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besoins et ses loisirs personnels, en réduire ou en augmenter le nombre dans la pratique. M. Jullien n'entend pas imposer à tous ceux qui suivront ses conseils, des formes sacramentelles dont ils ne s'écarteront pas : il insiste seulement sur la nécessité d'un journal divisé en plusieurs comptes distincts; puis lorsqu'il indique les subdivisions auxquelles on peut s'attacher, il le fait plutôt, je crois, par voie d'exemples que par forme de préceptes.

La première partie de l'Essai sur l'emploi du tems de M. Jullien, est employée à l'exposition théorique de sa méthode; la seconde partie est consacrée à l'application pratique. L'auteur y raconte ses premiers essais pour former un journal de sa vie et de ses souvenirs: il donne ensuite des modèles de ses trois livrets pratiques d'emploi du tems. Il intitule le premier : Mémorial analytique, ou Journal des faits et observations. « Ce Mémorial, dit-il, est destiné à recevoir, non pas tous les jours, mais de tems en tems, lorsque l'occasion s'en présente, les détails d'un certain intérêt, les observations, les souvenirs pour lesquels on manquerait de place dans les deux autres livrets. Il sert à retracer, comme dans un tableau fantasmagorique, les scènes variées de la famille et de la société, les réflexions qu'elles font naître, les instructions morales que l'on peut en retirer. >> Le second livret de M. Jullien est l'Agenda général qui se compose de tablettes usuelles comprenant six divisions: l'emploi de la journée qui a précédé, auquel on peut joindre l'emploi projeté de la journée qui va suivre; le mémorial économique pour l'inscription des recettes et dépenses; le mémorial des personnes; celui de la correspondance active et passive; le mémorial bibliographique; et enfin, le dépôt mnémonique partagé lui-même en quatre subdivisions: souvenirs et projets personnels; souvenirs et projets d'une utilité générale; tablettes historiques; tablettes nécrologiques. Le troisième et dernier livret pratique est le Biomètre ou Mémorial horaire, servant à indiquer le nombre des heures données par jour à chacune des di

visions de la vie. L'auteur regarde ce livret comme le plus simple de tous; et, en effet, sa tenue n'exige ni beaucoup de tems, ni de longs détails. Pour moi, il me paraît que le désir qu'a éprouvé l'auteur de présenter une analyse à peu près complète des élémens et de tous les emplois possibles de la vie l'a engagé à trop multiplier les divisions; ses dix-neuf colonnes pourraient, je pense, être réduites avec avantage à un moindre nombre : quelques divisions soulagent l'esprit; trop de divisions l'embarrassent et le font tomber facilement dans la confusion ou dans les distinctions arbitraires. L'auteur répondra, sans doute, que c'est par l'exécution pratique qu'il faut apprécier une pareille division et sa possibilité: à cette réponse, je n'ai nulle réplique à faire; car il peut citer, à l'appui de son système, vingt années d'une expérience constante, tandis que je dois avouer que je n'ai pas même essayé l'usage du biomètre.

Cette analyse rapide de l'Essai sur l'emploi du tems suffit pour donner une idée de l'importance de cet ouvrage; sa publication est un service signalé que l'auteur, dans son zèle pour les progrès de la civilisation, a rendu à la philosophie morale, et surtout à la morale pratique. Les soins assidus qu'il donne à la Revue Encyclopédique ne permettent pas d'ajouter à cette analyse des éloges qui pourraient paraître ici peu d'accord avec quelques convenances, mais auxquels il sera suppléé par les réflexions de tous les lecteurs qui méditeront l'Essai sur l'emploi du tems. Ch. RENOUARD.

STATISTIQUE DE L'Écosse, et en particulier de la ville DE GLASCOW; par James CLELAND (1).

Les Allemands, si fameux pour leurs statistiques, sont main

(1) Glasgow, 1823. 1 vol. in-8°.

tenant surpassés par les Écossais, pour l'étendue et la scrupuleuse exactitude des détails. Nous avons sous les yeux une statistique de l'Écosse et une de la ville de Glasgow, dont les faits sont recueillis principalement par M. Cleland, surintendant des travaux publics; c'est un chef-d'œuvre en ce genre.

De tous les renseignemens qu'on peut recueillir sur un pays, les plus importans sont ceux qui ont rapport à la population, parce que ce sont ceux dont on peut tirer le plus de conclusions, relativement au sort et à la condition des hommes; or, c'est là c ce qui nous intéresse avant tout. Par exemple, le nombre des personnes va-t-il croissant? on peut être certain que les produits généraux du pays augmentent. La durée moyenne de la vie se prolonge-t-elle ? il est évident que l'art de vivre fait des progrès, que l'on se nourrit mieux, que l'on se tient plus proprement, que l'on habite des logemens plus sains, que l'on est mieux soigné dans l'enfance, dans la vieillesse, dans les maladies; en un mot, qu'on est plus heureux.

