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lettres et par messages de le faire mourir, et se disposa à réaliser ses menaces par une trahison. Il avait une maison près de l'hôtel royal de Saint-Paul; il s'y rendit secrètement au mois de juin avec vingt de ses complices', et s'y tint caché jusqu'au 14, c'est-à-dire jusqu'à la fête du Saint-Sacrement, attendant une occasion favorable pour mettre son projet à exécution.

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Ce jour-là, le connétable, qui avait soupé à la cour, ayant pris congé du roi, se disposait à rentrer chez lui sans se défier de rien, lorsqu'il fut assailli tout à coup par les gens que messire Pierre de Craon, moins criminel peut-être qu'égaré par le ressentiment, avait placés en embuscade. D'après son ordre, ces assassins se jetèrent avec fureur sur le connétable, qui, abandonné de tous ses serviteurs à l'exception d'un seul, ne pouvait guère résister. Il se défendit tant avec courage. Garanti par une forte cuirasse qu'il portait ses vêtements, et armé de son poignard, il para quelque temps les coups mortels qu'on lui portait de tous côtés; mais ayant reçu une blessure grave à la tête, il se laissa glisser à bas de son cheval, et chercha à se sauver en toute hâte dans une maison voisine 2. Un des assaillants s'en aperçut et lui donna trois grands coups de son épée dans le dos; puis la retirant toute sanglante il la montra à messire Pierre de Craon. Celui-ci, convaincu que le connétable avait été percé de part en part, se félicita du succès de son crime, sans songer qu'il avait ainsi entaché son honneur et terni l'éclat de sa noblesse. « C'est fini, » dit-il à ses complices; et à l'instant même ils s'enfuirent tous précipi

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CAPITULUM II.

In detestacionem sceleris rex Petrum bonis privavit.

In regis injuriam, quia in regni sui precipuum protectorem, patrata perfidia videbatur. Quare sceleris comperta veritate, verens ne, si istud dissimulasset, multi, ut sunt ad similia proni, hec et majora perpetrarent, egrum consolatus est militem, promittens quod id inultum minime remaneret. Incensusque nec immerito cupiditate vindicte, ut audivit Petrum Secanam fluvium jam transmeasse, cordasque naves trahentes cunctis transmeantibus aptas dirupisse, ne cito insequi posset, criminosos jussit persequi fugientes, et prosequucione illa tres ex eis captos et Parisius adductos capite plecti precepit, ut ceteris proditoribus cederent in exemplum.

Ulterius, egre ferens quod ceteri complices evasissent, cum in personas eorum nequiret justiciam exercere, mobilia et immobilia eorum jussit publice confiscata fisco regio applicari; domos quoque prefati domini Petri, quas in villa Parisiensi habebat, eciam solo equari. Inter illas una in cimiterio sancti Johannis pulchrior habebatur, cujus structuram suis aulicis dono dedit. Et quia vera relacione audierat ibi antiquum cimiterium sancti Johannis fuisse, quod probabant ossa arida sub fundamentis reperta, ad eumdem usum ecclesie iterum condonavit. In detestacionem sceleris, non solum que idem Petrus habebat in villa Parisiensi destructa sunt, ymo et quedam pulcherrima domus fortis, que Porticus Fons vocabatur, a Parisius duodecim milibus distans, ruinam similem passa fuit; cujus proventus occupans dono regis dux Aurelianensis eos postmodum Celestinis Parisiensibus concessit ad opus fundacionis

CHAPITRE II.

Le roi confisque les biens de Pierre de Craon, en punition de son crime.

Le roi regarda comme un attentat contre sa personne la trahison commise sur le principal défenseur de l'État. Aussi, dès qu'il en fut informé, il alla consoler le connétable, et lui promit que le crime ne resterait pas impuni. Il craignait, en fermant les yeux sur cet assassinat, d'encourager les autres à des crimes semblables et pires encore. Pierre de Craon avait déjà passé la Seine, et avait fait couper les cordes des bacs pour ôter les moyens de le poursuivre. A cette nouvelle, le roi, animé d'un juste ressentiment, ordonna qu'on courût sur les traces des coupables. Trois d'entre eux furent arrêtés, amenés à Paris, et décapités pour servir d'exemple aux traîtres.

