Imágenes de páginas
PDF
EPUB

mais il oublie d'indiquer à son lecteur où il pourrait se rendre pour jouir de leur vue. Rappelons-nous toutefois qu'alors VAN MANDER habitait depuis vingt ans la Hollande.

CORNEILLE DE BIE, qui écrivit vers 1660 une histoire rimée des peintres belges, composa une strophe en l'honneur de SNELLINCK (1). Il exalte particulièrement ses talents sous le rapport de ses peintures pour tapisseries, et en cela DE BIE semble indiquer les ouvrages auxquels SNELLINCK se livra de préférence. Ne serait-ce pas à ce genre d'occupation, qui était alors une spécialité, que l'on doit attribuer la rareté de ses tableaux d'église ou de cabinet?

ARNOUD HOUBRAKEN, qui publia en 1719 le grand Théâtre des peintres des Pays-Bas, pour servir de supplément à l'ouvrage de VAN MANDER, se trouve réduit à répéter le dire de ce dernier sur SNELLINCK, sans pouvoir indiquer la moindre production artistique de ce dernier (2). C'est à ce sujet qu'il exprime ses doléances sur le peu d'empressement qu'on eut, de son temps, à lui être utile dans ses recherches. Seulement, il ajoute à sa notice, que le grand VAN DYCK l'estima digne d'occuper une place parmi les meilleurs peintres, et qu'il fit son portrait.

DESCAMPS, qui n'en sait pas plus que HOUBRAKEN Sur la vie et les ouvrages de SNELLINCK, nous apprend dans la Vie

(1) Gulden Cabinet van de edele vrye Schilderconst. Antw., 1661; in-4, p. 104. Voici ces vers:

JOANNES SNELLINCKX, SCHILDER VAN ANTWERPEN.

Den snellen geest van Snellinckx werken
Compt ons Pictura oock verstercken,
Die door haer cracht der const, bedroogh
Al menich scherp' en snelle oogh :
Wanneer men sach het tweede leven
In syn tapecery geweven,

Waer in met snel en stouten aert

De ploeyen cloeck syn uytgespaert.

(2) Groot Schouwburg der nederl. schilders. T. I, p. 35.

des peintres, que ce portrait, peint par VAN DYCK, orne son épitaphe dans l'église paroissiale de S'-Jacques (lisez S'-Georges) à Anvers, sur laquelle ou lit : « Cy-git le célèbre » JEAN SNELLINCK, peintre de l'archiduc ALBERT et d'ISABELLE, > et de son Excellence le comte de MANSFELT, etc.; mort le » premier octobre 1638, âgé de 94 ans; et de Pauline Cuy»pers, sa femme, morte le 6 octobre 1638, ainsi que leur » fils André Snellinck, mort le 10 septembre 1653 (1). »

J. IMMERZEEL est le seul auteur, à notre connaissance, qui, après avoir répété les éloges de ses devanciers sur ce peintre, en cite une grande composition. « On trouve mentionné, dit-il, que SNELLINCK peignit, en 1601, un tableau capital à deux volets, pour l'autel de la chapelle des Merciers (Kramersgulde), dans la cathédrale de Malines. Il représente la Résurrection du Sauveur au-dessous sont les figures de S'-Pierre et de S'-Paul, et dans le lointain les saintes femmes qui se rendent au tombeau du Christ. Sur l'intérieur des volets sont peintes l'Annonciation de la Vierge et la Nativité, et à l'extérieur se voit le patron de la confrérie (2). » IMMERZEEL ajoute que VAN DYCK ne se borna pas seulement à peindre le portrait de son vieil ami, mais qu'il

(1) La vie des peintres flamands, etc. Paris, 1753; t. I, p. 179. (2) De levens en werken der holl, en vl. kunstschilders, enz. T. III, bl. 96. Comment ce tablean capital n'est-il point mentionné par DESCAMPS dans son Voyage pittoresque, publie en 1769, ni dans le Peintre amateur et curieux de DENSAERT, imprimé en 1763? A moins que nous ne nous trompions, aucun de ces deux auteurs ne cite une seule production de Snellinck, quoique bien des tableaux qu'ils indiquent n'appartiennent point à des maîtres du premier ordre. Cependant, l'un et l'autre n'oublient pas de nous apprendre que l'épitaphe de Snellinck, ornée de son portrait fait par VAN DYCK, se trouve dans l'église de SaintGeorge à Anvers, vis-à-vis de la Chaire de vérité, comme le dit Densaert.

Au reste, le tableau principal cité par Immerzeel n'est plus exposé dans la cathédrale de Malines; les volets seuls s'y voient encore dans le pourtour du chœur.

en fit lui-même la gravure. On sait que Pierre De Jode l'a également reproduit sur cuivre.

La curiosité nous a fait parcourir les notices des tableaux de quelques musées, tels que celui de Napoléon (an X), celui d'Anvers (1829), de Gand (1825), de Bruxelles (musée royal, 1844), ainsi que plusieurs catalogues de riches collections particulières, et nulle part le nom de SNELLINCK ne se fait remarquer. Cest seulement dans la notice du musée de la ville de Bruxelles (1821) (1), que nous avons rencontré ce peintre avec l'indication de trois de ses tableaux : l'un représente Jésus-Christ attaché à la croix, avec accessoires différents (no 114 et 254); l'autre est le portrait en pied d'une femme (n° 115). Il paraît, au reste, d'après les informations d'un ami des arts, qu'à Anvers même, où SNELLINCK vécut longtemps et où il existe de si belles collections particulières, ses tableaux sont introuvables.

