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une chapelle, dont la dénomination s'est conservée jusqu'à nous. Quant au monastère des Précheresses, qui occupait une partie du premier palais de nos ducs, il a depuis longtemps disparu, mais le souvenir s'en est perpétué dans le nom donné à la place près de laquelle s'élève le nouveau Saint-Epvre. Leur église, que l'on regardait comme la plus ancienne de Nancy, renfermait, entre autres monuments, celui de Marguerite de Navarre, femme de Ferry III, lequel les avait fait venir dans sa capitale du bourg de Saint-Nicolas, où elles s'étaient primitivement établies. En 1629, la pieuse Marguerite de Gonzague, veuve du duc Henri II, prit l'habit du tiers-ordre de Saint-Dominique dans cette église. Les épitaphes des religieuses, accompagnées d'armoiries, portaient les noms des plus nobles familles de Lorraine : c'est que, jusque vers le milieu du xvIe siècle, il était d'usage, pour être admis dans ce couvent, de faire des preuves de noblesse, comme dans les chapitres de Poussay, Remiremont, Epinal et Bouxières; c'est pourquoi aussi les Précheresses se qualifiaient dames, voire même honorées dames; et leur monastère, pour se distinguer des autres maisons religieuses de femmes, prenait le titre de monastère ducal.

ADDITION.

Le mémoire qui précède était imprimé lorsqu'un de nos confrères m'a signalé un fait qui mérite de ne pas être passé sous silence, en ce qu'il complète ce que j'ai dit (p. 45-47) de la séquestration des lépreux. Il est rapporté par Florentin Le Thierriat1 et concerne une femme du village de Saint-Dizier, près de Nancy (aujourd'hui les Trois-Maisons), dont le mari avait probablement été enfermé à la Madelaine. Ce fait prouve que les malheureux atteints de ladrerie n'étaient pas sculement séparés du monde, mais que, devant la loi, ils étaient considérés comme morts. Voici comment s'exprime le chroniqueur :

En l'an 1543, fut un grand débat entre Monseigneur et M. l'évesque de Toul, à l'endroit de certaine femme du nommé Jean Blin, du village de Saint-Didier. Le susdit Jean Blin, estant tombé en lèprerie, avoit, ainsy qu'estoit d'usage, esté conduit en la maladrerie d'environ huit mois. Jeanne, sa femme, avoit pris autre mari, et M. l'évesque en vouloit dire qu'auroit dù, ladite Jeanne, avoir de luy permission. La chose portée aux Assises du lundy de février, fut dit et jugé par messieurs de la chevalerie que Jeanne estoit bien et duement mariée en second, d'autant qu'icelle prouvoit qu'avant qu'en prit autre mari,

1. Recueil de documents sur l'histoire de Lorraine, année 1868, 2 partie, p. 83.

elle avoit délivré à Jean Blin, en la maladrerie, un linceul blanc, deux chaises de bois, un pot de fer, une aiguière d'étain et un petit chaudron, et que, par la loi, ne devoit fournir que ledit linceul, tous autres ustensiles de ménage n'estant qu'à sa volonté. Formoit, ledit Jean Blin, prétention d'avoir part en maison et jardin qu'avoit acquété avec Jeanne; et fut dit, sur ce, que ladreux conduit en ladrerie, à l'assistance de son pasteur, de porteurs de croix et torches des morts, cloche tintante, estoit réputé mort et mis en terre, partant sa femme veuve et relicte, avoit droict à tous biens qu'auroit eus si fùt iceluy mort en son lict. Et sur ce que fut répliqué au nom dudit Jean Blin, qu'encore qu'eut esté conduit avec prières et cérémonies de morts en la maladrerie, ains avoit-on pesché en quelques formes, et que n'avoit iceluy esté fourni, comme est dit par la loi, de castagnettes et de gants, ains seulement de sa bouteille et esculle de bois. Fut redit que castagnettes et paire de gants estoient choses que devoient fournir messieurs les bourgeois de SaintDidier; que si advenoit effect quelconque en succession, que ne seroit directe, en pourroit hériter. Fut adjouté que M. de Toul n'avoit droict de ne rendre valable le second mariage, en tant que ledit ladre mouroit et laissoit meubles et ustensiles en sa cellule, iceux pour un tiers advenoient à M. son pasteur pour son droict de son église.

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Le coiffeur moderne et le perruquier de l'ancien régime.

Il y a trente ans, le perruquier-coiffeur végétait tristement dans un cercle étroit. Parfois une tête chauve réclamait sa protection contre les injures du temps ou les rigueurs de la saison, alors, suivant le sexe des per

sonnes, il confectionnait le modeste toupet ou le tour classique, invariablement blond ou brun; mais ce n'était là que des travaux exceptionnels; le peigne et le rasoir pouvaient seuls lui fournir son pain quotidien. Heureusement, le retour du chignon vint rendre la vie au commerce des cheveux; peu à peu les tresses et les nattes reprirent faveur, et l'horizon du coiffeur s'agrandissant de jour en jour, on vit bientôt les pouffs et les boucles flottantes couronner l'édifice élevé par lui sur la tête des élégantes1. Dès lors, le perruquier-coiffeur se vit en possession, près des dames, du rôle de grande utilité

La position que, de nos jours, il a su conquérir dans les cabinets de toilette, est assurément brillante et digne d'envie pour des cœurs ambitieux, néanmoins elle n'est pas comparable au passé de ses devanciers, surtout au XVIIIe siècle.

Le maitre perruquier de l'ancien régime n'a rien de commun avec le sensible et tendre Jasmin célébré par Charles Nodier et Sainte-Beuve; sa condition est toute autre que celle du sémillant Figaro, popularisé par Beaumarchais; c'est dans le poëme du Lutrin qu'il faut chercher son profil :

Ce perruquier superbe est l'effroi du quartier.
Et le courage est peint sur son visage altier.

1. Le rapport officiel du jury international de l'Exposition de 1867 constate qu'il se vend annuellement, en France, 68,000 kilogrammes de cheveux de coupe, dout 40,000 sont indigènes, 20,000 importés de l'Italie, de la Belgique et de l'Allemagne, et 8,000 recueillis sous forme de déchets, utilisés pour les chignons ordinaires.

Sur ce total, la France paraît employer 25,000 kilog. de cheveux pour la confection des postiches, le surplus est acheté par l'étranger, et surtout par l'Amérique, l'Angleterre et la Russie.

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