Quand on distingue les décès, non-seulement suivant l'âge, mais suivant les professions, la nature des maladies, etc., on acquiert de nouvelles lumières sur la salubrité ou l'insalubrité des différens travaux, sur les progrès de l'art de guérir, etc. En général, il faut mesurer l'importance des données de la statistique, sur les conséquences que l'on peut en tirer; et l'on est tenté d'approuver un préfet qui, fatigué des détails minutieux que l'administration lui demandait, nommément le nombre des volailles qu'on engraissait dans son département, pria le ministre de lui dire si le recensement devait être fait avant ou après son dîner; car, si c'était après, il y aurait indubitablement une volaille de moins dans les tableaux qu'il devait lui faire passer.

Quoique les progrès de la population dans toutes les villes industrieuses de la Grande-Bretagne, soient remarquables, il il n'en est peut-être aucune où ce progrès soit plus marqué

qu'il ne l'est à Glasgow. En l'année 1610, il y eut un dénombrement qui donna, pour la population de cette ville, 7,644 personnes de tout âge et de tout sexe. Lors de la contre-révolution qui replaça les Stuarts sur le trône, en 1660, la population se trouva de 14,678. Le règne à la fois dissolu et bigot du roi restauré et de son frère, et les persécutions exercées par ces deux élèves des jésuites, ne furent pas favorables à l'industrie; car, à l'époque où les Stuarts furent de nouveau chassés pour jamais, en 1688, Glasgow ne contenait plus que 11,948 âmes. Cette population augmenta médiocrement jusqu'au milieu du XVIIIe siècle; mais, c'est alors que se découvre l'influence remarquable des progrès de l'industrie et de la liberté.

En 1755, Glasgow contenait 23,546 âmes;

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Quels progrès dans le régime administratif, dans l'état des lumières, dans l'activité de l'industrie, n'annonce pas un tel accroissement! Et en même tems, quel changement dans toutes les habitudes de la vie et de la société! surtout si l'on songe que beaucoup d'autres progrès analogues ont eu lieu en même tems. A trois lieues seulement de Glasgow, une nouvelle ville manufacturière s'est élevée, qui compte 47,000 habitans, celle de Paisley.

On pense bien que les derniers dénombremens sont les mieux faits voici quelles précautions on a prises pour les avoir exacts. Nous les remarquons, parce qu'on ne ferait pas mal de les imiter dans certaines villes plus importantes encore que Glasgow.

Le corps municipal, avant de procéder au dernier dénombrement, a fait afficher et insérer dans tous les papiers publics, un avis qui explique la nature et le but des recher

ches de ce genre. Elles n'ont rien d'hostile contre les citoyens; et fournissant aux publicistes des données sur ce qui est favorable à la prospérité publique, elles tendent, au contraire, au bien-être de la société. On demande, en conséquence, le concours sincère et bienveillant de tous les citoyens, et notamment celui des gens les plus instruits et les plus amis du bien public. On a fait choix d'un commissaire par paroisse, pour se transporter, conjointement avec un des officiers de la paroisse, chez tous les citoyens tenant une maison ou un ménage. L'un et l'autre ont reçu une indemnité convenable; car nul travail n'est bien exécuté, s'il n'est bien payé. On a recueilli ainsi le nom, le sexe et l'âge de chaque chef de famille, de ses enfans, de ses pensionnaires, ouvriers et domestiques. On en a dressé des états, rue par rue, maison par maison; ensuite, on a invité, par des avis publics, les citoyens, non-seulement à venir chez le commissaire principal vérifier si leurs déclarations avaient été fidèlement consignées, mais s'ils apercevaient quelques inexactitudes dans les autres déclarations sur lesquelles ils pouvaient avoir des lumières. C'est après avoir vérifié les dits et contredits sur lesquels il s'était élevé quelques doutes, que les tableaux généraux ont été dressés.

Ne pouvant analyser de nombreux tableaux, nous nous bornerons à en faire sortir quelques observations qui sont propres à faire réfléchir le lecteur, et que l'on peut comparer avec quelques-uns des résultats des tableaux statistiques que M. le préfet de la Seine a publiés dernièrement. (Voyez cidessus, page 49-66.)

A Glasgow, comme à Paris, la profession la plus nombreuse est celle des détaillans de liqueurs spiritueuses, ou, si l'on veut, des cabaretiers de tous les ordres. A Glasgow, il y en a 1613; ce qui fait plus d'un cabaret pour vingt familles.

La maladie la plus meurtrière pour les enfans au-dessous de dix ans, a été, jusqu'en 1804, la petite vérole; depuis 1804, T. XXI. -Mars 1824. 35

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