Voici maintenant ce que nous pouvons ajouter aux récits des auteurs, consultés par nous, sur ce peintre :

Il est effectivement vrai, ainsi que l'assure le réthoricien DE BIE, que SNELLINCK s'occupa, peut-être par spécialité, à peindre des modèles ou cartons pour de grandes tapisseries historiques. Sous ce rapport, il eut de fréquentes relations avec les manufacturiers d'Audenarde, chez lesquels il se rendit quelquefois. Nous le trouvons mentionné, sous l'année 1608, dans un fragment de registre aux annotations d'un fabricant de tapis, nommé Georges Ghuys, lequel reçut beaucoup de commandes de négociants d'Anvers, entr'autres de Pierre Robyns, son beau-frère. Le sujet historique, qu'alors il eut à peindre en détrempe, était un épisode de la vie de Zénobie, reine de Palmyre, en huit pa

(1) Le gouvernement a fait naguères l'acquisition de ce musée, pour le réunir, dit-on, au musée royal de Belgique.

trons. Nous ajouterons que le susdit fabricant avait encore parmi ses grands sujets pour tapis: Debora, Salomon, les enfants d'Ely, Holofernes et Judith, Enéas, Moïse et Pharaon, Gédéon, Ulysse, Pomone, Notre Dame, etc. Il est à croire que plusieurs de ces cartons furent peints par le même artiste.

Ce fut surtout en 1615 que SNELLINCK, étant à Audenarde, entreprit de faire pour quelques corps de métiers et confréries des tableaux d'autel pour leurs chapelles, établies dans l'église paroissiale de la ville. Nous donnons ici la description de ceux qui y sont encore conservés.

Le tableau d'autel de l'ancienne confrérie de S'-Jacques l'Apôtre. Il représente la Transfiguration de J.-C. Le Seigneur vêtu d'une tunique verte, et soulevé de terre sur le mont Thabor, est placé dans une nuée lumineuse, entourée de têtes de chérubins. A ses côtés sont Moïse et Elie, dans l'attitude de lui adresser la parole; la partie inférieure de leurs corps est couverte de nuages. Plus bas sont les disciples Pierre et Jacques, assis, les yeux fixés avec étonnement sur leur divin maître, tandis que Jean le contemple debout; on lit dans le coin de droite: IN DEKENDOM VAN PIETER VAN DEN BAESE F JANS, JOAN. SNELLINCK, F. 1616. Peint sur bois. L'autel fut construit à neuf en 1614.

L'Assomption de la S-Vierge. Tableau d'autel de l'ancienne corporation des Merciers, sous l'invocation de SaintMichel. La Vierge Marie, en robe d'azur, les yeux levés, est bénie par Dieu le Père, qui occupe le haut du tableau et étend sur elle les deux mains. A ses côtés sont assis sur des nuages Dieu le Fils à gauche, et Dieu le Saint-Esprit à droite, tous deux drapés de rouge et tenant chacun d'une main un petit globe surmonté d'une croix, tandis que de l'autre ils semblent féliciter Marie dans sa gloire. Au bas se groupent plusieurs anges qui expriment leur joie en la contemplant. Sur bois.

[ocr errors]

Ce tableau avait anciennement deux volets, sur l'un desquels SNELLINCK aura mis probablement son nom. Nous ignorons ce qui y était représenté, mais à coup sûr le patron de la corporation n'y aura pas été omis.

La composition ci-dessus offre cela de remarquable, que le St-Esprit y est figuré sous une forme humaine, tandis que d'ordinaire on le représente sous la forme d'une colombe rayonnante. Depuis longtemps, cette manière de figurer la 3° personne de la Ste-Trinité n'est plus adoptée dans nos églises. Mais le peintre n'avait-il pas été obligé de le reproduire ainsi? c'est ce qui paraît probable; car nous trouvons dans le registre de la corporation, au compte de 1616 à 1617, que les anciens du métier s'assemblèrent en chambre, à l'effet de délibérer sur les sujets à peindre sur le panneau et les deux volets destinés au tableau d'autel de leur chapelle. Puis, on s'accorda avec SNELLINCK pour la somme de 480 livres parisis, à payer en quatre termes, d'année en année, plus un pot de vin de 4 liv. 16 sc. p. pour son fils.

Dans l'église de N. D. à Pamele, au-dessus d'un confessionnal, il se trouve du même peintre un tableau d'assez grande dimension, à deux volets, représentant la Création de l'homme. Dieu, sous la figure d'un vieillard, à barbe flottante, se tient devant le corps d'Adam, qui est couché nù à l'ombre d'un arbre; il semble par son attitude lui donner la vie. Trois anges accompagnent le Père éternel, tandis qu'un singe, un chien et un bel oiseau se groupent près d'Adam. Le Paradis terrestre, dans lequel ce mystere se consomme, est admirablement étoffé d'arbres, de plantes et d'animaux. Sur l'intérieur du volet à gauche, on trouve Adam et Eve, près de l'Arbre de la science du bien et du mal. La mère commune, séduite par le Serpent infernal, a cueilli une pomme, qu'elle présente à Adam. Le volet à droite nous montre nos premiers parents, qu'un ange chasse impitoyablement du Jardin des delices. Le dehors des volets

« AnteriorContinuar »