Cependant le roi, irrité de voir que les autres complices lui avaient échappé, et ne pouvant frapper leur personne, ordonna que leurs biens, meubles et immeubles, fussent confisqués au profit du trésor royal. Il fit raser les maisons que Pierre de Craon possédait à Paris. Il y en avait une qui était située au cimetière Saint-Jean, et qui passait pour la plus belle : le roi en donna les matériaux aux seigneurs de sa cour. Ayant appris que cet hôtel était bâti sur l'emplacement de l'ancien cimetière de la paroisse de Saint-Jean, comme le prouvaient d'ailleurs les ossements desséchés qu'on trouva dans les fondations, il rendit le terrain à sa première destination, et en fit don à la paroisse. La vengeance du roi ne se borna pas à la destruction des maisons que Pierre de Craon possédait à Paris : il fit démolir également son magnifique château de Porchefontaine, qui était à douze milles de la capitale, et en donna les revenus au duc d'Orléans ; ce prince les céda plus tard aux Célestins de Paris, pour la fondation d'une chapelle qu'il fit élever dans leur église, comme on le verra. Outre ce château fort, le roi accorda aussi à perpétuité au duc d'Orléans la Ferté-Bernard, qui était la résidence

capelle, quam ipse in ecclesia eorum construxit, ut dicetur. Non solum prefatam domum sed et Feritatem Bernardi, ubi prenominatus Petrus mansionem principaliorem faciebat, rex eidem duci concessit perpetuo possidendam, prius tamen misso Francie admirallo, domino Johanne de Vienna, qui cuncta ibi reperta erario regio vendicaret. In hoc loco supellectili preciosa et diviciis refferto, domini Petri uxor et ejus unica filia valde pulchra degebant. Quas adiens admirallus mandatum regium sic rigorose complevit, quod direptis supellectili et quidquid ibi preciosum habebatur, que summam quadraginta mille scutorum auri excedebant, eciam virorum agrestium intemperanciam excedens, eas cum sola tunica de loco ignominiose expulsit; quod et universi nobiles postmodum reprobaverunt.

CAPITULUM III.

De hiis qui regni ardua disponebant, qui consuluerunt ut rex ducem Britanie expugnaret.

Prescriptis rite peractis, rex complices perfidie per villas et civitates regni voce preconia lituisque precinentibus proscriptos exules publicari statuit. Et quia audierat dominum Petrum, meritum supplicium metuentem, in Britaniam profugisse, duci Britanie regios direxit apices, mandans ut proscriptum virum sibi remitteret, sub pena criminis lese regie majestatis. Quamvis publice ac fida relacione diceretur quod tunc cum duce cognato suo, tunc eciam conestabulario infenso, regi nichilominus rescripsit quod bene post facinus perpetratum ipsum viderat et receperat comi fronte, sed Britaniam deserens quo fugisset procul dubio ignorabat.

principale de Pierre de Craon. Mais il chargea auparavant l'amiral de France messire Jean de Vienne de saisir et d'appliquer au trésor royal tout ce qui s'y trouvait. La Ferté-Bernard, qui renfermait un riche mobilier et des trésors considérables, était habitée par la femme et la fille unique de Pierre de Craon. L'amiral s'y rendit et exécuta les ordres du roi avec la dernière rigueur. Il ne se borna pas à piller le mobilier et tous les objets de prix, dont la valeur s'élevait à plus de quarante mille écus d'or; il poussa la brutalité jusqu'à chasser ignominieusement les deux femmes en chemise. Cette conduite inhumaine fut réprouvée par toute la noblesse.

CHAPITRE III.

Les conseillers du roi l'engagent à combattre le duc de Bretagne.

Après avoir exercé cette première vengeance, le roi fit publier par la voix du héraut et à son de trompe, dans toutes les villes et cités du royaume, la sentence de proscription et de bannissement portée contre les complices de l'assassinat. Informé que messire Pierre de Craon s'était enfui en Bretagne afin d'échapper au juste châtiment qu'il redoutait, il adressa un message au duc de ce pays pour le sommer de lui livrer le coupable, sous peine d'être traité comme criminel de lèse-majesté. Tout le monde tenait Pierre de Craon pour certain que était alors auprès du duc de Bretagne, son cousin, et ennemi personnel du connétable. Cependant le duc répondit au roi qu'il avait bien vu le meurtrier après l'exécution du crime, qu'il lui avait même fait bon accueil, mais que Pierre de Craon avait quitté la Bretagne, et qu'il ne savait où il était allé.

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