardiment que la majeure partie de la chapelle des Grands-Malades est une construction romane, et que c'est bien celle-là même que l'évêque de Liége consacra, suivant la tradition, en l'an de grâce 1153.

XI.

En décrivant la chapelle j'ai omis à dessein de parler des pierres tumulaires : elles méritent bien une mention spéciale.

Un fragment d'une de ces pierres est intercalé dans le mur d'une terrasse parallèle à l'église. Il appartient évidemment au XIVe siècle et présente le reste d'inscription suivante : DO. PVICHE. FRERE... C'était, comme on le voit, la tombe d'un frère des Grands-Malades appelé Dupuis. Soit dit en passant, la place qu'occupe ce fragment, ainsi que certains passages des comptes de l'hospice, prouvent que le pavé de la chapelle a été renouvelé plusieurs fois, notamment en 1602 et 1605. Sans ces embellissements, pour me servir du terme consacré, que de tombes curieuses par leur ancienneté j'aurais pu décrire.

Cette inscription se compose de lettres capitales et onciales, êt à ce propos j'indiquerai brièvement les règles que l'on a suivies à peu près invariablement, du moins dans le

1 Comptes G. M. 1602, fol. 27. 1605, fol. 23.

2 Par capitales, on entend les majuscules romaines semblables à celles qui sont usitées dans nos impressions modernes; par onciales, certaines lettres qui affectent des contours arrondis; par gothiques, les lettres anguleuses qui se rapprochent des caractères allemands. Il va sans dire que dans les inscriptions gothiques la première lettre de l'inscription, des noms propres etc.. est souvent une majuscule.

:

pays de Namur - XIVe siècle jusque vers 1380, mélange de capitales et d'onciales toujours gravées en creux; - fin du XIVe siècle et XV, minuscules gothiques presque toujours en relief; XVIe siècle et première moitié du XVII, minuscules gothiques presque toujours en relief, ou, capitales romaines tantôt en relief, mais le plus souvent en creux; -deuxième moitié du XVIIe siècle et XVIIIe siècle, capitales romaines presque toujours en creux. Ces règles, je le sais, ne s'accordent pas avec celles qui sont tracées dans des ouvrages spéciaux, et l'on pourrait en dire autant de l'écriture des manuscrits, de certaines formes architecturales. Le motif en est que les modifications adoptées d'abord dans les localités où les arts brillaient d'un vif éclat, ne se propageaient que fort lentement dans les parties du pays qui se trouvaient à cet égard dans un état d'infériorité.

Presqu'en face du fragment de la tombe du frère Dupuis, on aperçoit dans le mur extérieur du choeur de la chapelle, une pierre tumulaire d'une conservation parfaite. L'inscription, qui se compose de minuscules gothiques en relief, porte:

CHI. GIST. MARTIN. GRANT.
BOURGOIS. DE. NAMUR. Qui.

TRESPASSA. LAN. XV. III. LE.
1

XIIII. JOUR. DE. MAY.

A la suite du dernier mot, on voit une hache de charpentier, espèce d'armoiries plébéiennes qui désignent la profession du trépassé. Quand au mot grant, c'est ici un nom propre et non un adjectif qualificatif, comme on pourrait le croire

Dans celte inscription et les suivantes, je mets en italique les lettres indiquées par les abréviations.

au premier abord il n'existait pas à Namur de grands bourgeois.

Pénétrons dans la chapelle et notons d'abord que deux ou trois dalles tumulaires sont entièrement frustes ou ont été brisées par suite des embellissements dont j'ai parlé tantôt. Quelques lettres, quelques ornements gothiques, que l'on y distingue assez difficilement, prouvent qu'elles ne remontent pas au delà du XVe siècle. Sur l'une d'elles on peut lire encore CHI. GIST. P.............. AT. LAN. DE. GRACE. M..... Au centre d'une autre, dont l'inscription a totalement disparu, on distingue un écusson écartelé aux 1 et 4 d'un lion couronné, aux 2 et 3 de trois émanches mouvantes du chef. Ce sont là les seules armoiries qui se trouvent dans la chapelle.

Décrivons maintenaut, par ordre chronologique, les tombes dont les inscriptions sont encore déchiffrables soit en entier, soit par notables parties. Elles sont au nombre de douze; à l'exception du no 3, toutes sont de simples pierres tombales intercalées dans les dalles du pavé.

No 1. ICHI. GIST. GODEFROYS. DE. ASSECHE. PROIES. AD.. U. KE. ALVI. SECHE. KE. SARME. SOIT. EN. PARADIS. AVVEC. LES. SIANS.

BENOIS. AMIS. AM. '.-2. 18°. de longueur sur 0.90 de largeur; capitales et onciales gravées en creux sur la bordure.

Cette tombe ne paraît pas avoir été achevée. Au centre on a figuré une arcade ogivale. Dans l'angle supérieur, une main semble sortir de l'inscription et montre, de deux doigts, l'intérieur de l'arcade où sans doute le sculpteur se proposait de représenter Godefroid d'Assesses au moyen de simples lignes gravées en creux comme tous les détails de cette pierre. L'inscription qui est complète ne renferme aucune

1 Trad. litt. Ici git Godefroid d'Assesses. Priez à Dieu que à lui fasse que son âme soit en Paradis, avec les siens bénis amis. Amen.

date; mais si l'on tient compte de l'orthographe et de la forme de certaines lettres, on peut avancer que cette tombe remonte aux premières années du XIVe siècle.

No 2. CHI. GIST. MAROIE. DE. MARBAIS. SEREVR. DE. CHAENS. IA. DICE. KI. TREPASSA. EN. LAN. DE. GRACE. M. CCC. LX. PROIES. POUR. LAME. DE. LI. AMEN. 1. capitales et onciales gravées en creux sur la bordure.

2. 10 de long sur 1. 02 de large;

A peu près au centre de la pierre on voit le Christ sous la figure de l'agneau portant un nimbe croisé et soutenant la croix à laquelle est attaché un étendard. Le mot Marbais désigne ici le village d'où cette Marie, sœur de l'hospice, était originaire.

No 3. CHI. GIST. COLARS. IACORIS. TALURES. DImages. et. FRERES. DELE. MAISON. QUI. TREPACAT. EN. LAN. DE. GRACE. M. CCC. LXXX. XIII. LENUT. CAIS. IOURS 2.

Une arcade pratiquée dans l'épaisseur du mur de la nef renferme cette tombe gothique d'un beau style. Le monument se compose de deux parties. La pierre inférieure posée verticalement et sur laquelle sont sculptées trois petites figures d'un dessin correct, ferme le bas de l'arcade et sert de support à la seconde pierre posée horizontalement. Sur celle-ci on a représenté Colars Jacoris, les mains jointes, la tête appuyée sur un coussin; un chien repose à ses pieds. L'inscription taillée en minuscules gothiques en relief, sur deux lignes, occupe la partie de la bordure de la pierre supérieure qui se trouve en dehors de l'arcade. Une plus longue description est inutile, grâce au dessin exact qui accompagne cette notice.

1 Ici git Marie de Marbais, sœur de céans jadis, qui trépassa en l'an de grâce 1560. Priez pour son âme. Amen.

2 Ici gît Colars Jacoris, tailleur d'images et frère de cette maison qui trépassa en l'an de grace 1595, la nuit du saint jour (?).

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TOMBEAU DE COLARS JACORIS DANS LA CHAPELLE DES GRANDS MALADES

F. Stroobant lith

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