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Nous avons rencontré, dans cette ville, un travailleur unskilled dont le salaire ne dépasse pas 7 francs par semaine. Ses trois enfants en bas-âge, sa femme et lui habitent une maisonnette de misérable apparence louée 60 francs par année. Un champ d'une étendue de 25 ares leur procure leur provision de pommes de terre. Le prix de location annuelle s'élève à 45 francs.

Un ouvrier plus habile gagne 10 francs par semaine; ses neufenfants sont trop jeunes encore pour apprendre un métier ; sa maison, comprenant trois chambres, lui revient à 60 francs par année; comme la grande majorité de ses compagnons, il ne se livre pas à la culture.

Le loyer des maisons à Poperinghe est plus élevé qu'à Thourout généralement 9 et 10 francs par mois. Une des maisons que nous avons visitées comprenait deux petites chambres, une buanderie fort restreinte et une chambrette à l'étage; le loyer était de 9 francs par mois. Le ménage comptait quatre personnes. Les ouvriers de Poperinghe sont rarement cultivateurs en même temps que cordonniers. Quelquesuns demeurent pourtant à la campagne, généralement dans la banlieue; ils cultivent, à côté de leur habitation, un jardinet. D'autres, en plus grand nombre, demeurent en ville et louent quelques verges de terre situées aux abords de la cité. Ils consacrent à la culture maraichère le temps qu'ils ne doivent pas donner à l'exercice de leur métier.

Les cordonniers de Sottegem n'apprécient guère les avantages que procure la culture d'un lopin de terre. Quelques rares cordonniers occupent pourtant un petit champ d'une vingtaine de verges: terres labourables situées en dehors de l'agglomération urbaine et louées à raison de fr. 0-75 par verge. Une des maisons que nous avons visitées était composée d'une boutique, de deux chambres au rez-de-chaussée, deux à l'étage, une cour et une étable; le loyer était de 100 francs. On nous a indiqué également des maisons reve

nant à 60, 70, 75 francs de location annuelle. Notons aussi que plusieurs ouvriers cordonniers sont cabaretiers ou boutiquiers.

Les maisons habitées par les cordonniers lierrois se composent, généralement, de deux chambres à chaque étage, et d'une cuisine ajoutée du côté de la cour. Le loyer varie entre 180, 200, 250, 300 et 350 francs. Les prix mentionnés en dernier lieu sont les plus fréquents.

Voici une observation portant sur une habitation d'un prix inférieur à ceux que nous venons de citer. Il s'agit d'une famille de six enfants; les ressources du ménage se composent du salaire du père, fabricant de chaussures clouées, soit 12 francs par semaine; le chef de famille gagne en sus 70 centimes par jour comme sonneur de cloches. Il faut y ajouter une somme; de 2 fr. 50, gain hebdomadaire d'une fille apprentie dentellière. Le loyer était de 130 francs. L'habitation, d'une exceptionnelle pauvreté, ne comprenait qu'une salle servant à la fois de cuisine et d'atelier, une chambre à coucher et une mansarde.

CHAPITRE III

Contrat de travail.

I. NATURE DU CONTRAT DE TRAVAIL ET DES RAPPORTS

ENTRE PATRON ET OUVRIER.

Pour le plus grand nombre des ouvriers de la cordonnerie,

nous voulons parler des cordonniers proprement dits et des piqueuses de bottines qui travaillent tous à la pièce, — le contrat qui lie les ouvriers à leur patron est le louage d'ouvrage. Nous l'opposons au contrat de louage de service, qui n'est en usage que dans la catégorie, bien moins nombreuse, des ouvriers et ouvrières employés à la journée dans les ateliers de l'entrepreneur commercial.

De là vient que, dans le premier cas, comme nous le verrons plus loin, on n'exige généralement pas de préavis de congé, car la convention, quoiqu'elle ait généralement des effets durables dans la pratique, n'en est pas moins, en principe, momentanée. Le livret que reçoivent les ouvriers, sur lequel sont inscrites les pièces livrées à l'ouvrier et le salaire auquel elles sont payées, ne les lie pas d'une façon permanente au patron qui le leur délivre.

