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GÉNÉRALITÉS

ÉTUDE DES MILIEUX

I. MILIEU PHYSIQUE.

Le berceau de l'industrie du tressage de la paille en Belgique est la vallée du Geer, qui en est, d'ailleurs, restée le siège principal. A l'heure qu'il est, les ouvrières tresseuses, en effet, se rencontrent surtout dans les communes de Glons, Boirs, Roclenge, Bassenge, Wonck et Eben-Emael : toutes ces localités sont arrosées par la petite rivière du Geer. Sluse et Mall, villages où se pratique aussi, quoique dans une moindre mesure, le tressage à domicile, sont également situées au bord du Geer, en amont de Glons. Au Nord de ce cours d'eau cependant à Fall-Mheer, et, plus encore, au Sud à Haccourt, Heure-le-Romain, Houtain-Saint-Siméon, Fexhe-Slins, Slins, Juprelle, Hermée, on retrouve en nombre plus ou moins considérable ces ouvrières à domicile. A l'époque où l'industrie qui nous intéresse était en pleine prospérité, elle a eu des ramifications, paraît-il, jusqu'à Liers et Rocour; et il est à peine besoin de rappeler que tous ces villages situés au Sud du Geer s'élèvent sur un sol de configuration très différente de celle de la vallée elle-même.

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Comment faut-il s'expliquer la présence de l'industrie de

la paille dans le district qui vient d'être délimité? Dans son remarquable ouvrage sur l'Economie rurale de la Belgique, E. de Laveleye répond à cette question de la manière suivante: « Lorsqu'une localité se distingue par une production spéciale, c'est presque toujours dans la constitution géologique du sol qu'il faut en chercher la cause; c'est du moins ici le cas. Les terrains crétacés de Maestricht, si connus des géologues, se poursuivent dans le bassin du Jaër, donnent aux pailles des céréales certaines qualités particulières, de la souplesse, de la force et surtout une blancheur qu'on ne peut obtenir, dit-on, nulle part ailleurs au même degré (1) ».

II. MILIEU DÉMOGRAPHIQUE.

Nous ne saurions mieux faire, parlant du milieu démographique, que d'indiquer les chiffres de la population des différentes communes dont les habitants s'adonnent au tressage de la paille.

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(1) Essai sur l'économie rurale de la Belgique, 2me édition revue et

augmentée. Paris, Lacroix 1875, p. 172.

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Nous omettons à dessein ici la mention de communes telles que Liége, Pepinster, Bolland, où l'industrie du tressage n'est représentée que d'une façon toute exceptionnelle. On fausserait les idées du lecteur en faisant intervenir, dans cette statistique, des éléments démographiques qui, en réalité, y sont absolument étrangers.

A propos de la question qui nous occupe, un agent recenseur de Bassenge, M. Grognard, fait observer que « l'émigration des ouvriers chapeliers en pays étranger est un mal pour nos contrées; il arrive très souvent que ces ouvriers contractent des unions à l'étranger, en sorte que notre population diminue d'année en année. En voici un exemple en 1865, notre population était de 1,050, en 1897, elle reste à 990 habitants. » Et nous pouvons ajouter, grâce au tableau ci-dessus, qu'elle tombe même à 973 en 1898. Enfin, additionnez les chiffres de la population des bourgs et villages du Geer: Glons, Boirs, Roclenge, Bassenge, Wonck, Eben-Emael et

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(1) Les chiffres de 1897 sont extraits de l' Lxposé de la situation administrative de la province respectivement de Eiége et de Limbourg présenté par la Députation permanente en exécution de l'article 115 de la loi provinciale (session de 1899)». Les chiffres de 1898 sont empruntés au Mémorial administratif de la province de Liège, 1899 no 4655 et au Mémorial administratif de la province de Limbourg, 1899, 2me semestre, pp. 19 et 21.

vous constaterez que, de 8,665 en 1897, le total fléchit à 8,607 l'année suivante. Le fait signalé, sinon la cause qui lui est assignée, paraît donc bien être exact.

On remarquera, d'un autre côté, que toute la partie de la vallée qui nous intéresse, y compris Wonck et Eben-Emael, est habitée par des Wallons. La race flamande ne commence que « sur la montagne », d'après une expression assez amusante du terroir.

III. MILIEU ÉCONOMIQUE.

Il y a dans la vallée du Geer une dizaine de fermes cultivant chacune environ cent hectares de terres l'élève du bétail constitue, avec la culture de la betterave (1), la principale ressource des fermiers. Les plantations d'arbres fruitiers (cerisiers) sont récentes, et encore à peu près insignifiantes.

En fait d'exploitations industrielles, il faut mentionner en premier lieu les fabriques de chapeaux de paille, les moulins sur le Geer, deux brasseries dont une particulièrement importante à Glons - une troisième est en construction à Roclenge; on peut citer en outre des laiteries, et il ne sera pas sans intérêt de dire ici qu'il est question, à l'heure qu'il est, d'extraire la marne des collines pour en faire du ciment (2).

Un trait caractéristique de la vie économique des populalations du Geer est l'émigration périodique des ouvriers et ouvrières de chapellerie et même des tresseuses. Émile de Laveleye écrivait à ce sujet : « L'été, presque toute la population masculine est absente : les hommes valides se rendent dans les principales villes de l'Europe, où les magasins de

(1) N'oublions pas que la vallée du Geer est située à peu de distance de la région où s'élèvent les fabriques de sucre. C'est même à Glons qu'a été établie l'école sucrière belge, quoiqu'il n'y ait aucune exploitation industrielle de cette nature dans cette localité même.

(2) Il y des carrières de ciment à Hallembaye (Haccourt).

chapeaux de paille les attendent pour coudre et apprêter, suivant le goût local, la tresse qui leur a été expédiée de Glons et de Roclenge. A la fin de la campagne, ils reviennent au village, rapportant souvent une belle épargne, mais aussi les besoins plus raffinés de l'ouvrier urbain (1). » Cette émigration a toujours lieu après la nouvelle année (2) et est dirigée vers les grandes villes, notamment vers Paris: il paraît que l'ouvrier chapelier français laisse la place libre à nos compatriotes; il est effectivement, m'assure-t-on, <<< plus feutrier que pailleux ». La contre-partie de l'émigration, c'est la nécessité d'avoir recours à des moissonneurs flamands, vulgairement appelés « turcos», nécessité qui s'offre surtout dans les communes telles que Fexhe-Slins, Houtain-Saint-Siméon, Heure-le-Romain, dont le caractère agricole est plus prononcé.

On notera également qu'une partie de la population masculine, par exemple à Fexhe, se consacre maintenant à des travaux qui s'accomplissent en dehors de la commune de leur domicile et spécialement dans le bassin industriel de Liége. Beaucoup aussi, lorsqu'est terminée la saison à l'étranger, s'occupent dans les fermes, battent le blé dans les granges, s'emploient à des travaux de culture dans les environs de Liége, etc.

Dans toute la région qui nous intéresse, il n'y a guère qu'un petit commerce rural. Parmi les boutiquiers figurent notamment les marchands de tresses.

Fait digne de remarque, la vallée du Geer n'est point un pays pauvre. Un certain nombre d'habitations trahissent l'aisance. Parfois, il faut le dire, l'extérieur seul est enga

(1) Ouvr. cit., p. 174.

(2) La durée de l'émigration périodique est aujourd'hui plus réduite que par le passé. Elle n'est plus guère que de 3 ou 4 mois, 5 mois au maximum.

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