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trouvoit des AEnianiens, comme en Thessalie, et des Parrhasii, comme en Arcadie (1). Strabon observe que dans ces mêmes lieux on découvroit des armes grecques, des vases et des tombeaux antiques qui avoient le caractère grec.

Le culte de Rhéa, fameuse dans la mythologie des Arcadiens, se trouve établi sur le Phase. On l'appeloit la déesse du Phase (2).

Après avoir tracé la marche des nations pélasgiques, à partir de la Thessalie et de l'Arcadie, qui ont été leurs principaux siéges, et les avoir suivies dans les îles de l'Archipel, dans le continent d'Asie jusqu'au fond de la mer Noire, en Médie et en Arménie, tournons nos regards vers le couchant, sur ces belles contrées connues sous le nom d'Hespérie, et vers les embouchures du Tibre et du Pô. C'est là que nous les verrons encore former de nombreux établissemens et jeter les fondemens d'une grande puissance, dont les Romains, leurs descendans, recueillirent successivement les débris; car l'empire des Pélasges comprit depuis le trentième degré de longitude jusqu'au soixantième et au-delà, c'est-à-dire plus de cinq cents lieues.

C

que

Avant les Paphlagoniens, après la prise de Troie, vinssent d'Asie et du pays habité par les Caucons, se fixer au fond du golfe Adriatique (3), les Pélasges étoient déja depuis long-temps établis dans ces con

(1) Strab. lib. XI, p. 508. Pausan. p. 323-338.

(2) Arrian. Peripl. p. 9.
(3) Tit.-Liv. lib. I, cap. 1.

trées, vers l'embouchure du Pô appelée spinétique, du nom de Spina, qu'ils y avoient bâtie (1). Cette ville autrefois tenoit l'empire de cette mer (2): du temps de Strabon elle n'étoit plus qu'un petit bourg distant de quatre-vingt-dix stades de la côte. Près de là étoit Ravenne, fondée par des Pélasges de Thessalie. Ce sont aussi des Pélasges de Thessalie qui s'établirent à Cæré, l'ancienne Agylla (3). Cette ville étoit célèbre par la justice et le courage de ses habitans. Quoique trèspuissante, elle n'exerça jamais de brigandage, et elle avoit à Delphes, comme celle de Spina, son trésor, connu sous le nom de trésor des Agylléens. Ce sont ceux de Cæré qui reçurent chez eux les vestales et le dépôt religieux qu'elles leur confièrent lors de la prise de Rome par Brennus (4). Virgile place près de Cæré l'antique oracle du Latium, consacré à Pan ou à Sylvain par les Pélasges (5): or Pan étoit la grande divinité des Pélasges d'Arcadie. Virgile fait de Cæré une ville d'Étrurie; mais nous avons déja observé que les Étrusques passoient pour être aussi une nation de Pélasges. Il ne restoit plus du temps de Strabon que les ruines de cette ville fameuse : les malades y alloient cependant encore prendre les bains chauds.

Denys d'Halicarnasse observe également que de son temps les anciennes villes des Pélasges étoient dé

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truites, et qu'on en trouvoit à peine les ruines (1), telles que celles de Trebula, de Verbola, de Suna, de Mefula, de Cursula et d'Orvinium. On découvroit dans cette dernière ville d'anciens tombeaux, et il y restoit un temple de Minerve, consacré dans la citadelle, comme chez les Pélasges de Troade, qui eurent pour chef Dardanus, venu de Samothrace, île des Pélasges.

La plupart de ces habitations des Pélasges se trouvoient dans le territoire de la Réate, près des Apennins (2).

Strabon parle des Pélasges d'Arcadie (3) établis dans la chaîne des Apennins, qui traverse le pays des Peu

cètes.

Les Pélasges et les OEnotriens occupèrent le Brutium (4) et la Lucanie, comme ils avoient occupé le Latium (5).

Ils habitèrent aussi Herculanum et Pompeia (6). Peut-être trouveroit-on dans les ruines et dans les monumens de ces deux villes des traces de leurs arts et de leur goût. Mantoue appartint aux Pélasges Toscans (7), qui eurent des colonies jusqu'en Rhætie (8).