Toute autre est la situation des découpeurs, des quelques cordonniers, des magasiniers et des piqueuses de bottines employées à l'atelier du patron. Qu'on les paie à la journée, à la semaine ou même à la pièce, ces travailleurs ne s'engagent pas tant à terminer telle besogne déterminée, qu'à prester leur activité toute entière pour toute sorte d'ouvrage, et pour tout le temps que le patron le jugera convenable et qu'il ne dérogera pas aux conventions relatées, le plus sou

vent, dans les règlements d'atelier. Ici, comme nous le verrons plus loin, le préavis est de rigueur et l'indemnité pour renvoi intempestif peut être réclaméc.

Chez tous les ouvriers, qu'ils appartiennent à la première catégorie ou à la seconde, la permanence des rapports avec un même patron est chose habituelle ; il faut des raisons graves pour y déroger. Même en temps de morte-saison (ceci surtout dans les localités où le métier est encore prospère), l'employeur congédie rarement son ouvrier; il préfère, en général, diminuer le nombre des chaussures qu'il lui donne à confectionner

II. DROITS ET devoirs récipROQUES DES PARTIES.

Nous traiterons successivement du cas de renvoi, du départ volontaire, des indemnités pour malfaçon et des amendes.

a) Des cas de renvoi. L'engagement est généralement d'une durée indéterminée. A Iseghem, pour les cordonniers ordinaires, travailleurs à la pièce, le renvoi est notifié verbalement, souvent sans préavis, et il ne donne lieu, de part et d'autre, à aucune indemnité. L'ouvrier est tenu d'achever, dans la huitaine, l'ouvrage qui lui a été confié.

Les causes de renvoi sont généralement indiquées dans les règlements; ce sont surtout le vol, l'ivrogneric, les rixes, les injures, les fautes graves constatées dans l'exécution du travail. Ces congés peuvent n'être que temporaires.

L'ouvrier employé à la journée donne ou reçoit généralement un préavis de huit jours; il a droit au salaire d'autant de journées de travail. Pour les découpeurs, le règlement exige généralement un préavis de huit ou quinze jours et une indemnité qui varie dans les mêmes proportions.

A Thielt, à Thourout, à Poperinghe, à Soltegem, on suit généralement les mêmes usages, à moins que les règlements

n'y dérogent. Partout, la coutume exige que le patron avertisse l'ouvrier, même le travailleur à la pièce, huit ou quinze jours d'avance, lorsque la cause du renvoi ne peut lui être imputée, mais qu'elle remonte au manque de commandes ou à la cessation du commerce.

A Lierre, les rapports entre patron et ouvrier sont particulièrement instables. Le cordonnier travaille à la fois pour plusieurs patrons. Il peut se présenter ou ne pas se présenter, chaque lundi ou mardi, chez l'employeur, pour obtenir de l'ouvrage; celui-ci lui remet de la besogne ou la lui refuse, comme bon lui semble. Notons que ce régime est exceptionnel.

b) Le départ volontaire. L'ouvrier n'a guère l'habitude de donner un préavis. Partout où a porté notre enquête, le cordonnier à la pièce peut librement quitter son patron moyennant l'achèvement, dans les huit jours, de la besogne qui lui a été confiée; aucune indemnité ne lui est réclamée en vertu des règlements s'il quitte sans préavis, mais l'usage veut, dans certaines communes, qu'il s'astreigne à cette formalité. Il en est ainsi notamment à Thielt et à Thourout.

Les ouvriers employés à la journée, à la fabrique ou dans les magasins du patron, donnent régulièrement un préavis et ont le droit d'être employés durant les huit jours qui suivent.

Comme nous l'avons déjà dit précédemment, les découpeurs, ouvriers d'élite dont le départ intempestif peut causer un dommage au patron, sont généralement soumis à un préavis de huit ou quinze jours.

Nous venons de voir qu'à Licrre on s'affranchit facilement de toute règle à cet égard.

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c) Les indemnités pour malfaçon. · Dans beaucoup de règlements ces indemnités, dues au patron, sont confondues avec les amendes et reçoivent le même emploi que celles-ci.

Nous croyons utile cependant, de mentionner les cas qui donnent lieu le plus communément à l'application de ces

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