Près de Cosa étoit Regivilla, où l'on montroit le palais de Malæotis, prince pélasge (9). Il étoit parti de ces lieux avec d'autres Pélasges pour aller à Athènes.

(1) Dionys. Halic. p. 12.
(2) Id. lib. I, p. 10.
(3) Strab. lib. VI, p. 283.
(4) Plin. lib. III, cap. 10.
45) Ibid. cap. 9.

(6) Strab. lib. V, p. 247.
(7) Plin. lib. III, cap. 23.
(8) Ibid. cap. 24.

(9) Strab. lib. V, p. 226.

Ces Pélasges étoient de la même nation que ceux qui étoient établis à Cæré. Tout près étoient les chantiers. des Céréates, où l'on voyoit un temple d'Illythie bâti par les Pélasges. J'observe qu'on trouve beaucoup de monumens du culte de cette déesse dans tout le Péloponnèse, et sur-tout en Arcadie (1): d'ailleurs Illythie étoit fille de Junon, grande divinité des Pélasges

Ces peuples habitèrent aussi Pise (2), Cortone, Saturnia, Alsium, et beaucoup d'autres villes d'Étrurie. Ardée avoit été fondée par les Argiens, sujets d'Acrisius.

Faléries et Fescennium conservoient encore du temps de Denys d'Halicarnasse (3) les vestiges de leur origine pélasgique : ils faisoient usage du bouclier et de la javeline des Argiens; ils tenoient aussi d'eux la coutume de ne déclarer la guerre que par le ministère de hérauts ou de féciaux. Tarquinie fut fondée par les Pélasges de Thessalie. Presque toute l'Italie étoit remplie de villes bâties par ces anciens Grecs du temps des Pélasges (4): aussi l'on appelle grande Grèce toute sa partie méridionale.

On reconnoissoit la manière de bâtir des Pélasges d'Argos dans la construction des temples des habitans de Faléries, le cérémonial pélasgique dans leurs sacrifices et dans leurs expiations, qui se faisoient suivant le rit usité à Argos. Ils avoient aussi des vierges canéphores

(1) Pausan. Arcad. p. 253, 264, 276.

(2) Dionys. Halic. p. 16.

(3) Ibid. p. 17. - Solin. p. 24. (4) Justin, lib. XX, cap. 1›

et des chœurs de jeunes filles qui chantoient les hymnes de leur ancienne patrie. On remarquoit sur-tout dans la Junon des Falisques tous les traits et les attributs de celle d'Argos. Cette Junon Argienne se retrouve jusqu'au fond du golfe Adriatique (1), où les Pélasges eurent des établissemens, ainsi que la Diane des Étoliens, peuple dont les usages étoient aussi communs aux Pélasges; car les Herniques, qui étoient Pélasges d'origine (2), marchoient à la guerre chaussés comme les Étoliens, peuple voisin des Pélasges de Thessalie et d'Épire. Ils prenoient leur nom des montagnes qu'ils habitoient, herné signifiant rocher (3) dans la langue des Sabins, sur qui régna le Pélasge OEnotrus, venu d'Arcadie (4). Ces Pélasges, en passant de la Grèce en Italie, voulurent aussi y reproduire le nom de Larisse, si fameux chez eux, et ils bâtirent une ville en Campanie, qu'ils nommèrent

Larissa.

Denys d'Halicarnasse nous dit qu'à l'époque où il écrivoit, il y avoit long-temps que cette ville étoit déserte, et que son nom n'étoit connu que de très-peu de personnes. Elle étoit peu éloignée du Forum Popilii.

Ainsi, depuis le fond du golfe Adriatique jusqu'au Brutium, on retrouve par-tout des traces des établissemens de la nation pélasgique, et le culte de la grande divinité des Pélasges d'Argos. La même Junon Argienne, adorée au-delà des bouches de l'Éridan, étoit aussi

(1) Strab. lib. V, p. 215.

(2) Macrob. Sat. lib. V, cap. 18.

(3) Serv. AEneid. lib. VII, v. 684. (4) Id. lib. I, v. 536.

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